Comme un enfant qui joue tout seul d’Alain Cadéo aux Éditions La Trace
« Oui, j’ai trente-sept ans, toutes mes dents et l’énergie d’un condottiere. J’ai sillonné le monde à grandes enjambées. J’ai travaillé comme un bourricot, noria des forçats de l’ère post-moderne. J’ai séduit, intrigué, connu l’ivresse du pouvoir, pauvre de moi.. Et la voix d’un clochard un jour m’a remis à ma place : « Pourquoi es-tu si dur ? » Je me souviens toujours de cette voix. Elle fut le déclencheur de ma dégringolade ou de mon ascension. C’est selon. »
Cette réflexion d’un SDF va faire réfléchir Raphaël sur sa vie, s’interroger sur ses priorités. Il décide de tout plaquer. Il démissionne, se débarrasse de son appartement et de la plupart de ses biens. Il ne garde que sa voiture et une caisse de livres. Libre de tout ce superflu qui le clouait au sol dans un confort lénifiant, il prend son envol. Il prend la route vers les lieux de son enfance, vers le berceau familial, vers l’océan. Direction le Sud-Ouest. Il veut renouer avec son passé pour se construire un avenir.
Éléna vit au bord de l’Océan Atlantique. Après une escapade de quelques années à Paris pour s’éloigner d’une mère aimante mais qui ne sait pas bien le montrer, d’une mère qui n’a jamais voulu lui parler du père qu’elle n’a pas connu, elle est de retour au bercail. Après cette fuite en avant, cette période d’errance ponctuée de petits boulots et de relations d’un soir, elle est revenue panser ses blessures auprès de l’Océan qui lui manquait tant. Elle partage son temps entre son travail dans un hôtel de la côte, son fils Lorenzo et sa mère.
« La route bétonnée, droite au milieu des pins, les cinq kilomètres qui la séparent de son lieu de travail, qu’elle les fasse à vélo ou en voiture, lui font battre le cœur, soit qu’elle retourne vers son fils, soit qu’elle s’approche de l’Océan. Marée montante ou descendante de son âme, rythme désormais quotidien, aller vers ou s’éloigner de l’immense masse en mouvement vivant et familier… Mais ne plus jamais perdre le contact avec cette présence tutélaire. »
Ce roman, c’est l’histoire d’une rencontre, de tous ces éléments qui conduisent deux êtres que tout semblait séparer à se connaître, je dirais à se reconnaître. Pour qu’une rencontre soit possible il faut être disponible, être sensible aux multiples signaux que nous envoie l’univers, savoir écouter son intuition. Car la nature sait tout, de toute éternité. Mais pour pouvoir capter ces signaux il faut se débarrasser du superflu, libérer son âme de tout ce qui l’emprisonne, vivre en communion avec la nature et non sur son dos.
Comme un enfant qui joue tout seul est un superbe roman plein d’une très belle philosophie. Une conception de la vie portée par les mots d’Alain Cadéo, par une poésie aussi hypnotique et apaisante que le bruit des vagues qui viennent s’échouer sur la grève et aussi vivifiante que le vent du large.
Ouvrir un livre d’Alain Cadéo est toujours un privilège, celui-ci ne déroge pas à la règle. Découvrez cet univers poétique et philosophique si inspirant. Laissez- vous porter par la musique des mots de l’auteur. Ce superbe roman est à découvrir dès aujourd’hui en librairie.