Deux articles dans la même semaine, mais que nous arrive-t-il ma bonne Simone ?
C'est que j'avais grave envie de vous parler un peu SF, genre littéraire dont je ne parle pas assez ici sur le blog (parce que je n'en lis pas beaucoup aussi, quelle logique Dominique), alors que le genre m'attire pas mal.
D'autant que là j'ai tapé dans de la SF contemporaine (pas vieille pour éviter notamment les satanés clichés et autres scories autour des personnages féminins, hum hum) et je me suis retrouvée avec de la Hard Science Fiction dans les mimines, autrement dit qui parle véritablement de sciences connues et qui reste cohérente d'un point de vue social et technologique.
Ça fait peur comme ça ? Rassurez-vous, je nous ai trouvé un roman qui se lit comme on boit un verre d'eau : avec facilité et naturel.
Un groupe d'hommes et de femmes venant de la Terre ont rejoint une mission de colonisation pour une nouvelle planète, Sinisyys, plus propre, plus neuve, plus bleue. Eric et sa compagne Johanna, font partie de l'expédition, rêvant d'un monde meilleur pour créer une famille.
Ça va pas se passer comme prévu ?
Gagné.
Les membres de l'équipage se réveillent de leur sommeil artificiel mais voilà qu'ils se rendent compte que leur énorme vaisseau, le Stern III, ne s'est pas posé sur Sinisyys.
Que les ordinateurs de bord et la machinerie du vaisseau ne fonctionnent plus.
Que l'endroit où ils sont ne ressemble à rien si ce n'est à un immense, gigantesque tunnel noir sans plafond, sans limite, sans ciel, ni étoiles.
Qu'ils ont dormi bien plus longtemps que les 200 ans de prévu.
Et qu'entre temps, une espèce de scarabées, appelés les Jardiniers, modifiés génétiquement se sont incroyablement développés au sein du jardin du vaisseau.
En gros, c'est la merde.
Romain Benassaya, que je découvre avec ce roman, nous embarque dans une grande épopée où l'on va suivre la communauté d'humains prise au piège d'un endroit unique, étrange et labyrinthique.
Alors forcément, la première chose à laquelle on est confronté c'est la réaction de ces hommes et de ces femmes qui se retrouvent complètement aveugles, sans carte ni repères. Certains le prennent plutôt bien,
tandis que d'autres...
Bon gré, mal gré, une nouvelle société va alors surgir : les Bâtisseurs, dirigés par Johanna, souhaitent s'implanter avec les Jardiniers durablement en abandonnant l'idée de revoir l'univers et leur planète. Tandis que de l'autre côté, les Explorateurs, suivis par la figure de tête brûlée d'Eric, vont absolument tout tenter, au détriment parfois de la bonne entente générale, pour explorer ce qu'ils nomment " le Tunnel Noir " et trouver une sortie.
D'où la difficulté de trancher : les uns comme les autres, même dans leurs positions extrêmes, ont d'excellentes raisons de faire ce qu'ils font.
(je vous avoue que j'étais plus du côté des Explorateurs car comme eux je brûlais d'impatience de savoir ce qu'il se passait dans ce Tunnel et que le récit avance)
C'est ainsi qu'entre les Explorateurs et les Bâtisseurs, les enjeux politiques et de survie vont se tendre comme un string sur un hippopotame, rappelant l'éternelle problématique humaine : mettez une poignée d'êtres humains ensemble dans un bocal, secouez-le et vous verrez que malgré la haute intelligence et les capacités de sociabilisation des hommes, ça finira toujours par péter dans le couffin au bout d'un moment.
Par plusieurs aspects, Pyramides m'a fait penser à Fondation d'Isaac Asimov et aux grands titres de la Science-Fiction, rien que dans la description sociale d'un groupe qui tente de recommencer là où ils ont échoué la première fois.
Avec cette idée d'immensité et d'enfermement, Benassaya arrive à traduire admirablement la peur de l'inconnu et ce vertige qui me fascine tant dans les films de SF. Comment vont-ils s'en sortir ? Comment ça va se finir ? Bref, ÇA BOUILLONNE.
Le style est remarquablement fluide et moi qui suis assez peu habituée à la pure SF, je me suis souvent surprise à être complètement immergée dans l'histoire, mais genre à oublier que j'étais en pyj' dans mon plumard et non pas dans un vaisseau spatial.
Les scènes d'action qui me barbent généralement dans la littérature SF (car je ne bite pas une cacahouète et que je n'arrive pas à m'en faire des images mentales), sont assez peu nombreuses ici, mais quand ça bouge, l'auteur réussit l'exploit de mêlé technique et action sans qu'une buse de mon calibre soit laissée en plan. J'ai même réussi à piger les problématiques de la gravité. Pas à 100%, hein faut pas déconner, mais disons un bon 68,99%.
Il faudra cependant attendre le milieu du roman pour qu'un événement majeur rebatte les cartes et que la destinée de certains personnages tiennent plus à coeur.
Car jusqu'ici, je vais pas vous mentir, j'avais du mal à m'attacher à un seul personnage (à part les Jardiniers, peut-être parce que ce ne sont pas des humains et que je les ai trouvés dès le départ très touchants et purs), étant donné que les enjeux dramatiques touchaient plus la collectivité qu'un personnage en particulier. Ce n'est vraiment quand la situation se corse que les problématiques humaines prennent le pas sur celles de la technologie et la seconde moitié du bouquin va changer tout ça. Les drames personnels que certains vont vivre, et qui manquaient jusque-là, vont donner la dimension émotionnelle que j'attendais du roman.
D'où que j'ai eu les yeux brouillés aux dernières pages. Car si la fin reste éminemment ouverte pour les humains du Stern III et les quelques héros restants, pour d'autres, ça sera la fin du voyage, et les adieux, pétaradant dans un bouquet final explosif, seront assez déchirants.
On est content Alban.
Le seul point négatif malgré tout (ah quand même, on commençait à s'inquiéter) que je pourrais vraiment reprocher à l'objet livre, c'est sa couverture (et un peu son titre j'avoue), dont je vois mal le rapport avec l'histoire. C'est d'autant plus dommage que j'ai été attirée par le roman en grande partie pour son illustration (du talentueux Niko Henrichon). Alors certes je n'ai pas été déçue du résultat final, mais je préfère prévenir les enthousiastes esthètes qui pourraient se sentir un poil floués.
Sinon,
beaucoup de positif donc pour ce roman qui pose remarquablement bien son ambiance et son atmosphère qui m'a pas mal marquée mine de rien (j'y repense encore et ça me donne envie de replonger dans un récit SF).
La mission de Romain Benassaya a été bien remplie, Mimine a été conquise.