Ils sont tout nouveau et tout différent. Fin 1991 Marvel tient sa promesse avec le groupe mutant X Factor. Refonte complète de l'équipe et de ses membres, et nouvelle direction artistique radicale, confiée au scénariste Peter David et au dessinateur Larry Stroman. La grande qualité de ce nouveau départ est qu'en une vingtaine de pages, tout est résumé à merveille, le lecteur comprend qu'il va avoir droit à de sérieuses tranches d'humour, et qu'il va se poiler tous les 30 jours. En contrepartie, et contrairement à certains comics modernes où la drôlerie est un prétexte pour ne pas écrire grand chose d'intelligent, ici nous avons aussi du fond. Et les personnages sont tous très attachants, et ils sont si dysfonctionnelles dans leurs individualités qu'ils fonctionnent parfaitement ensemble. La manière dont ils sont introduits est également un clin d'œil à des lignes narratives à venir; par exemple on comprend vite que Polaris est toujours éprise de Havok, même si elle craint de le retrouver, et en parallèle la jeune Rahne Sinclair -depuis quelle a été génétiquement manipulée sur Genosha- est elle aussi complètement dingue de son futur leader, au point que cela va mettre en péril la cohésion de X Factor. Quiksilver quitte momentanément Les Vengeurs pour rejoindre la bande de mutants, et il est toujours aussi imbu de lui-même et insupportable, même si pas en grande forme. Et Guido sera le "malabar" de l'équipe... derrière les gros muscles et l'humour potache se cache une tristesse réelle et un passé pas toujours reluisant. L'Homme multiple, c'est-à-dire Jamie Madrox, est ici présenté comme un type un peu inconséquent, une sorte de mascotte du groupe, mais très vite c'est lui qui va avoir le beau rôle, puisqu'une sombre histoire de double va être le moteur des premières intrigues. Et puis Havok, bien sûr, le chef toujours dans l'ombre de Scott Summers, son frère, et qui essaie de compenser avec un surplus de sérieux, que les autres lui reprochent. Pour être complet signalons que X Factor est alors sous la coupe de Valérie Cooper, agent du gouvernement, et donc travaille pour ce dernier. Bref une vitrine positive dans une société qui habituellement craint, voire déteste profondément les porteurs du gène X. Tout ce premier numéro est un petit bijou en matière de comment faire interagir des héros très différents les uns des autres, et créer une cohésion sans avoir l'air d'y toucher. Toutes les répliques font mouche, et derrière les cases, en grattant un peu, nous trouvons une foule de questions à résoudre dans l'avenir. Stroman au dessin a un style très particulier; on est à la limite du caricatural, la construction des planches explose, les proportions deviennent optionnelles, et l'ensemble éclate et pulse d'une singularité fascinante, même si l'ancrage de Al Milgrom n'est pas, à mon avis, ce qui convient le mieux pour ce genre d'exercice. Une période un peu trop oubliée de l'histoire des mutants, que je relis toujours avec grand plaisir, des années après.
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