Le sourire étrusque
José Luis Sampedro
Editions Métailié
Traduit par Françoise Duscha-Calandre
1994
« Laisse-moi te guider, mon tout petit ! Je te mettrai sur la bonne voie pour escalader la vie, qui est dure comme la montagne, mais qui te remplit le cœur quand tu es au sommet ! »
J’ai lu ce livre grâce à Delphine. Dans un tag, elle en a parlé comme d’un joyau caché… Il était à la médiathèque ! Mais pas dans les rayons, à la réserve ils sont allés le chercher, vieux, abîmé, tâché, mais sortable. Quelle chance !
Un grand-père calabrais malade, va apprendre à se connaître grâce à son petit-fils. Une sorte de quête initiatique pour le troisième âge !
Ecrit par un espagnol, il se situe en Italie… Paradoxe rigolo.
Le roman est raconté du point de vue du vieil homme et c’est ce qui en fait tout le charme. C’est un homme rustre, macho au possible, qui a combattu les fascistes, et qui a un regard sur la vie citadine et sur l’éducation des enfants pour le moins original et naïf. Il y a donc plein de passages très drôles et d’autres très émouvants.
Le petit-fils va « ramollir » l’homme, va faire tomber le masque du vieil homme bourru et en même temps va lui permettre de donner un sens à sa fin de vie.
C’est aussi dans la transmission intergénérationnelle, à travers ses souvenirs que le lecteur va comprendre qui est réellement cet homme et finira d’apprendre à le connaître dans ce que son fils révélera sur lui. Les moments du passé sont succulents, ils apportent une dimension profonde au roman, ils ancrent le récit dans l’Histoire et dans le patrimoine culturel du sud de l’Italie. J’avais vraiment l’impression que ce livre avait été écrit par un italien !
Et cerise sur le gâteau, le vieil homme va découvrir l’amour, non pas physique (il ne peut plus à cause de la Rusca, comme il nomme son cancer), mais un amour qui va renverser ses certitudes sur les rapports entre les hommes et les femmes.
Un roman drôle, émouvant, tendre. Oh bien sûr, je n’aurais pas aimé être la belle-fille d’un tel homme ! Cependant, j’ai adoré ses réflexions, ses étonnements face à la vie moderne, ses brusqueries, ses incompréhensions, ses maladresses et ses histoires sur un sud de l’Italie où les vieux se battent pour vivre et ne surtout pas mourir avant leurs ennemis…
« Tu vois, mon petit camarade, je ne suis plus sûr de ce dont j’étais sûr. Dieu n’a pas bien fait les choses, on devrait vivre autant de fois que les arbres qui, après une année mauvaise, font de nouvelles feuilles et recommencent à vivre. Pour nous autres, un seul printemps, un seul été et au trou…C’est pour ça que tu dois dès maintenant bien former tes branches. Moi, je suis né sur du caillou et je ne me plains pas, j’ai réussi à me dresser tout seul. Mais j’aurais pu fleurir mieux… »
Un beau livre, assurément !