C'est ma première lecture d'un ouvrage paru aux éditions Héloïse d'Ormesson, et je dois dire que je ne suis pas déçue. Comme vous pouvez le constater, l'objet est vraiment beau, la couverture est sublime, les couleurs sont harmonieuses et le logo de la maison d'édition est lui aussi très joli.
Le fond n'a pourtant rien à envier à la forme : j'ai beaucoup aimé ce roman historique. C'est une période mouvementée que nous donne à lire Jean-Yves Catonné puisque nous suivons notre héroïne, Clarisse, de la fin du règne de Louis XV jusqu'à la seconde Restauration après le deuxième empire de Napoléon Bonaparte. Ces nombreux changements de régimes (monarchie absolue, monarchie constitutionnelle, république, empire, restauration, cent jours...) font de cette période un moment charnière et complètement instable, et ça je le savais.
Ce que j'ignorais en revanche, c'est à quel point le monde du théâtre avait subi de plein fouet tous les changements liés aux nouveaux régimes. En suivant Clarisse, fille d'aubergiste, violée par Louis XV, comédienne de foire, puis à la Comédie Française, devant affronter alors tous les conflits liés à la nature de " troupe royale " de celle-ci, on se rend compte que le monde de la scène a cristallisé les problèmes politiques et sociaux de l'époque. Les jugements portés sur les comédiens, par l'Eglise évidemment mais aussi par les détenteurs du pouvoir et par le public lui-même, ont changé au gré des années, des tendances, au point de faire de ces hommes et femmes des stars avant l'âge ou des prisonniers risquant la peine de mort.
La galerie des personnages est impressionnante, on côtoie des individus fictifs évidemment, aux côtés de personnalités historiques (Louis XV, Louis XVI, Marie-Antoinette, d'Artois, Bonaparte, Louis XVIII, Beaumarchais, Talma) mais on ne se perd jamais. J'ai beaucoup aimé retrouver toutes les anecdotes historiques bien connues et les voir servir l'avancée de l'intrigue. Rien n'est dit sans raison, tout est lié, plus ou moins directement à Clarisse.
L'héroïne est un personnage intriguant, autant qu'attachant. Je me suis dit, à plusieurs reprises, qu'elle manquait de sentiments, d'une intériorité profonde, d'une complexité humaine mais cette froideur a une explication. Clarisse ne surmontera jamais l'horrible épreuve que fut la perte de sa virginité, un complot barbare liant son père à un " triste sire " qui aurait pu être son grand-père. Clarisse aime, mais ne sait pas forcément le montrer, Clarisse est détruite dans ce qu'elle avait de plus vrai, et elle devient alors comédienne sur scène et dans la vie. Adrien lui-même, alors qu'on voudrait y croire, ne parvient pas à rallumer la flamme, le brasier n'a pas été seulement soufflé, il a été piétiné, irrémédiablement détruit.
C'est dans ce contexte de violence, d'insécurité et de trahison que Clarisse devient femme, actrice émérite mais peu reconnue. J'ai vraiment été passionnée par tout ce que ce roman, sans être jamais pédant ou trop documentaire, nous apprend du monde du théâtre et j'ai beaucoup souri, car, contrairement à ce que l'on pourrait croire, on y trouve de nombreuses pointes d'humour, grinçant parfois, mais quand même drôle.
Si vous aimez l'Histoire, si vous aimez le théâtre, si vous aimez suivre la destinée d'un personnage original, si vous aimez les romans documentés et bien écrits, alors vous ne pourrez que vous régaler à la lecture de ces pages. Et pour information, il sort aujourd'hui en librairie... A bon entendeur !
Priscilla (@Priss0904, @litterapriscilla, Page Facebook)