Trouver les mots

Trouver les mots de Julie Buxbaum, paru chez PKJ en 2018

Trouver les mots

Après la présentation d’un album pour les plus jeunes sur ce qu’est l’autisme, voici un roman sur le même thème, mais pour un public adolescent. Afin que tout le monde comprenne ce syndrome !

David a tout du bon lycéen en année de Première selon des critères parentaux : il est cultivé, doué en classe, est prédit à un brillant avenir dans une bonne université, pratique des activités extra-scolaires comme les sports de combats ou la guitare. En revanche, David n’a rien du bon lycée selon les critères de ses camarades : une dégaine et un style vestimentaire trop out, il n’a aucun ami, a de trop bonnes notes, mais surtout, il n’a aucune notion des normes sociales qui lui permettraient de s’intégrer dans son lycée, ce qui fait de lui un grand solitaire. Il passe donc tout son temps le casque vissé sur les oreilles, dans sa bulle. Jusqu’au jour où Kit vient s’asseoir à côté de lui à la cantine.

Kit, quant à elle, a tout pour rendre fier ses parents, mais est également en bonne place dans le classement des filles populaires du lycée. Toujours collée à ses amies Violet et Annie, elle poursuit sa vie d’ado ordinaire au lycée : papotage entre filles, flirt avec les garçons, elle envisage même de postuler en tant que rédactrice en chef du journal du lycée. Jusqu’au jour où son père meurt dans un accident de voiture. Pour fuir sa routine trop bruyante, elle décide d’entrer dans la bulle paisible de David.

Ce que l’on comprend dès les premières pages de ce roman, c’est que David est autiste. Un autiste Asperger ou à Haut Potentiel. Un diagnostic que le jeune homme a du mal à avaler. Il ne voit pas bien en quoi il est différent des autres ou en tout cas en quoi sa différence devrait gêner son entourage. Après tout, tout le monde est unique, alors pourquoi c’est lui que l’on met en marge avec une étiquette aussi stigmatisante ? David a appris à s’accommoder de sa vie ainsi, notamment grâce à l’aide de sa sœur, Lauren. Fille la plus populaire du lycée avant de partir à l’université, il était hors de question que l’on touche à un cheveu de son petit frère. Même une fois parti du lycée, c’est resté une convention auprès des élèves qui laissent David plutôt tranquille. Il a également un carnet dans lequel il note beaucoup de choses et d’évènements, qui l’aident à comprendre le monde qui l’entoure et à se souvenir des règles sociales qui lui permettent de survivre au sein du lycée.

En retrait dans sa bulle depuis de longues années, c’est pourtant auprès de lui que Kit va trouver refuge. La jeune fille n’en peut plus de tous les non-dits, de tous les regards pleins de pitié qui se tournent vers elle, la fille qui vient de perdre son père. Elle en a marre qu’on lui dise que ça va passer, qu’on la prenne dans les bras. Elle pense que le silence de David lui fera du bien. Seulement David n’est pas si silencieux que ça. Il a même tendance à dire la vérité à tout bout de champ, une vérité crue, qui peut faire mal. Mais cette vérité, c’est ce qui va faire du bien à Kit. Enfin quelqu’un qui ne la dorlote pas et lui dit les choses telles qu’elles sont.

Trouver les mots est un roman vraiment touchant où absolument tout le monde peut trouver son compte. On y trouve à la fois une vie d’ado classique, les tourments d’une jeune fille de 17 ans après le décès de son père, le thème du harcèlement scolaire et de l’acceptation de la différence, des relations enfants-parents tumultueuses mais aussi justes, un héros et une héroïne très attachants…

Un chapitre sur deux est mené par la voix de David, l’autre par Kit. Ce qui permet à ce roman d’aborder de deux points de vue différents, deux thèmes très divergents l’un de l’autre : le deuil et l’autisme. Ces deux points principaux ont autant de place l’un que l’autre dans le roman, pourtant c’est principalement celui de l’autisme qui a été mon fil conducteur. Surement que certains lecteurs se seront plus accrochés à la façon dont Kit surmonte son deuil et comment David va pouvoir l’aider, mais personnellement je me suis attachée à la façon dont David interagit avec le monde extérieur et comment Kit accepte sa façon de fonctionner et l’intègre dans son propre monde.

Pourtant je n’ai pas commencé ma lecture avec grand enthousiasme. Le résumé de quatrième de couverture ne mentionne pas du tout l’autisme de David, ce n’est donc pas cela qui m’a attirée en premier lieu. En revanche, c’est ce qui m’a fait totalement adhérer au roman. En effet, en ce moment, je ne sais pas pourquoi mais je m’intéresse pas mal à ce syndrome d’Asperger et je me documente par-ci par-là. Il y a peut-être des erreurs dans ce récit, sur le comportement de David et ses réactions, mais je trouve très enthousiasmant que l’on mette en avant l’autisme dans un roman pour ado. Cela permet de faire comprendre au neurotypique ce qu’est ce syndrome, tout comme cela permet à un lecteur autiste de s’identifier.

Ce qui m’a également plu, c’est que l’on sent dès le début le flirt entre les deux ados, mais cela ne finit pas pour autant comme un roman à l’eau de rose avec un happy end tout cousu et sans rebondissement.

Un seul petit hic pour moi : la façon dont David est enfin accepté par ses pairs au lycée (et là, passez votre chemin – ce paragraphe – si vous ne souhaitez pas être spoilé). Malgré tous ses efforts pour se faire accepter, il subit des brimades. L’équipe de foot du lycée le menace même de lui casser la figure. Seulement, David est un expert en self défense, il va donc envoyer au tapis plusieurs adversaires. Le lendemain, il est le héros du lycée. Moralité : pour te faire enfin respecter, casse quelques nez ?? Ou, quand tu es autiste, la seule façon qu’on te fiche la paix est de savoir te battre ?? J’ai un peu tiqué sur ce passage…

Bref, je ne retiens de ce roman que du positif. Une belle façon de faire comprendre aux neurotypiques ce syndrome d’asperger et une belle leçon d’espoir pour ceux qui en sont atteints : une vie normale vous est accessible.

Et si après tout certaines conventions sociales étaient un peu trop surfaites et si les neurotypiques pouvaient s’accommoder de plus de souplesse dans ce domaine, ne serait-ce pas tout aussi bien ?

Pour un peu plus approfondir le sujet de l’autisme à Haut Potentiel, si ça vous intéresse :

  • – Une BD : La différence invisible de Julie Dachez
  • – Une série : Atypical, sur Netflix
  • – Une chaîne youtube : Super Pépette – En prime, elle parle féminisme.

Bonne lecture les loulous !