Le livre du vendredi : Le Renard et la couronne

Le livre du vendredi : Le Renard et la couronne

de Yann Fastier

Ann, 10 ans, perd sa grand-mère au cours de l’été et se retrouve orpheline. Dérobée de ses maigres possessions par ses voisins, elle décide de partir pour la ville, Spalato, et se fait embringuée dans une bande de petits malfrats : sa seule chance de survie.

Je suis en colère contre ce roman.

-.-.–.-.–.-.–.-.–.-.–.-.–.-.–.-.–.-.–.-.–.-.- Attention : spoil ! -.-.–.-.–.-.–.-.–.-.–.-.–.-.–.-.–.-.–.-.–.-.–.-.–.-

Je ne peux malheureusement pas vous expliquer pourquoi j’ai abandonné cette lecture sans spoiler son contenu donc si vous souhaitez encore découvrir ce livre, détournez le regard maintenant !

Ça commençait plutôt très bien :  une belle plume fine, riche et maîtrisée, une héroïne pleine de ressources, de l’action en abondance ! J’étais très heureuse de me plonger dans cette aventure qui commence en Dalmatie (que je ne connaissais pas !) et en 1900 (une de mes époques favorites en fiction !).

Et puis. Comme ça, sorti de nulle part : le viol.

Ce n’est pas une scène très détaillée mais elle reste très explicite et dérangeante car tout à fait gratuite. Elle surgit à la fin du premier tiers : Ann a 20 ou 21 et ne vit plus dans la rue mais dans une maison bourgeoise avec ses parents adoptifs, elle vient de se fiancer. On avait très bien compris que l’homme qu’elle fréquentait était louche et peut-être même malhonnête alors pourquoi cette scène ? Pour nous montrer qu’il veut avoir une emprise sur elle ? Il y avait mille autres façons plus subtiles et bien moins perturbantes de le faire.

Et qu’on ne me réponde pas qu’Ann en sort plus forte, que grâce à cela elle deviendra une femme résistante, courageuse parce que, tout ça, Ann l’était déjà : elle a survécu à la rue, à la faim, au froid, à la violence ! Elle n’avait pas besoin d’en passer par là pour devenir un modèle de force et de ténacité, aucune femme, fictive ou non, n’a besoin d’en passer par là pour le devenir, jamais. Et cette banalisation du viol me choque. Il faut dénoncer le viol, il faut le combattre en éduquant les gens, il ne faut pas le minimiser mais il ne faut surtout pas le banaliser. Ce que la fiction (roman ou TV) a tendance à faire en ce moment et qui me peine beaucoup. Il peut y avoir des hommes méchants qui ne soient pas des violeurs et il peut y avoir des héroïnes puissantes qui n’ont pas été victimes d’agressions. Ce schéma commence à m’énerver.

De plus, la réaction d’Ann n’est pas du tout crédible. Elle met du temps à comprendre vraiment ce qui lui ait arrivé, ce qui est vraisemblable, mais lorsqu’elle s’en rend compte, sa réaction équivaut à un « Oh flûte alors ! » et l’auteur l’entraîne sans attendre dans des péripéties à n’en plus finir pour qu’elle n’ait pas le temps d’y penser, pour que nous, lecteurs, n’ayons pas le temps de digérer, pour minimiser l’acte. Alors pourquoi l’écrire du tout ?

Peut-être que cette scène sert l’intrigue plus tard, peut-être qu’elle permet un retournement de situation génial mais, en fait, je m’en fiche. Après cela, j’ai lu encore deux ou trois chapitres puis j’ai renoncé. Les mots, les rebondissements, tout me paraissait quelconque, d’autre lectures m’attendaient et je n’ai pas pu pardonner à l’auteur d’avoir été si mesquin. Dommage.

Marion

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