Un titre intriguant & tcharbé as hell, beaucoup de cheveux et un empire galactique dans le pâté, Des milliards de tapis de cheveux a été LA grosse surprise SF de la fin mai dont il faut absolument que je vous en parle.
(D'autant plus que Mimine sans vous le cacher est hyper contente de pouvoir vous parler d'une lecture qu'elle a vraiment aimée. Ça se faisait sentir le manque d'enthousiasme par ici depuis quelques temps)
Comment vous raconter le machin... Parce que je peux vous dire que là on ne tape pas dans le truc easy à résumer comme on le ferait avec l'emballage d'un camembert bio. C'est que c'est un poil corsé cette affaire et que Mimine, elle est pas du genre à vous la ramener avec des spoilers dans la poire (en chocolat) (ça y est, elle délire, elle craque, on l'a perdue).
Bref.
Essayons.
Y a un empereur qui fait peur et un empire énorme. Giga-gigantesque. Et des planètes, plein de planètes partout. Dont une qui a pour mission divine, à la gloire de l'Empereur (égal d'un dieu), de faire des tapis de cheveux pour tapisser les murs du palais impérial. Seulement voilà, ça fait 20 ans qu'il y a des rumeurs comme quoi le Big Boss est cané, mais impossible d'y croire pour cette population qui vit dans la crainte de ce dieu, soit-disant immortel, et dont un seul mot plus haut que l'autre à l'encontre du chef est passible de prison. Alors quoi ? Qu'est-ce qui se passe ? Qu'est-ce qu'on en fait de ces tapis qu'un tisseur met toute une vie à faire et sur quoi toute l'économie de la planète repose ?
C'est tout le mystère ma bonne Janine.
J'vous l'dis, j'suis partie les yeux bandés dans ce roman (pratique me direz-vous quand le concept du truc c'est de lire, m'enfin). J'connaissais rien de cette histoire rocambolesque au titre assez improbable et j'ai eu au départ, oui Mimine reconnait ses faiblesses humaines, des doutes quant à ma capacité d'aimer le bidule.
Ô femme de peu de foi...
Parce qu'au début, on pâne pas grand chose, faut l'avouer. Ça commence avec un vieux monsieur bougon qui tisse son tapis, il se dispute avec son fils très récalcitrant envers cette religion de la carpette qui refuse tout bonnement de rejoindre les rangs. Puis là sans prévenir, v'là que le vieux trucide son gamin (normal) et se remet à son métier à tisser.
Fin du chapitre 1.
Une promesse de fanatisme alliée à " on ne ménage pas son lecteur ici non ma p'tite dame ", j'ai fait :
" c'est parti Kiki envoie la salade ".
Et j'ai pas été déçue.
Construit sur une structure de roman choral où chaque chapitre est le prétexte pour se focaliser sur des personnages différents, Des milliards de tapis de cheveux est une immense fable autour de cet empire mystérieux et inaccessible qui a entre ses mains de fer le destin de milliards d'êtres humains (et de tapis du coup).
Chaque détail, chaque histoire met sa petite pierre à l'édifice dans un worldbuilding du tonnerre. Nan sérieux mes pioupious, ça faisait un paquet d'années que je ne m'étais pas retrouvée devant une construction d'univers aussi génialement orchestrée en si peu de pages (312, je répète 312 PAGES).
Résultat, c'est foisonnant, passionnant, intriguant, on est toujours à se demander " mais pourquoi ces foutus tapis " (fil rouge qui ne sera dévoilé qu'à la toute fin), on voyage, on va à la rencontre des autochtones primitifs comme à celle d'administrateurs haut placés ; ça se dévoile devant nos yeux comme à travers une petite lucarne où l'on apercevrait la vie de ses hommes et femmes par petit bout.
Tragique, poétique, cruel, tendre, lucide, politique, réaliste... C'est tout ça, Des milliards de tapis de cheveux, un ensemble à la fois complexe, concis et parfaitement accessible, dépeignant avec virtuosité les affres de l'âme humaine comme un milliard de contes au coin de la cheminée. Le tout avec des rebondissements et des petits twists qu'on avait pas tellement vu venir, hein, soyons honnêtes (<= c'est donc très cool).
Si je sais que je ne me souviendrai pas de tout, je garderais bien par contre au chaud dans une partie de mon cerveau deux-trois histoires particulièrement frappantes. On en parle de la terrible poésie du roi maudit cloué à son trône pour l'éternité dans son palais de sable ? Ou du chapitre qui pourrait passer crème pour un épisode de Black Mirror ? (<= j'en ai encore des frissons).
Bref. Vous cherchez quelque chose de spécial, qui vous ébouriffe d'originalité ? Ce roman teuton devrait vous trifouiller de l'intérieur.