Dix, de Marine Carteron, paru en mars 2019 aux éditions du Rouergue
Cela faisait un moment que le livre que je vais vous présenter aujourd’hui me faisait de l’œil. Je ne connaissais absolument pas Marine Carteron, qui est pourtant renommée en littérature de jeunesse grâce à Génération K et Les autodafeurs, ce qui m’a donc attiré c’est la couverture et surtout le résumé. A la fin de celui-ci est précisé que le roman est un « clin d’œil sanglant à la reine du roman policier : Agatha Christie ». Une petite recherche internet plus tard, je découvre que c’est carrément une adaptation libre des Dix petits nègres. Ouh, ça me met en joie !!! Ça fait des années que je n’ai pas lu un Agatha Christie, alors que j’en étais fan dans mon adolescence, c’est donc l’occasion de m’y remettre. Ni une ni deux, je décide de relire les Dix petits nègres, avant d’entamer Dix.
J’avais au début un peu peur de lire les deux à la suite, que ce ne soit qu’un copié-collé, que je devine rapidement qui est le tueur dans l’adaptation de Marine Carteron, et de regretter ma lecture. Mais pas du tout ! Cette adaptation libre pour la jeunesse, greffée dans notre monde actuel est superbe ! Pour bien commencer, en voici le résumé :
Ils sont dix. Sept adolescents et trois adultes, sélectionnés pour participer à un escape game littéraire et passer à la télévision en prime time. Direction : un manoir sur une île coupée du reste du monde. Un endroit si isolé que personne ne vous entendra crier, gémir ou appeler à l’aide. Et quand la mort décide de frapper les candidats un par un, une seule question : qui est le coupable ? un seul but : survivre !
Attention, je pars du principe que l’intrigue des Dix petits nègres est connue pour pouvoir vous parler de Dix, donc de mini-spoils sont possibles lors de votre lecture de cet article.
Comme vous le comprenez, le lieu et la situation sont donc ici bien ancrés dans notre monde réel, avec ces notions de télé-réalité et d’escape game. Un roman plus que dans l’air du temps qui ne peut qu’attirer les jeunes lecteurs. Cependant, les fondamentaux des Dix petits nègres restent bien présents : une île perdue, inaccessible autrement que par bateau, sans moyen de communication, où sont rassemblées dix personnes. Je peux même vous en dire un peu plus que le résumé pour vous montrer à quel point cela colle au roman d’origine : les statuettes de nègres dans le roman d’Agatha Christie trouvent dans Dix leurs homonymes (je ne vous dis pas quoi, il faut quand même laisser du suspens), les 10 personnes enfermées sur l’île sont bien coupables d’un crime, le tueur est bien parmi eux (je peux vous le dire sans spoil, si vous connaissez l’intrigue originale), et ils finissent tous par se soupçonner les uns et les autres.
Avec tout ça, on se demande où est l’originalité de cette adaptation et si on ne pas vite s’ennuyer. Je vous rassure, on ne s’ennuie pas du tout. Le fait qu’il y ait 7 ados et 3 adultes change beaucoup de choses. Déjà les professions et caractères des personnages ne sont évidemment pas les mêmes. Leurs relations entre eux non plus du coup. D’autant qu’ils ont tous été recrutés dans la même école, ils se connaissent donc déjà au moins de vue. Le regard qu’ils portent les uns sur les autres et les alliances qu’ils forment donnent un œil neuf au roman. Et attention, même si ce roman est pour ado, les morts de chacun d’eux sont bien sanglantes, atroces, voire dégoutantes, et bien différentes du récit d’origine. La raison pour laquelle ils meurent tous change également du tout au tout, ce qui vivifie le récit.
Pour vous tenir encore plus en haleine, je peux même vous dire que la raison des meurtres de chacun est liée à un fait de société actuel morbide et dangereux.
Marine Carteron a donc réussi avec brio à remanier le fond de départ des Dix petits nègres pour en offrir une nouvelle forme dans Dix, qui en fera trembler plus d’un, notamment avec les rapprochements possibles avec notre propre quotidien. Sans en avoir l’air, ce roman policier dénonce une réalité sombre (voire plusieurs) dont chacun devrait se sentir responsable.
Même s’ils ne sont pas du même genre, cela m’a donné une irrésistible envie de lire les deux sagas de la même autrice, et cela tombe bien car elles sont dans le fonds de mon CDI !
Joyeuse lecture policière les loulous !