Pour te dire à quel point je suis à fond de train dans l'univers de Jean-Paul Dubois, j'ai lu avidement, après le Si ce livre pouvais me rapprocher de toi et Nouvel Observateur, réunies dans deux recueils, soit L'Amérique m'inquiète et Jusque-là, tout allait bien en Amérique. Tous les hommes n'habitent pas le monde de la même façon, ses chroniques parues dans Publiées dans les années 1990, ces chroniques n'ont malheureusement pas pris une seule ride. C'est l'Amérique de Donald Trump - avant Donald Trump - que décrit Jean-Paul Dubois.
Avant d 'entrer dans le vif de son sujet...
[...] Je n'aime guère parler et pas davantage poser des questions. Je préfère me faire oublier, me fondre dans le décor, regarder la forme des choses et le contour des gens, les observer, les écouter tandis qu'ils racontent le bruit de leur vie. Ensuite, il ne reste plus qu'à mettre tout ça en ordre en essayant de rendre l'éclairage des visages et le son de chaque voix. J'aime bien voyager en Amérique. Traîner dans des endroits où il ne se passe rien en attendant qu'il arrive quelque chose, que les destins se tordent. [...] L'Amérique est sans doute le seul zoo de la planète laissant errer et divaguer en liberté autant de variétés exotiques de l'espèce humaine.
Jean-Paul Dubois m'a fait voyager de Key West à Los Angeles, en passant par Cape Cod et Détroit. Il a pris le pouls de l'Amérique dans ses excès les plus délirants. Il a humé l'air du temps, observé, tantôt étonné, tantôt désespéré. Il y est question d'euthanasie, de cryogénie, de peine de mort, de rachat d'assurances-vie des malades en phase terminale, de soldats de l'ombre et de fous de Dieu, de racisme et d'homophobie, de gladiateurs et d'armes à feu, de testicules et d'érection. Rien que ça! J'y ai croisé Marlon Brando, O. J. Simpson, John Wayne et Lorena Bobbit.
Si j'aime tant l'Amérique, c'est pour ses contrastes, sa folie, ses bizarreries et sa démesure. Jean-Paul Dubois me l'a servie sur un plateau d'argent.
Ces petits récits se dégustent comme autant d'amuse-gueules. Je voulais picorer, prendre une petite bouchée à la fois. Impossible! Je n'avais qu'une seule envie: plonger dans le prochain récit. À la fois savoureux et désespérant.
L'Amérique m'inquiète et autres récits, Jean-Paul Dubois, De l'Olivier, 264 pages, 2002.