Hubert Mingarelli, né en 1956 à Mont-Saint-Martin en Lorraine, est un écrivain français. A 17 ans il arrête l'école pour s'engager dans la marine qu'il quitte trois ans plus tard. Entre-temps il a pu voir la Méditerranée et le Pacifique. S'ensuivent des voyages à travers l'Europe. Il finit par s'installer à Grenoble où il exerce de nombreux métiers. Il commence à publier à la fin des années 1980 et obtient le Prix Médicis en 2003 pour son roman Quatre Soldats. Il vit aujourd'hui dans un hameau de montagne des Alpes françaises. L’Homme qui avait soif est paru en 2014.
Au Japon en 1946, pendant l’occupation américaine. Hisao, soldat démobilisé depuis peu, revient de la guerre par le train, espérant retrouver Shigeko, sa bien-aimée, avec dans sa valise un cadeau de mariage, un œuf de jade. Descendu de son wagon pour boire, il rate le départ du train, s’ensuit alors une poursuite derrière sa valise égarée, contenant le peu qu’il possède et ce fameux cadeau…
Hisao revient de la guerre, il était à la bataille de Peleliu et c’est tout ce que nous en dit Hubert Mingarelli. Peu calé en histoire, j’ai voulu en savoir plus – même si cela n’a guère d’importance pour comprendre le roman – et voici ce que m’a appris Wikipédia : « La bataille de Peleliu s'est déroulée durant la Seconde Guerre mondiale entre les Etats-Unis et le Japon dans le Pacifique entre septembre et novembre 1944 sur l'île de Peleliu dans l'archipel des Palaos. Proportionnellement au nombre d'hommes impliqués, Peleliu a été après Iwo Jima la seconde bataille la plus meurtrière de la guerre du Pacifique pour les Américains, un tiers de ceux y étant engagés ayant été soit tués soit blessés. » Je referme la parenthèse.
Hisao a été traumatisé par cette bataille, lui et ses collègues devaient creuser des tunnels sous une montagne, laquelle s’est effondrée sur eux. Son ami Takeshi y est mort. Son souvenir le hante et une soif inextinguible ne le quitte jamais, séquelle de ses travaux de terrassier souterrain ( ?), « quand j’ai soif, je perds la tête » confie-t-il ; et c’est vrai que le pauvre jeune homme nous semble passablement dérangé, balançant entre ses terreurs nocturnes (« Dans mon rêve, il y a cette eau qui me manque. Il y a la montagne qui tremble, la poussière qui m’étouffe ») et l’espoir de retrouver son aimée – qu’il n’a jamais vue, ceci dit, ne la connaissant que par des échanges épistolaires. Hisao suit la ligne de chemin de fer, demandant dans chaque gare si sa valise a été trouvée. Il ira ainsi jusqu’au terminus, but ultime de son voyage, sa route croisant celle de quelques personnages marginaux.
Le lecteur accompagne Hisao dans ce qui s’apparente à un voyage en apesanteur, porté par l’écriture de Mingarelli, telle qu’on la connait, économe, proche de l’épure, avec ce roman très japonais dans tous les sens du terme. Et si le roman refermé le lecteur constate qu’il a lu un bouquin s’inscrivant, disons dans le genre : « voilà, de ces chose délicates, qui apparaissaient et disparaissaient, sans début ni fin. Qui ne tenait sur rien. Qui s’en allaient vite » force est d’admettre que c’est très beau, d’une beauté gratuite et poétique.