Entretien entre lectrices – Les mots d’Hélio

Les Mots d’Hélio a été publié aux éditions Magnard en juin 2019.

Entretien entre lectrices – Les mots d’HélioPrésentation de l’éditeur :
Suite à un traumatisme crânien, Hélio, quinze ans, orphelin de père et passionné de sciences, ne réussit presque plus à communiquer. Sa capacité de réflexion est intacte, mais les mots se sont envolés. Sa mère étant elle-même en état de choc depuis l’accident, Hélio est confié à une famille d’accueil, les Dainville, qu’elle avait désignée dans le cas où son fils se retrouverait seul. Mila et Ruben, les enfants de la famille, l’accueillent chacun à leur manière, et pour Bianca, l’employée de maison, l’arrivée de ce garçon fait ressurgir de lointains souvenirs. Quel secret cache-t-elle à tous depuis des années ? Chaque personnage, à tour de rôle, confie ses doutes et ses espoirs, se livre peu à peu. Et quand le passé fait irruption et libère les vérités enfouies, c’est une nouvelle famille qui se révèle…

Au moment de la parution de ce roman, Blandine, Cécile et moi l’avons lu toutes les trois,
en avons fait une chronique, avons interviewé Nancy Guilbert et Yaël Hassan.

Entretien entre lectrices – Les mots d’Hélio Entretien entre lectrices – Les mots d’Hélio

Aujourd’hui, voici un entretien entre lectrices de cette lecture !

Par Pauline d’Entre Les Pages
Par Cécile de La Maison des Livres
Par Blandine de Vivrelivre

Saviez-vous de quoi parlait Les mots d’Hélio avant de le commencer ?
Réponse Cécile : Non, je n’avais aucune idée du sujet de ce roman avant de la commencer. Après lecture, je trouve le titre très bien choisi !

Réponse Blandine : Non, je savais uniquement que c’était un roman choral (procédé que j’aime particulièrement).

Réponse Pauline : Oui, Nancy m’avait parlé du sujet du livre. Mais je ne suis pas allée chercher plus d’informations. J’ai préféré me garder quelques surprises.

À quoi vous attendiez-vous avec ce roman ? Est-ce que vos attentes ont été comblées ?
Réponse Cécile : Quand j’ai compris qu’Hélio souffrait d’un handicap causé par un traumatisme, je me suis attendue à ce que sa situation s’améliore tout au long du roman. J’ai été plus que comblée, puisque peu à peu les choses se débloquent, mais pas seulement pour Hélio, et c’est ça que je trouve fort de la part de Nancy et Yaël.

Réponse Blandine : Je n’avais pas d’attentes particulières. Le seul nom des deux autrices me promettait un très bon moment de lecture. Et ce fut le cas ! Seule la couverture me questionne un peu. Je dirais juste qu’en tant qu’adulte, il y a des situations, choses, que l’on voit, comprend très vite.

Réponse Pauline : Je m’attendais à un roman à la fois sombre et lumineux, triste et joyeux, plein d’émotion, de courage et de beaux personnages. Mes attentes ont été comblées à ce niveau et j’ai même reçu beaucoup plus de la part de ce roman. Je ne m’attendais pas aux citations qui sont nombreuses, aux dessins, aux petits mots de Ruben. Des surprises du début à la fin !

Entretien entre lectrices – Les mots d’Hélio

À chaque chapitre une voix différente, avez-vous trouvé que l’on reconnaissait bien chaque personnage à travers son langage ? Est-ce qu’il y en a un qui vous a touché, amusé plus particulièrement ?
Réponse Cécile : J’ai trouvé en effet que chaque personnage était bien reconnaissable à travers son vocabulaire, ses attitudes. Celui qui m’a le plus touchée, mis à part Hélio bien sûr, c’est le petit Ruben, qui avec sa fraîcheur, sa simplicité, son inhibition, va être finalement un élément moteur dans les relations entre les personnages.

Réponse Blandine : J’adore les romans choraux, grâce auxquels des évènements/personnages sont appréhendés de multiples façons. J’ai aussi beaucoup aimé que la parole soit donnée à des personnages secondaires (tels Mangialy, Anissa, Sophie), leur point de vue est d’autant plus fort je trouve. Chaque personnage a son ton de voix, sa manière de s’exprimer et ses attitudes, ce qui les rend aisément reconnaissables et réalistes. J’ai particulièrement aimé le personnage de Bianca, chez qui on devine une souffrance qui ne demande qu’à sortir, et qui est à la fois effacée (discrète de nature et dans son rôle) et pas entendue/questionnée. Je me suis aussi imaginée à la place de Marion, la maman de Mila et Ruben, si un tel évènement devait se passer. Comment réagirais-je à la venue d’un enfant dont je ne connais rien alors que mon mari semble en savoir sur lui ?

Réponse Pauline : Tout à fait, chaque personnage a son identité, sa façon de parler, une atmosphère qui l’entoure. Ruben est évidemment terriblement craquant. J’ai toujours un faible pour les personnages principaux, Hélio m’a donc beaucoup touchée. Bianca est aussi un très bon personnage.

Avez-vous tout de suite deviné quels personnages avaient été écrits par quelle auteure ? (j’ai pour ma part eu quelques difficultés à tous les reconnaître)
Réponse Blandine : Non.  Si certains ont été une évidence, je me suis trompée sur d’autres. Même si je connais bien (je crois !) l’écriture de Nancy, celle de Yaël m’est moins familière. En définitive, même s’il est normal de chercher à savoir qui a écrit quoi, je ne sais pas si cela importe vraiment. Par contre, la genèse de chaque personnage est intéressante à découvrir.

Réponse Pauline : Pas du tout. Je me suis posé la question avant, pendant, après la lecture, mais l’histoire prenait le pas sur mes interrogations et j’ai arrêté de chercher ! Je pense finalement que ne pas réussir à reconnaître tel ou tel auteur dans le procédé prouve que le roman est bon, que la collaboration a fonctionné.

Réponse Cécile : J’ai eu du mal à deviner, et je me suis trompée sur certains personnages. Il y a une vraie fluidité dans la lecture, Nancy et Yaël ont réussi leur exercice d’écriture à quatre mains !

Que retiendrez-vous de cette lecture ? A quoi avez-vous été le plus sensibles dans cette histoire ?
Réponse Blandine : J’aime les romans qui ont pour thèmes la famille et ses secrets. Et si toutes en ont, il est toujours incroyable de les découvrir et d’en voir les proportions, à la fois dans leur « banalité » comme dans leur particularité et leurs conséquences intimes. Je ne connaissais pas l’aphasie de Broca, ce roman m’a donc permis de la découvrir ainsi que ses conséquences physiques. Et bien sûr, l’histoire de Bianca, qui a résonné très fortement avec deux autres lectures que j’ai eues à peu près au même moment. (Vies volées de Matz et Mayalen Goust (BD) et Les gens dans l’enveloppe d’Isabelle Monnin) Ces résonances sont très fortes. Son histoire est terrible et cet évènement mérite d’être davantage connu.

Réponse Pauline : Je retiendrai qu’il ne faut jamais se laisser abattre et qu’il faut être là pour ses proches. Qu’ils soient du même sang ou non. Également qu’il ne faut pas oublier que chaque personne a une histoire et que c’est parfois bien de s’y intéresser. J’ai été très sensible à la relation entre Bianca et les enfants.

Réponse Cécile : je retiendrai de cette lecture que la persévérance, la bienveillance et l’entraide finissent toujours par payer. Comme Blandine, je n’avais jamais entendu parler de l’aphasie de Broca. Ce qui m’a le plus touchée dans cette histoire, c’est l’évolution des personnages, la transformation des relations les uns par rapport aux autres, l’ouverture dont chacun est finalement capable. J’ai été sensible au petit Ruben et à l’histoire de Bianca.

Qu’avez-vous pensé du contenu des carnets d’Hélio ?
Réponse Blandine : J’ai aimé la forme comme le fond (même si la couverture me questionne encore). J’ai aimé la passion d’Hélio pour les fleurs et plantes et l’analogie qu’il en fait pour les humains. J’ai aimé les dessins ou mots « manuscrits » disséminés ça et là. Pour un lectorat de cet âge, cela aide à se représenter les plantes dont Hélio parle, allège la mise en page et crée des respirations dans le texte. J’ai aimé les citations choisies par Nancy à chaque « prise de parole » d’Hélio. J’ai aimé les thèmes abordés, qui peuvent ou nous touchent tous et la manière dont ils sont traités par les autrices. C’est un roman réaliste, positif et plein d’espoir.

Réponse Pauline : Génial ! Je ne m’attendais vraiment pas à un élément comme cela dans l’histoire et j’ai trouvé cela super. J’adore les carnets, les journaux intimes, tout ce qui permet de laisser des traces de notre existence, de nos expériences, de nos passions. C’est la façon qu’Hélio a de percevoir le monde, les gens, c’était vraiment fascinant.

Réponse Cécile : J’ai été surprise et j’ai adoré les dessins, ainsi que les correspondances faites entre chaque être humain rencontré et une plante. Quelle belle idée ! J’étais à chaque fois impatiente de retrouver le « point de vue d’Hélio ». J’ai été également très sensible aux citations de début de chapitre, toujours tellement bien trouvées.

Entretien entre lectrices – Les mots d’Hélio

Quel personnage vous a le plus marquées dans cette histoire ?
Réponse Blandine : Hélio bien sûr, mais aussi Mila dans ses attitudes et réflexions. Et Bianca, pour son historie personnelle.

Réponse Pauline : Au final, je dirais Hélio. Pour tout ce que j’ai dit juste au-dessus.

Réponse Cécile : difficile de répondre, tant ils sont finalement tous intimement liés. Hélio bien sûr, mais aussi Mila, qui connaît une belle évolution. Le petit Ruben ne m’a pas non plus laissée insensible.

Avant lecture, que vous ont inspiré le titre et la couverture ?
Réponse Pauline : Le titre m’a fait penser aux mot “maux”. Les couleurs m’ont fait penser à un livre au sujet plus drôle.

Réponse Cécile : Je dirais comme Pauline. J’ai été surprise par la couverture, et les « mots » m’ont tout de suite fait penser aux « maux ». Je trouve le titre bien trouvé.

Après lecture, votre impression était-elle toujours la même ? Si non, quel nouveau regard aviez-vous ?
Réponse Blandine : J’ai immédiatement pensé à l’homophone « mots/maux »,à une histoire de maladie, de secrets, mais aussi de colère. C’est en tout cas à cette dernière émotion que j’ai attribué les traits colorés de la couverture. Après lecture, je reste sur ce sentiments même si je trouve que  la couverture, à mon sens joyeuse et pleine de pep’s, pourrait induire en erreur.

Réponse Pauline : Je trouve finalement que ces éclats de couleur représente bien les morceaux de soleil qu’il y a dans cette histoire. La couverture fait qu’on ne sait pas de quoi le livre parle et ce n’est pas plus mal. Bien sûr, il y a le résumé. Mais la première approche est tout à fait innocente et cela me plaît. 

Réponse Cécile : après lecture, je pense que les nombreuses couleurs de la couverture, qui éclatent en tous sens, peuvent représenter ce qu’il se passe dans la tête d’Hélio dans certaines situations. La colère pour commencer, puis finalement la joie et la chaleur.

Une ou deux citations ?
Réponse Blandine : « J’ai eu une patiente un jour qui s’appelait Mila et qui m’a dit qu’en hébreu cela signifie « mot », ce qui m’avait beaucoup émue, car si elle venait chez moi, c’était pour renouer avec les mots, justement ! »

« Il avait treize ans. On se comprenait si bien, lui et moi ! Sa passion, c’était la plongée. Il était parfois si téméraire que je pensais qu’il disparaîtrait dans l’océan, à force de descendre aussi profondément. Il n’avait peur de rien. Mais ce n’est pas la plage de Puerto Madryn qui a pris mon pequeño, ce sont los ostros… »

Réponse Pauline : 

« J’avais décidé de devenir botaniste parce que les plantes et les arbres, c’est comme les gens et que j’adore observer les deux catégories pour faire des parallèles. »

En début de chapitre : « La plupart des hommes ont, comme les plantes, des propriétés cachées, que le hasard fait découvrir. » (François de la Rochefoucauld)

Réponse Cécile :

« J’ai une théorie, moi. Je pense que l’univers est composé pour moitié de gens pourris qui passent leur temps à casser les pieds à l’autre moitié du monde, qui ne demande qu’à vivre tranquillement. Les plantes, c’est presque la même chose, sauf qu’elles sont meilleures que les humains. Ma mère me dit que c’est un peu vieux jeu, comme vision des choses, mais j’assume. »

« Quand on rencontre quelqu’un, c’est signe qu’on devait croiser son chemin, c’est signe que l’on va recevoir de lui quelque chose qui nous manquait. Il ne faut pas ignorer ces rencontres. Dans chacune d’elles est contenue la promesse d’une découverte. » Aharon Appelfeld, Adam et Thomas.

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Blandine, Cécile et moi espérons que vous aurez apprécié cet entretien entre blogueuses !

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