Editeur : Pocket Jeunesse (PKJ)Nombre de pages : 380Résumé : Becca a toujours vécu dans sa bulle, entre ses livres et ses royaumes imaginaires. Sans son amie Charlotte, elle est plus solitaire que jamais. Jusqu’au jour où, en plein cours, elle trébuche sur Max… Il la remarque et comprend son désarroi. Il l’incite alors à faire du théâtre. À la surprise générale, Becca décroche le rôle principal. Mais n’est-ce pas trop tôt, pour jouer Juliette sous les yeux de celui qui a tout d’un Roméo ?
A savoir : ce roman fait suite à Charlie+Charlotte, cette chronique contient donc des spoilers du premier opus !
- Un petit extrait -
« – Est-ce que ça devient plus facile … ?– Oui.– Attends, je n’ai pas fini.– Pas besoin. Oui, ça devient plus facile, jouer un rôle devient comme une seconde nature. Voire ta première nature.Elle gratte son vernis.– Tu es moins déçue.– Mais tu ne te perds jamais ?Darby tourne la tête pour bien me regarder dans les yeux.– Si. »
- Mon avis sur le livre -
Ne vous êtes-vous jamais demandé ce qu’il arrivait aux personnages de romans une fois la dernière page tournée ? N’avez-vous jamais voulu savoir ce qu’ils deviennent une fois la lecture achevée ? Personnellement, c’est une question que je me pose très régulièrement, après avoir rangé le livre sur son étagère : à quoi ressemble l’Après ? Quand j’ai quitté Charlie et Becca, à la fin de Charlie+Charlotte, je me suis demandé comment ils allaient parvenir à surmonter cette terrible épreuve, comment Charlie allait faire le deuil de son premier amour, et Becca de sa première amitié. S’en remettront-ils un jour ? Cela me brisait le cœur de les quitter dans un tel désarroi, mais je n’avais pas le choix : l’histoire s’arrêtait là, l’autrice toute-puissante avait choisi de cesser là son récit. Charlie et Becca semblaient condamnés à vivre éternellement avec cette douleur … jusqu’au jour où sortit Max+Becca. Je n’osais pas en croire mes yeux : était-ce bien ce que je pensais, ce que j’espérais ? L’autrice avait-elle réellement écrit cet Après qui me tourmentait tant ? La réponse est oui. Et je ne l’en remercierai jamais assez …
Charlotte est morte. Charlotte est morte et une partie de Becca est morte en même temps. Incapable de faire face à ce vide immense qui enfle en elle, la jeune fille se réfugie plus que jamais dans les livres, plus solitaire qu’elle ne l’a jamais été tandis que le souvenir de la seule et meilleure amie la hante nuit et jour … Jusqu’au jour où Max, le seul à ne pas la fuir comme si être « l’amie de la fille morte » était une maladie contagieuse, se fraye un chemin à travers le brouillard de tristesse qui l’entoure. Sans qu’elle ne comprenne bien comment, il la convainc de faire partie de l’équipe technique du groupe de théâtre du lycée … Mais voilà que Becca se retrouve propulsée sur le devant de la scène, elle qui n’avait jamais fait de théâtre auparavant … Mais est-ce bien raisonnable, de devenir Juliette, quand on n’est pas sûre d’avoir le courage de s’éprendre d’un Roméo ?
Si le premier opus nous invitait à suivre le très cartésien Charlie, pour qui l’amour était une réalité bien trop abstraite, ce second tome nous invite à faire plus profondément connaissance de sa petite sœur, la très sensible Becca. Becca la solitaire qui vient de perdre celle qui fut sa première et dernière amie, et qui n’a pour seul refuge et réconfort que les livres qu’elle dévore avidement, compulsivement. « Dans les livres, quand un personnage meurt, c’est triste, mais je m’en remets parce que je n’ai qu’à revenir quelques pages en arrière et ils sont à nouveau en vie. Le monde est moins dangereux dans les romans. » Vous n’imaginez même pas à quel point je me suis sentie proche de Becca, à quel point j’ai eu l’impression de me regarder dans un miroir. Bien sûr, je n’ai pas perdue d’amie à cause d’un cancer – encore faudrait-il avoir eu une amie à perdre. Mais Becca et moi avons des milliards de points communs, et je n’ai eu aucune difficulté à la comprendre. Parce que je suis comme elle. Comme elle, je préfère m’enfermer dans mes mondes imaginaires que d’affronter le monde et ses dangers. Parce que « les gens, les vrais, c'est compliqué, bien plus que dans les histoires. Il est impossible de les connaître entièrement. ».
Mais voilà que Max surgit sur sa route, aussi soudainement que l’avait fait Charlotte avant lui. Sans qu’elle ne dise rien, il comprend son désarroi, il comprend ses peurs, il comprend sa douleur. Et sans qu’elle ne lui ait rien demandé, voire même bien malgré elle, il va lui offrir son soutien inconditionné, son amitié et peut-être même plus encore, si seulement elle accepte de prendre le risque de s’attacher à lui. Car voilà bien tout le problème de Becca : elle est terrorisée à l’idée de perdre quelqu’un à nouveau, alors elle s’interdit de s’attacher à qui que ce soit. De plus, elle a le sentiment de trahir Charlotte en laissant Max entrer dans son cœur, dans sa vie … Cette histoire, ce n’est pas seulement – voire pas réellement – une histoire d’amour, c’est bien plus l’histoire d’une reconstruction : Becca réapprend à marcher sans Charlotte à ses côtés, elle réapprend à respirer sans Charlotte à ses côtés … elle réapprend à vivre sans Charlotte à ses côtés. Elle découvre qu’avancer, ce n’est pas oublier. Qu’elle a le droit d’aller de l’avant, qu’elle a le droit de tenter de nouvelles expériences, qu’elle a le droit à l’échec, aussi …
Et voilà le deuxième élément qui accentue encore la ressemblance entre Becca et moi : le théâtre. Au départ, Becca est plus que réticente à l’idée de s’engager dans cette activité : elle qui est la timidité et la discrétion incarnées, comment voulez-vous qu’elle monte sur scène ? Elle qui a pour seule ambition de se faire plus petite encore qu’une sourire pour ne pas qu’on la remarque, comment voulez-vous qu’elle se montre en spectacle ? Mais Becca va progressivement découvrir LE secret : quand on est sur scène, ce n’est pas nous que les spectateurs voient. Mais uniquement le personnage qu’on veut bien leur montrer. Le comédien est parfaitement, rigoureusement, absolument invisible : il porte un masque qui le protège du regard des autres. Tout cela, Becca va le comprendre grâce à Darby, la « petite peste du club théâtre », qui s’avère en réalité bien plus profonde, sensible et gentille qu’on ne peut le penser. Car Darby est en représentation permanente : elle joue continuellement le rôle de la Reine, arrogante et sûre d’elle, pour mieux se protéger. Pour elle « le monde est un théâtre » … Mais Becca va rapidement comprendre à quel point c’est épuisant de ne jamais être soi-même, quand bien même cela nous permet d’être préservés du regard d’autrui. J’aimerai avoir le même courage de Becca et mettre fin à la pièce dans laquelle je me suis enfermée … mais il semblerait que Becca soit bien plus forte que moi.
En bref, vous l’aurez bien compris, avec ce second opus, Shannon Lee Alexander fait aussi bien qu’avec le premier, et peut-être même encore mieux ! Une fois encore, elle nous conte une histoire aussi belle que terrible, une histoire pleine de douceur et de douleur entremêlée. On rit, on pleure, parfois même les deux à la fois. Quelle joie de retrouver Charlie (même s’il n’est plus aussi présent que dans le premier opus) et Becca ! Quelle joie également de les voir, petit à petit, avancer vers la guérison ! Max+Becca, c’est un livre qui fait mal aux zygomatiques mais qui fait du bien au cœur et à l’âme. Alors si vous aussi vous avez eu le cœur brisé par la terrible histoire de Charlie+Charlotte, si vous aussi vous avez envie de faire encore un bout de chemin en compagnie de Becca et de son frère, n’hésitez vraiment pas à vous plonger dans ce nouvel opus incroyablement émouvant ! Et si vous n’avez pas encore lu le premier tome … et bien je vous invite à le faire très vite pour pouvoir ensuite lire ce dernier (pour vous réconforter après le précédent) !