Par les routes de Sylvain Prudhomme

Par les routes de Sylvain PrudhommePar les routes

Sylvain Prudhomme

Gallimard

22 août 2019

304 pages

" Le monde se divise en deux parties : ceux qui partent et ceux qui restent. "

J'ai eu un mal infini à entrer dans ce roman. Incapable de lire plus de quelques pages à la fois, je n'accrochais pas. J'avais lu quelques critiques dithyrambiques louant l'écriture, la qualité du texte. Et je ne rencontrais ni les mots, ni le style que j'attendais. Mais où avais-je placé la barre ?

Ca y est, me suis-je dit, je passe encore une fois à côté d'un roman encensé par la majorité des lecteurs. Mais qu'ai-je donc ? La succession des phrases narrant le quotidien des personnages ne me faisait pas vibrer.

Et puis peu à peu la petite musique douce m'a enveloppée, j'ai commencé à y prendre goût, à savourer les situations, comme un mets qui se révèle après la mise en bouche. Un petit goût de reviens-y. J'ai largement préféré la deuxième moitié du roman lorsque autostoppeur a commencé à prendre ses distances, lorsqu'il a quitté les autoroutes pour entrer dans le vif du pays, lorsque le romanesque a fait irruption dans la monotonie des jours sans fin. Les cinq derniers chapitres m'ont ravie. Leur justesse, l'émotion qu'ils suscitent, ont presque réussi à me faire oublier le début chaotique, jusqu'à ce dernier tableau symbolique et jouissif.

Je n'ai pas eu un coup de cœur pour ce livre, mais je lui ai trouvé un certain charme, une certaine sensibilité. Cet autostoppeur a réveillé en moi une envie de voyages, de rencontres fortuites, de chaleur humaine, d'hospitalité.

Qu'est-ce que la liberté ?

Ce roman nous invite à réfléchir sur notre vie, sur l'orientation qu'on souhaite lui donner. Et il nous permet de voyager à travers la France, confortablement installé dans notre fauteuil devant un poêle tout chaud. Certains ont besoin de découvrir de nouveaux horizons et de nouvelles personnes, d'autres se rassurent dans le confort d'une vie emmitouflée dans un quotidien ordinaire. Il n'est pas de bonne ou mauvaise orientation, il faut juste choisir la vie qui nous convient.

Et puis, et puis, Camarade ! Tout un symbole ! Ce village, je le connais, j'y suis allée, je suis passée par le Mas d'Azil, j'ai emprunté ces petites routes sinueuses de l'Ariège. Cette jolie fin clôt en apothéose un texte qui ne démarrait pas sous les meilleurs auspices.

Cependant, sans provocation aucune, le plus beau passage du livre est, pour moi, celui où Sylvain Prudhomme cite Gustave Flaubert :

" Il voyagea. Il connut la mélancolie des paquebots, les froids réveils sous la tente, l'étourdissement des paysages et des ruines, l'amertume des sympathies interrompues. Il revint. "