L’Apothicaire – Henri Lœvenbruck

Découverte Kube – Éditions J’ai Lu – Prix : 9.40€ (Poche)

L’Apothicaire – Henri Lœvenbruck

« Il vécut à Paris en l’an 1313 un homme qui allait du nom d’Andreas Saint-Loup, mais que d’aucuns appelaient l’Apothicaire, car il était le plus illustre et le plus mystérieux des préparateurs de potions, onguents, drogues et remèdes… »
Un matin de janvier, cet homme découvre dans sa boutique une pièce qu’il avait oubliée… Il comprend alors que jadis vivait ici une personne qui a soudainement disparu de toutes les mémoires.
L’Apothicaire, poursuivi par d’obscurs ennemis, accusé d’hérésie par le roi Philippe le Bel et l’Inquisiteur de France, décide de partir jusqu’au mont Sinaï.
Entre conte philosophique et suspense ésotérique, L’Apothicaire est une plongée vertigineuse dans les mystères du Moyen Age et les tréfonds de l’âme humaine. Résumé via Babelio

Rhétorique & Oralité

Henri Lœvenbruck – que je ne connaissais pas avant cette lecture – prend le pari dans son roman de faire revivre la rhétorique et son oralité. Un savoureux mélange pour les appréciateurs de mots et de leur tournure oratoire. Je dis « oratoire » pour une bonne raison : imaginez-vous, chers ami(e)s littéraires, assis dans la cour du château écoutant le troubadour (ou trouvère, selon que vous soyez plutôt langue d’oc ou langue d’oïl) vous narrer l’épopée d’Andreas Saint-Loup – grand apothicaire parisien ; de Robin – son apprenti ; et de Aalis – jeune fille parricide. Vous avez l’image en tête ? Si elle vous plaît, ce livre est fait pour vous.
L’auteur tient son fil épique durant 800 pages et n’hésites pas à apostropher son lecteur, rapellant ainsi le pacte inconditionnel liant l’auteur à son lecteur via l’acte d’écriture. Une immersion totale dans l’aventure la rendant des plus savoureuses.

Histoire & Philosophie

Serait-il plus juste de parler de théologie ? Pour nous, contemporains, ce serait une certitude. Néanmoins, pour coller au plus juste à cette période médiévale – à savoir 1313, date à laquelle débute cette aventure – il faut s’en tenir au terme de philosophie qui ne faisait pas encore de distinction entre les deux notions. Le distinguo religieux n’interviendra que bien plus tard historiquement, ainsi la religion était encore une partie inhérente de la règle philosophique de ce moyen-age chrétien, intégrant déjà avec peine la littérature profane, en langue vernaculaire, à son patrimoine culturel.
L’auteur nous immerge dans l’histoire moyennageuse révélant un souci de documentation acharnée et un véritable trésor d’apprentissage pour son lectorat. Climat historique et débats philosophiques au programme de cette lecture captivante, dont on ne veut plus se détacher. L’auteur livre à un lecteur émerveillé la période susdite sur un plateau d’argent liant ainsi l’utile à l’agréable – œuvre pouvant faire revoir à Platon son refus de l’inutilité fictionelle !

Personnages & Objet sacré

Autres points forts de ce thriller médiéval : ses personnages complexes et sa quête du sacré ponctuée de rencontres templières. L’auteur tisse une véritable personnalité à ses personnages les rendant humains et palpables. Ainsi aucun d’entre eux ne peut prendre la parole sans que l’on sache de qui il s’agit ! Andréas est un précepteur bourru et attachant auprès duquel on rêverait d’apprendre ; Robin est un élève loyal et courageux que l’on souhaiterait avoir pour ami ; et Aalis, la petite guerrière est futée et combative. Une femme qui prend son destin en main et à laquelle on aimerait ressembler dans nos moments de doute.
La quête d’Andréas de cet objet sacré – dont je tais raisonnablement la nature – par son mysticisme intrigue et captive en premier lieu. Puis, en qualité de lecteur, on parcourt le chemin avec le héros avançant sur les sables mouvants de la philosophie et de la quête initiatique. Les émotions sont au rendez-vous, tout comme le savoir. Deux balluchons humains promenés dans l’épopée saintloupienne pour notre plus grand bonheur !

En une phrase…

Ce roman est une putain de merveille ! 10/10 !