Chigozie Obioma
Traduit de l’anglais (Nigeria) par Serge Chauvin
Buchet-Chastel
420 pages
Lu sur liseuse
Chinonso, un éleveur de volailles du Nigeria va voir sa vie basculer le jour où il va empêcher une jeune femme de se suicider.
Cette histoire est une véritable tragédie en trois actes : l’amour, l’exil, le retour. La grande originalité de ce roman et ce qui m’a complètement séduite c’est que le narrateur n’est autre que le Chi du personnage principal (qu’il nomme « mon hôte »).
Le Chi ? Ca ne vous parle pas ? Vous voulez un petit éclairage ? C’est l’esprit protecteur de l’homme, dans la cosmologie Igbo. Sa petite voix intérieure.
Grâce à cette habile narration, le roman prend toute son envergure. Il est à la fois drôle, dépaysant, étonnant, sublime, tragique, terrible.
La construction participe aussi à cette belle réussite. On sait dès le début que le personnage a commis un acte grave (puisque le Chi veut intercéder en sa faveur auprès des divinités) mais on ne sait pas lequel et dans quelles circonstances, et bien sûr, notre curiosité n’en est que plus aiguisée. On ne l’apprend, bien sûr, qu’à la toute fin du livre.
Le langage très imagé, les croyances, les incantations du Chi, les « leçons » qu’il tire de son observation des hommes, tout est jouissif.
Cet auteur a un grand talent de conteur, il sait interpeller le lecteur, jouer avec les situations, faire rire son lecteur, il sait le surprendre, ou l’émouvoir. Combien de fois me suis-je exclamer à haute voix !… commentant ce que je lisais, hilare, terrassée ou interloquée.
Ce roman évoque la vulnérabilité de l’être humain qui, tel un papillon, est pris dans le filet du destin, sans pouvoir en sortir. Le filet n’est pas troué, les mailles sont bien serrées, et l’homme est ainsi prisonnier de son histoire. Le pouvoir de l’amour est décidément bien destructeur…
J’avais découvert cet auteur avec son roman Les pêcheurs que j’avais beaucoup apprécié. Lorsque j’ai vu que celui-ci était proposé sur Netgalley, je n’ai pas hésité une seconde et l’ai demandé. J’ai bien fait. Dépaysement assuré, plaisir de lecture total.