Dans la foulée de la nouvelle édition de Marvels, Panini Comics réédite Marvels : L'œil de l'Objectif, sa suite initialement sortie aux U.S. en 2010. C'est Kurt Busiek, Roger Stern et Jay Anacleto qui sont en charge de ce récit complet.
La saga Marvels fait partie de ces œuvres mythiques dans le milieu des comics. Portée par les sublimes peintures d'Alex Ross, l'histoire de Kurt Busiek s'étalait sur une trentaine d'années, et permettait de voir l'univers Marvel à travers les yeux du journaliste Phil Sheldon, de l'apparition de la première Torche Humaine à la mort de Gwen Stacy. Véritable chronique de l'Age d'Or des comics, l'oeuvre n'avait pas eu de véritable suite jusqu'en 2008, quand Kurt Busiek, épaulé par Roger Stern, décide d'écrire une suite à son histoire. Avec Alex Ross absent, c'est Jay Anacleto, dessinateur relativement méconnu, qui prend en charge la partie artistique.
S'il n'était pas indispensable de donner une suite à la série qui se suffisait à elle-même, on constate déjà que l'esprit est toujours le même. En déplaçant l'histoire dans la période trouble des années 60/70, marquée par les combats pour l'égalité des mutants (et indirectement les minorités) ou la première apparition des Fantastic Four, les auteurs donnent une nouvelle impulsion à l'histoire tout en restant dans la continuité du texte original. Plus mélancolique et sombre, la saga suit le modèle mis en place par son aînée en rapprochant les grandes sagas Marvel de la vie d'un homme. Avec un concept repris dans les différentes sagas Frontline plus tard, Busiek et Stern racontent une histoire intéressante, intime et personnelle, et finalement très émouvante. Si on n'atteint bien sûr pas la quasi-perfection scénaristique de Marvels, la saga n'a pas à rougir face à son aînée, et met fin à l'histoire de Phil Sheldon de manière émouvante.
Enfin, il faut rendre hommage aux peintures de Jay Anacleto. Si quasiment aucun artiste ne peut aujourd'hui prétendre atteindre le style d'Alex Ross, Anacleto s'en sort étonnamment bien. En étant assez intelligent pour ne pas chercher à copier bêtement le style de Ross, il s'en sort particulièrement bien, avec ses pages à la fois iconiques dans la représentation des héros, mais aussi très justes sur les scènes intimes de cette saga. En se centrant plus sur une partie bien particulière de la vie de Phil Sheldon, les auteurs permettent à Anacletto de dessiner des pages moins chargées en action, mais dans lesquelles il retranscrit parfaitement les émotions et les réactions des personnages.