L’Outsider – Stephen King
Me voici de nouveau face à un roman de Stephen King comme un enfant devant un sapin de Noël… regorgeant de cadeaux d’un genre bien particulier… On y trouve de multiples abominations (on sait d’avance que Stephen King va nous emmener là où nous n’avons pas envie d’aller… et pourtant on y va quand même, et avec plaisir…), des terreurs insaisissables diaboliquement orchestrées et distillées de façon insidieuse et efficace… Mais ce n’est pas tout : voilà qu’entre deux cadeaux empoisonnés (l’un contenant les tortures infligés à un jeune garçon et l’autre les hallucinations traumatisantes d’un flic alcoolique atteint d’un cancer fulgurant, par exemple), quelques surprises de taille sauront rapidement convaincre le lecteur de la valeur de ce roman.
L’Outsider est construit comme un bon polar, dans la lignée de Mr Mercedes, Carnets noirs et Fin de Ronde. On y trouve à bien des égards des similitudes avec CA et Docteur Sleep, qui raviront les fans. A propos de ces fameuses surprises que l’on découvrira au fur et à mesure de la lecture , Stephen King devient coutumier des références à ses propres livres, élargissant l‘univers partagé, dont il est le Dieu créateur. Une règle en écriture : quand on ouvre une porte, on la referme… Stephen King utilise cette règle à bon escient et cela tombe bien : son univers est empli de portes et de corridors qui ne demandent qu’à être ouvertes, refermées et arpentés… Jouissif, je vous l’avoue pour un mordu du maître…
L’histoire donc, commence ainsi : le corps de Franck Peterson, 11 ans est retrouvé violé et mutilé dans un parc de Flint City, Oklahoma. Plusieurs témoignages ainsi que des empreintes accablent Terry Maitland, professeur d’anglais, entraîneur du club de base-ball, et bon père de famille. L’inspecteur Ralph Anderson, dont Maitland a entraîné le fils, certain de sa culpabilité, l’arrête publiquement lors d’un match de base-ball. Maitland nie farouchement et fournit un alibi en béton : le jour du meurtre il assistait, à 100 kilomètres de là et accompagné de trois collègues, à la conférence d’un célèbre auteur de romans policiers…
Howard Gold, avocat, aidé d’un détective privé parvient à prouver la présence de Maitland à la conférence, alors que les policiers trouve les traces ADN du suspect sur les lieux du crime. La situation est complexe, d’autant plus que l’hypothèse du jumeau est éliminée rapidement… Devenu paria dans sa propre ville, Maitland est emmené au tribunal où l’attend une foule déchaînée. La manoeuvre vire au drame : Terry Maitland est tué sous les yeux de sa femme par le frère aîné de Franck Peterson… Suite à ce fiasco, Ralph Anderson est placé en congés administratif, mais rongé par la culpabilité et atterré par ce problème insoluble, il poursuit l’enquête, aidé par Yunel Sablo, policier et de Howard Gold . Le trio sera rejoint par une invitée de marque (une très bonne surprise pour ma part), qui parviendra à convaincre ses comparses de la présence du surnaturel dans cette délicate affaire. Le fantastique apparaît donc dans la seconde moitié du livre, par des références à la légende hispanique d’El Cuco, le croquemitaine dévoreur d’enfants…
De nombreux ingrédients sont donc présents pour faire de cette recette un succès du maître : les peurs ancestrales, le portrait de l’Amérique au travers d’une petite ville où tout le monde se connaît, les bons vieux tubes rock n’roll… Le pire de la race humaine opposé à des personnages très travaillés et emplis d’humanité auxquels on va forcément s’attacher… Difficile encore de refermer un livre comme celui-là…