Quand on a connu un succès aussi retentissant que Né d’aucune femme, il devient très difficile de ne pas décevoir son lectorat avec ses nouveaux titres. Et que dire des romans précédents, réédités pour surfer sur la soudaine et extraordinaire notoriété de l’auteur ? Oxymort fait partie de ces œuvres de Franck Bouysse parues avant son best-seller qui a fait chavirer le cœur de dizaines de milliers de lecteurs. La grande question : méritait-il d’être exhumé de la sorte ? Je n’en suis pas sûre…
Je n’en suis pas sûre car ce roman très noir est aussi très inabouti. Venant d’un autre auteur, j’aurais pu m’en contenter mais venant de cet auteur-là, je suis franchement déçue. La toile de fond de ce thriller est assez banale : un homme se réveille enchaîné dans une pièce plongée dans le noir. Il ne sait pas ce qu’il fait là ni ce qu’il a pu faire pour mériter un tel traitement. Ca sent le huis-clos psychologique à plein nez, ça tombe bien, j’adore ça ! Sauf que là, ça tourne en rond, on comprend très vite que la clé du mystère se situe dans la vie de cette victime qui se plonge sans cesse dans ses souvenirs à la recherche d’une explication. Il n’y a pas de révélations fracassantes, tout est d’une logique de fait divers qui ne mérite même pas la Une du JT. Alors pour pimenter le tout, l’auteur nous livre une seconde histoire en pointillés, moins évidente à comprendre celle-là. Elle semble même sortie de nulle part et justifiée par le seul désir de l’auteur de nous perdre et de faire genre « vous ne devinerez jamais la fin ». Alors oui, effectivement là il est plus difficile de deviner la fin puisqu’il ne la livre pas, préférant nous laisser en carafe. Il reste dès lors les hypothèses mais si la mienne venait à se justifier, alors on passerait d’une histoire principale trop évidente et sans surprise à une histoire secondaire complètement tirée par les cheveux ce qui ne correspond pas tout à fait non plus à la définition que je me fais d’un thriller réussi.
C’était tout de même pas si difficile que ça de mourir. Quelque chose qu’il fallait faire un jour ou l’autre. (l’incipit)
Au-delà de l’histoire qui n’a pas réussi à me convaincre, je n’ai pas non plus été séduite par la plume de l’auteur dans ce roman. Je n’y ai pas retrouvé les qualités de conteur que Franck Bouysse a su déployer dans Né d’aucune femme. Cette histoire aux contours flous n’est pas assez dégrossie et les personnages pas assez ciselés pour laisser une empreinte forte dans ma mémoire. L’absence de tension en prime, je sais déjà que cette histoire ne me laissera au mieux qu’un souvenir évanescent.
Tout ceci démontre deux choses.
La première : que le travail de cet auteur a vraiment gagné en épaisseur et en qualité depuis ce titre, ce dont on peut se réjouir pour l’avenir.
La deuxième : que le marketing ne fait toujours pas bon ménage avec la littérature car ce titre aurait dû rester à sa place dans la chronologie des œuvres publiées de Franck Bouysse.
L’ESSENTIEL
Oxymort
Franck BOUYSSE
Editions Geste puis Moissons noires
Sorti le 15/03/2014 et le 04/03/2020 pour cette édition J’ai lu
219 pages
Genre : thriller psychologique
Personnages : Louis Forell, Lilly, Suzanne
Plaisir de lecture :
Recommandation : oui
Lectures complémentaires : Né d’aucune femme du même auteur, Psychologia de Camille Choppin, Mygale de Thierry Jonquet
RÉSUMÉ DE L’ÉDITEUR
Un homme se réveille enchaîné sur le sol de ce qui semble être une cave humide. La sensation d’être un animal piégé… Il est incapable de se rappeler pourquoi il est là. Son ravisseur lui laisse seulement quelques énigmes à résoudre, transmises à la volée par une trappe qui se referme avant qu’il n’ait eu le temps de s’en approcher. Il fouille alors dans ses souvenirs à la recherche d’un indice qui pourrait lui permettre de se sortir de cette situation. Une intrigue psychologique insoutenable.
TOUJOURS PAS CONVAINCU ?
3 raisons de lire Oxymort
- Parce que ça se lit très vite
- Parce que c’est très classique dans sa construction
- Parce que ça permet de découvrir les premières œuvres de Franck Bouysse
3 raisons de ne pas lire Oxymort
- Parce que ça n’a rien d’exceptionnel en termes d’histoire comme de construction narrative
- Si vous n’aimez pas les fins ouvertes, il vaut vraiment mieux que vous passiez votre chemin
- Parce qu’il y a bien d’autres oeuvres de l’auteur à découvrir avant celle-là
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