Résumé : Un monde divisé. Un reinaume sans héritière. Un ancien ennemi s'éveille. La maison Berethnet règne sur l'Inys depuis près de mille ans. La reine Sabran IX qui rechigne à se marier doit absolument donner naissance à une héritière pour protéger son reinaume de la destruction, mais des assassins se rapprochent d'elle... Ead Duryan est une marginale à la cour. Servante de la reine en apparence, elle appartient à une société secrète de mages.
Sa mission est de protéger Sabran à tout prix, même si l'usage d'une magie interdite s'impose pour cela. De l'autre côté de l'Abysse, Tané s'est entraînée toute sa vie pour devenir une dragonnière et chevaucher les plus impressionnantes créatures que le monde ait connues. Elle va cependant devoir faire un choix qui pourrait bouleverser son existence. Pendant que l'Est et l'Ouest continuent de se diviser un peu plus chaque jour, les sombres forces du chaos s'éveillent d'un long sommeil...
Bientôt, l'humanité devra s'unir si elle veut survivre à la plus grande des menaces.
- - - - - - - - - - - -
Cette chronique va être exceptionnellement longue, et sans spoilers.Ce livre a été un coup de coeur, et en même temps pas.
J'avais des attentes particulières, qui n'ont pas été comblées : et je ne peux décemment pas en tenir rigueur à l'ouvrage. Pour la simple et bonne raison que mes attentes étaient déraisonnables, illogiques, illusoires. Si j'ai pris ce livre, c'était pour les dragons (je sais, vous êtes vraiment tous surpris). Et parce que en un sens, pour moi qui dit dragon, dit Eragon, et qui dit Eragon, dit magie, puissance... et Alagaësia.
Sauf qu'il n'y a ni dragons à la sauce Eragon, ni Alagaësia, ni de magie comparable à celle que l'on observe et découvre sur les Terres d'Alagaësia avec l'Ancien Langage. On débarque dans un tout autre registre, un tout autre monde avec de nouveaux codes, de nouvelles cultures. Et, si j'en ai été satisfaite, j'en ai également été profondément déçue car je pensais y retrouver un peu de la magie, de l'essence, des dragonniers alagaësiens. Stupide, mais impactant car je n'ai pas cessé de comprarer, durant toute la première partie du livre, ce one-shot à cette grande saga, précieuse à mon coeur.
Un combat tout-à-fait déloyal, car si l'un se compose de 4 volumes (flirtant chacun avec le millier de pages), l'autre est un ... one-shot. Le développement est donc limité. La comparaison entre les deux est absolument malvenue. Mais, cette comparaison a tout de même eu du bon : la mise en lumière de ce qui me semble être le seul et unique défaut de ce bouquin : l'absence d'âme, d'identité.
Il faut bien comprendre que tout se déroule en un seul et unique volume, mais que nous suivons plusieurs personnages bien distincts, qui vont se dévoiler de la première jusqu'à la dernière page progressivement. Mais cette manière de procéder fait que le récit n'est pas porté par une seule et même voix (logique). Mais du coup... Il y a une sensation persistante de détachement, d'impossibilité de s'ancrer dans l'histoire.
Et cet effet est renforcé par le talent de Samantha à nous offrir des personnages bien construits et clairement dissociés des uns des autres. Ead ne va pas déteindre sur Sabran et inversement : chaque personnage possède sa propre personnalité, son propre tempérament & caractère. Ils resteront tous et toutes en cohérences avec ce qui nous a été présenté durant les premiers chapitres, qui servent de base au récit.
Mais donc, il y a une absence de caractère. Pour la simple et bonne raison qu'il a été partagé en plusieurs petits bouts, qui ont ensuite été disséminés à travers divers endroits du récit. Problème : le livre fait plus ou moins 1000 pages... et c'est tout.
Alors que certains et certaines doivent avoir des yeux ronds comme des soucoupes face à une telle épaisseur, ici... C'est juste clairement pas assez, en vérité. D'accord pour le one-shot, mais soyons honnête : il manque des pages, des chapitres. Ou Samantha a été trop gourmande et aurait du se limiter à 3 narratrices (ce qui aurait renforcé l'image (déjà très forte) des femmes du récit).
Maintenant, soyons une nouvelle fois très clair... Il s'agit, selon moi, de son seul & unique défaut. Et dans un livre aussi épais, un seul défaut (qui est plus que surmontable)... ça tient franchement du miracle. Le récit ne souffre pas de véritables longueurs, ni d'incohérences. La trame est limpide, les conflits multiples, les sursauts, les imprévus également : nombreuses sont les fois où j'ai été prise de court ! Certains passages sont inattendus au possible. Certains sont tellement violents que j'ai bien du poser mon livre et le rouvrir le lendemain, une fois le passage digéré, et les mains un peu moins crispées sur le papier...
C'est un ouvrage merveilleux, fabuleux... Il aurait pu être légendaire. Aussi légendaire que notre intrépide Ead, ou Sabran. Bon sang, si j'ai bien eu un coup de coeur pour deux personnages, ce sont bien elles ! Elles ne sont pas invincibles, et le récit lui-même s'attelle à nous, et à le leur rappeler. Le poids du pouvoir, des devoirs, des attentes d'un monde et d'une société au bord de l'explosion, des responsabilités... et du passé.
C'est un monde en pleine fusion qu'a créée Samantha Shannon. Et il est délicieux de le découvrir, de basculer dans la folie du Sans-Nom et la découverte de cette société secrète de mages. Et il est extrêmement douloureux de se dire que tout cela va prendre fin au bout de mille pages : car ce monde est beaucoup trop riches pour s'arrêter à ça.
Il y a tellement de légendes, de possibilités,... qui n'ont pu être développées ! Et ces places qui reviennent de droit aux femmes. Ce pays dont il reste tant à découvrir. Ces cultures bouillonnantes. Cet effondrement de l'histoire. Non, je refuse. 1 000 pages à peine, ce n'est pas assez, ce n'est pas suffisant. Pas pour une histoire, pas pour un monde tel que celui-ci. Car le Prieuré de l'Oranger, ce n'est pas qu'une quête et une guerre qui s'annonce contre le Sans-Nom, c'est la rencontre d'une foule de personnages incroyables, d'un monde d'une densité phénoménale, et d'une magie qui reste encore à embrasser...
Je ne dirais rien de plus, désormais, c'est à vous de découvrir ce qui se cache sous les mots.