Einstein, le sexe et moi - Olivier Liron

Par Manu17

" J'ai dû entendre dix mille fois les gens m'appeler gogol. À l'école, et surtout au collège, les enfants différents souffrent le martyre. C'est déjà le pouvoir hideux et haineux de la norme. Aujourd'hui encore, quand j'entends à la radio les " normaux ", ceux qui ont le pouvoir de la norme, de dicter la norme, de faire la norme, les politiciens et les financiers, les humoristes pas drôles, les haineux de tous bords, j'ai envie de les déchiqueter avec les dents. Pour leur montrer de quel bois on se chauffe, nous les gogols. "

Une sombre et froide fin de journée d'hiver dans " la grande maison " chez Tonton Louis et Tante Madeleine (non trempée dans du Coca). " C'est l'heure des Champions ! "

Plus qu'une habitude, un rituel. Tonton Louis calé dans le canapé. Tante Madeleine (toujours non trempée dans du Coca ! En a-t-elle déjà bu d'ailleurs ? Il faudra que je me renseigne...) assise sur le seuil de la cheminée, le dos chauffée par les flammes qui lèchent avec gourmandise les vitres de l'insert. Le monde peut bien s'arrêter de tourner. Plus rien ne compte. La musique du générique retentit, ça commence : Question pour un champion !

Si on m'avait dit que plus de trente ans plus tard, je lirai un roman ayant pour cadre ce jeu, je ne l'aurai pas cru et pourtant, quel roman !

Einstein, le sexe et moi, c'est l'histoire d'Olivier, Olivier Liron l'auteur, et de sa participation à Question pour un champion, le célèbre jeu de France 3 animé par l'unique et l'irremplaçable Julien Lepers (Ah ben si, finalement...), musicien contrarié qui trouvera la reconnaissance (et la fortune ?) à travers ce jeu quotidien.

Un roman qui se lit d'une traite tant on est pris par l'écriture et le sens du rythme de l'auteur. La dramaturgie importante du jeu est elle-même propice à générer une certaine tension narrative. L'auteur y combine habilement des éléments de son existence, des nombreuses difficultés liées à son autisme et à son rapport à l'autre. Ses remarques, ses analyses, son sens critique, son sens comique et ses déboires sexuelo-sentimaux nous émeuvent encore plus qu'ils nous amusent.

Olivier Liron s'y révèle aussi fin que drôle et attachant. L'adhésion à son histoire se fait donc avec une indéniable jubilation.

" Il avait les yeux perdus dans le vague comme Patrick Poivre d'Arvor sur la couverture de ses romans. "

" Dès la naissance on ne le sait pas encore, mais il n'y a plus qu'à attendre la mort en essayant d'être tendre avec soi, le plus tendre possible, aimant avec les autres, le plus aimant possible, et révolté contre tout le reste. Il suffit de le comprendre pour que la vie devienne une fête.

" Je suis autiste Asperger. Ce n'est pas une maladie, je vous rassure. C'est une différence. "