L'Impératrice des Chimères

Par Wolkaiw


SERVICE PRESSETitre : L'Impératrice des Chimères
     Auteur : Jérôme Camedescasse
     Sorti le 5 mars 2020
     Lu en mars
     Crin de Chimère
     Genre : dark fantasy
4e de couverture :
Brouillard de cauchemar mortifère, la Chevelure de Hel a envahi les Terres du Nord. Tjor de Noirelouve est-il animé par sa foi, ou par une sorte de témérité aveugle, pour oser vouloir s’y frotter et chasser une telle malédiction ? Entouré d’une cohorte de « héros » aux motivations aussi variées que douteuses, il devra s’y aventurer et y affronter des créatures vomies des tréfonds des enfers.
Perdition. Aliénation. Au-delà de ces monstruosités et de ces sbires décérébrés, un être malicieux attend. Une entité inconnue déterminée à retourner contre eux angoisses et déchirures de l’âme grâce à moult illusions. Invisible et insaisissable, elle sèmera leur chemin d’embûches, déterminée à les détruire ou les confiner à la folie.
Je remercie la toute récente maison d’édition Crin De Chimère pour ce partenariat, signant ici leur première parution. La couverture, représentant Hel, la déesse des morts dans la mythologie nordique est de toute beauté ! Le titre de ce premier livre n’est pas sans rappeler le nom de la maison d’édition. 

Pour celles et ceux qui comme moi n’y connaissent pas grand-chose en mythologie nordique, je vous invite à visionner cette vidéo, très sympathique. Elle m’a aidé à mieux comprendre l’univers du livre ainsi que les références : VIDÉO
Couvrez-vous valeureux guerriers, le froid du Nord progresse sur les terres des Hommes et nous allons devoir le braver ! Un épais et sombre brouillard s’installe avec lui, empêchant quiconque de progresser sereinement. Des hurlements à vous glacer le sang se font entendre, çà et là, la tension monte d’un cran à chaque bruit suspect, renforçant la peur qui s’empare peu à peu des membres du groupe. Préparez-vous à effectuer un plongeon en territoire hostile, L’Impératrice des Chimères offre une aventure impitoyable et pleine de surprises. Les personnages que vous vous apprêtez à rencontrer et à suivre sont tout droit sortis de la mythologie nordique, de ces légendes celtiques qui fascinent autant qu’elles terrifient. Ne soyez pas surpris par les références à Thor ou Odin et laissez-vous toucher par le cri de la Banshee. Choisissez des vêtements chauds et n’oubliez pas votre besace bien remplie, les bivouacs dans des lieux surprenants jalonneront votre route. D’entrée de jeu, le lecteur sent et devine que Jérôme Camedescasse a effectué quelques recherches quant à l’univers qu’il décrit, quant aux peuples qu’ils évoquent, quant aux légendes dont il est question… Au détour d’une page vous risquez très fortement de tomber sur un nain ou de faire face à un géant, peut-être même un barghest si vos pas vous mènent aussi loin. La mythologie semble ici plus que respectée, elle représente un pan entier de l’histoire, un des piliers sur lesquels repose le récit. Spleinir, les trois Nornes ou encore l’évocation du meurtre de Balder, les références à ce qui façonnent un imaginaire sont légion. M’est avis que l’on savoure davantage ce récit de fantasy en ayant quelques connaissances et notions relatives à Yggdrasil ainsi qu’aux différents royaumes tels que celui des hommes, des géants ou encore des morts ; le voyage ne peut assurément qu’en être plus palpitant.

Inconnu, Midgard


Levez la tête et rendez-vous compte par vous-même… Les étoiles ont déserté le ciel depuis plusieurs printemps, sans doute annonciateur des malheurs à venir. Seuls les morts peuplent ces terres désolées, ces immenses et vastes étendues dont nulle ne revient jamais. Rien n’est sûr en ces lieux, le danger rôde, tapi derrière la moindre branche, prêt à vous sauter à la gorge. Surveillez vos arrières et économisez vos mots. Le silence est un allié dont vous ne voudriez pas vous passer. L’ambiance qui règne ici-bas est sombre, aussi sombre que les ailes d’un corbeau. La violence, omniprésente, se répand telle un pernicieux poison et le doute gangrène les esprits les moins affûtés. Personne n’est à l’abri du trépas, ce dernier guette, patiente, n’attendant qu’un instant de faiblesse pour vous terrasser. À travers le périple des protagonistes et les affrontements qu’ils devront mener pour leur survie, l’auteur traite de la place de la vie et de la mort dans un monde qui ne connaît que souffrance et désillusion. Le dédale est tel que l’on a tôt fait de s’y perdre et de ne plus jamais en revenir. Le groupe, très hétéroclite, composé de sept braves âmes se voit investi de la mission de faire tomber l’épais brouillard de ce que l’on surnomme “La chevelure de Hel”. Les trahisons des uns n’auront d’égal que la détermination des autres. Sept individus d’horizons divers et variés réunies par Noirelouve, sept personnalités fortes uniquement guidées par leurs propres quêtes et désirs, sept esprits torturés que l’Impératrice des Chimères va mettre à mal. La nécessité de mettre en place une stratégie se fait sentir, bien vite balayée par les multiples interventions divines. Chacun joue et un rôle et l’exécute comme il se doit, entre pièges et répits, l’aventure qui attend les lecteurs, à l’instar du groupe, se révèle longue et périlleuse. 
Prenez quelques minutes pour écouter les mots du vieux barde que je suis. Profitez de ces instants de calme pour vous détendre et oublier le dangereux monde autour de vous. L’Impératrice des Chimères est un livre plutôt généreux et surtout trèèèèès long. Toutefois, force est de reconnaître que pour un récit d’une telle ampleur, le nombre de noms à retenir est relativement faible. Nous avons les sept de départ dont je vous ai déjà parlé, ainsi que quelques autres personnages qui viennent alimenter le fil de l’intrigue. Les noms, en général, sont plutôt courts, aux sonorités rudes et si particulières qui offrent un dépaysement total. Le voyage, presque aussi interminable qu’éprouvant délivre des portraits tout en nuances. Les personnages doivent faire face à leurs démons intérieurs, à tout ce qui les ronge et les détourne de leur véritable quête. Apporter du relief à la psychologie des protagonistes et jouer sur les tourments et cauchemars qui les hantent semble être un point très important pour l’auteur, en témoigne sa description sur le site de la maison d’édition. Au-delà de cette volonté de creuser et de construire des profils fouillés, on ressent aussi le fil très ténu qui unit toutes ces personnes, entre méfiances et ressentiments. La quête qui anime chacun d’entre eux est palpable et cela ne fait que renforcer les animosités… 

Pochette de l'album Born Loka, par le groupe de musique Skálmöld


Maintenant que vous êtes tous complètement avachis et inconscients, l’heure est venue d’évoquer le véritable danger, la vraie menace qui pèse sur les épaules du groupe. Savez-vous ce qu’est une chimère ? Vous en avez une vague idée c’est cela ? Plusieurs définitions peuvent lui correspondre, j’ai toutefois choisi de n’en aborder qu’une, celle qui fait référence au titre et à cette fameuse Impératrice dont nous ignorons tout… Le terme de Chimère, dans le livre de Jérôme Camedescasse ne convoque pas l’idée d’un monstre pouvant prendre une forme animale mais fait plutôt référence à une chose monstrueuse qui provoque l’épouvante et cette chose n’est autre que l’illusion. Le pouvoir de l’illusion est grand et l’Impératrice en use et en abuse. Elle met à mal chaque individu osant braver la chevelure de Hel, prête à tout pour en découdre et repousser les envahisseurs. Ce n’est qu’au fil du récit que nous découvrons qui se cache réellement derrière cette femme aussi maléfique que puissante. Toute la lecture durant, les personnages affronteront presque tour à tour celle qu’ils nomment “l’embrouilleuse”. Bon, autant vous le dire clairement, ce nom me fait hérisser le poil ! Je ne comprends pas que dans un livre au registre souvent soutenu on puisse employer un mot aussi laid que l’embrouilleuse… Honnêtement ça me dépasse. L’idée est là certes, mais j’avais juste envie de barrer le mot sur ma liseuse tellement je le trouvais inapproprié dans l’histoire. Bref, je crois que vous avez compris mon point de vue là-dessus. Cet être, dont je n’utiliserai pas le sobriquet une fois de plus, constitue une menace de poids et ses multiples apparitions rythment le texte d’une manière qui ne m’a pas non plus convaincue. Si la volonté de l’auteur était aussi d’embrouiller le lecteur, je trouve la réalisation assez maladroite. Les passages relatant ces épreuves, car il s’agit bien de cela, sont souvent trop rapides et s’inscrivent dans une autre dynamique, l’un d’entre eux m’a particulièrement laissé de marbre à tel point que je n’y ai juste pas cru. L’idée est vraiment intéressante ; plonger le protagoniste dans une bulle chimérique pour le confronter à ses pulsions et ses démons, cependant je n’ai pas accroché du tout au procédé utilisé.
 Mes chers compagnons de route, vous n’êtes pas au bout de vos peines, et moi non plus d’ailleurs! J’ai transpiré à grosse goutte, frôlant parfois l’ennui ou l’exaspération. Alors oui, Jérôme Camedescasse écrit bien, très bien même, il manie la langue française très habilement je ne peux lui retirer cette qualité mais bon sang que j’ai trouvé sa plume pompeuse et lourde ! Ma lecture n’a été qu’un perpétuel conflit, une bataille entre l’envie de suivre les personnages et celle de faire une pause bien méritée. Amoureuse des beaux mots et des tournures à vous faire tourner la tête, je n’ai pourtant pas du tout mais alors pas du tout accroché au style de l’auteur. Plus je tournais les pages et plus j’avais l’impression d’assister à une démonstration, à un étalage des connaissances de l’auteur plus qu’à une volonté de narrer une histoire. Je ne vous parle même pas des détours empruntés dans le seul but de montrer la maîtrise de la langue de Molière. Le style s’adapte au genre qu’est la Dark Fantasy, j’en suis consciente, mais je ne supporte pas ce genre d’exercice stylistique. Peut-être ai-je tort, peut-être mon jugement est-il erroné mais c’est le sentiment que j’ai eu. De même, j’ai trouvé le récit très lent, le lecteur progresse vraiment pas à pas alors que les ellipses sont nombreuses. Je n’ai rien contre l’utilisation de ces dernières, elles permettent justement d’accélérer - en règle générale - les récits, mais ici elles m’ont profondément agacée. Pourquoi occulter volontairement la description d’une scène si c’est pour nous en parler dans la suite de l’histoire comme d’un élément important ? Je crois que j’ai vraiment eu énormément de mal avec le style de l’auteur ainsi qu’avec la construction de l’intrigue et les choix effectués. L’épilogue me conforte dans l’idée que, définitivement, cette lecture fut bien plus conflictuelle qu’autre chose, comprenez là que je n’ai pas du tout été convaincue par celui-ci. En somme, l’envie de connaître la fin de l’histoire était grande, l’ambiance et l’univers y étant pour beaucoup, mais j’y suis allée à reculons, ramant encore et encore entre les sinueux dédales empruntés par l’auteur. 

Arthur Rackham, Fenrir


L’heure de nous quitter approche. La route qui vous attend est longue encore, j’ose espérer que vous avez gardé quelques victuailles et que vous ouvrirez l’oeil mais pas que. Si je devais, avant que vous ne partiez achever votre quête, vous résumer mon ressenti cela serait assez simple et pourrait tenir en un mot : conflictuel. D’un côté, je n’ai pas aimé la plume de l’auteur, sans doute adaptée au genre du livre mais beaucoup trop lourde pour être réellement agréable, de même je n’ai pas du tout été sensible à la construction du récit. D’un autre, j’ai adoré l’ambiance sombre et angoissante, la psychologie des personnages et cette immersion dans la mythologie nordique. Si un plongeon dans les terres de Hel ne vous effraie pas, L’Impératrice des Chimères n’attend plus que vous.
3 raisons de lire L'Impératrice des Chimères :
- Des personnages à la psychologie fouillée
- Une immersion au cœur de la mythologie nordique
- Une ambiance sombre et angoissante