La Sortie

Par Wolkaiw

SERVICE PRESSETitre : La Sortie
     Auteur : Joseph Kochmann
     Sorti le 19 mars 2020
     Lu en mars
     Autoédition
     Genre : horreur | science-fiction
4eme de couverture :
Échoué sur une planète sombre et désolée, le spationaute 24 n'a pour souvenir que son nombre et une image ; celle de La Sortie, entité lumineuse mystérieuse cachée dans les profondeurs de l'astre noir, unique échappatoire de ce monde dangereux. Suivi par quatre compagnons, il s'élance à la poursuite de la vision, traversant collines, gouffres et monts ténébreux, dans l'espoir d'atteindre au plus vite l'ultime issue. Mais, dans l'ombre, rôde le cruel et puissant 4, gigantesque gorille blanc au masque noir bien déterminé à trouver La Sortie avant eux...
Je remercie chaleureusement Joseph Kochmann pour sa confiance sans cesse renouvelée ! J'adore découvrir ses nouveaux titres.

« PAR OÙ ?
- De quoi parles-tu ?
- LA SORTIE.
- Oh et bien c’est très simple, un véritable jeu d’enfant je dirais même ! Continues tout droit pendant trois cents mètres, quand tu verras un arbre sans feuille tournes à gauche. Ensuite, avances dans la direction de la lumière, tu ne pourras pas la louper ! Quand tu auras atteint une immense palissade rougeâtre et glissante, tu devras l’escalader au péril de ta vie. Une fois cette étape réussie, il ne te restera plus qu’à slalomer entre les cadavres, zigzaguer et éviter les obstacles qui se dresseront sur ton chemin. Un vrai jeu d’en... »
Excédé, l’immense créature avait soulevé de terre le pauvre guide avant de le projeter contre un gros rocher en hurlant “TROP LONG !” 

Beksinski

Un message. Une proposition. Aucune hésitation. Lorsque Joseph Kochmann me contacte pour chroniquer son dernier livre, j’accepte sans même réfléchir. Je ne sais jamais à quoi m’attendre et j’avoue ne même pas lire la quatrième de couverture ; je saute à pieds joints dans ces histoires. Joe (c’est toujours plus cool que Joseph non ?) fait partie de ces auteurs dont l’imagination débordante n’a de cesse de me surprendre, chacun de ses livres est un savant mélange de réflexions sur nos sociétés et de violence, le tout avec un côté décalé non négligeable. Avec le temps - j’en suis quand même à ma cinquième chronique - je ne cherche même plus à comprendre, je me laisse transporter par l’histoire sans savoir où celle-ci me mènera ; je ne résiste plus, me prêtant au jeu afin de savourer le dénouement.
« PAR OÙ ?
- Tu cherches La Sortie ?
- OUI !
- Cela tombe bien, moi aussi. Je crois qu’il faut suivre cette direction. (il pointe du doigt un halo lumineux au bout d’un long tunnel). 
- MARCHONS ALORS, VITE! »
C’est ainsi qu’un adolescent et une bête, ressemblant à s’y méprendre à un gorille, prirent la route vers une destination inconnue. 
Ce livre, bien que relativement court, narre dans une atmosphère angoissante et quasi anxiogène la course effrénée de nombreux individus. Un groupe de spationautes a atterri sur une planète étrange dont nul n’a jamais entendue parler. Tous sont animés par le désir, que dis-je, le besoin vital de rejoindre au plus vite La Sortie. 
« ACCÉLÈRE !
- Je voudrais bien… Je dois faire trois pas quand toi tu n’en fais qu’un… »
D’un naturel peu patient, l’animal laissa l’homme en pestant, grognant un “TROP LENT” presque inaudible. Il devait arriver le premier et personne ne le ralentirait, surtout pas un misérable garçon incapable de suivre l’allure.
Un long et douloureux voyage attend les personnages, un véritable parcours du combattant dans un monde hostile. L’urgence de la situation se fait sentir à chaque chapitre, accentuant l’angoisse et la tension, le rythme s’accélère jusqu’à devenir insoutenable. Les pages défilent et l’atmosphère se charge d’une délicate odeur de mort un brin saturée par la transpiration des uns et les déchets organiques des autres… Tout s’enchaîne rapidement tel un tourbillon prêt à tout ravager. 

Beksinski

« ARRIVER LE PREMIER… RÉUSSIR AVANT LES AUTRES… »
La violence ainsi que la mort sont omniprésentes au sein de cette courte histoire, elles agissent main dans la main comme deux vieilles amies. Ne soyez pas surpris par les passages sanglants, gores et décalés dont regorgent ce livre, je pense pouvoir affirmer qu’il s’agit de la marque de fabrique de l’auteur. L’univers angoissant dans lequel Joe plonge le lecteur donne l’impression d’un piège se refermant progressivement et inexorablement sur ses victimes. Les individus fraîchement débarqués ne font pas dans la dentelle et se massacrent sans pitié avec tout ce qu’ils trouvent sous la main, prêt à tout pour atteindre La Sortie avant les autres... Le monde de brutes qu’il nous dépeint ne laisse que très peu de place à la tendresse et la douceur, ces deux termes étant des notions étrangères aux personnages ou alors très lointaines… L’Homme n’est pas le seul danger pour l’Homme sur cette planète inconnue, c'eût été trop simple sinon ! Une étrange maladie sévit, un mal dont personne ne connaît l’origine et qui ronge petit à petit les corps… Une fois la maladie contractée, vous mourrez à petit feu, violemment et sûrement…
« BESOIN D’UNE PAUSE, COURTE. »
Prenons maintenant quelques instants pour évoquer la plume de Joseph Kochmann, son style ainsi que sa patte d’auteur. Laissons le gorille se reposer tranquillement après avoir parcouru des kilomètres entiers et savourons ce répit. Joe possède un style unique que je trouve particulièrement savoureux et qu’il maîtrise parfaitement. Il a l’art et la manière de raconter des histoires absolument loufoques, le genre qui vous retourne le cerveau si vous tentez de suivre une quelconque logique. Et pourtant, eh oui, tout est calculé, millimétré, rien n’est laissé au hasard. Chaque élément trouve sa place dans l’immense puzzle que représente l’histoire, s’emboîtant à la perfection. La violence, omniprésente, n’est jamais gratuite et trouve toujours une justification, renforçant les propos et accentuant le malaise. J’aime énormément la plume de Joe, belle et fluide, elle m’embarquerait dans n’importe quelle histoire ! À chacune de mes lectures, je retrouve des points communs, autant d’aspects qui permettent d’identifier la patte de l’auteur, qui le distingue des autres. Les clins d’oeils à ses autres livres me font toujours sourire, tantôt discrets, tantôt flagrants, ils créent des liens et des passerelles entre les histoires.
« COURIR… LA SORTIE… »
Qui sont les personnages de cette histoire absurde ? Le lecteur ne sait rien d’eux si ce n’est le fait qu’ils n’ont pas de prénom ni de nom… Ils ont un numéro. Un chiffre. Un nombre. Anonymes parmi les anonymes. Ils sont un parmi la foule, noyés sous une masse grouillante, incapables de s’affirmer. Cela ne nous renvoie-t-il pas à notre propre situation ? Numéros de carte bancaire, numéros de carte d’identité, numéros de carte vitale, numéros de commande, numéros de candidats… Autant de numéros qui toujours nous désignent mais jamais ne nous définissent. Chaque instant de notre existence nous souhaitons nous affirmer, montrer que nous sommes là, que nous méritons d’exister, que nous voulons vivre… La vie est un combat de tous les instants, ce livre l’illustre à sa manière. Jusqu’où sommes-nous prêts à aller ? Que sommes-nous prêts à faire quand il est question de survie ? À travers le parcours chaotique des personnages, des problématiques sont soulevées, des comportements sont mis en exergue. Quelle est la valeur de l’amitié entre deux inconnus ? Doit-on faire confiance au premier venu ? Qu’est-ce qui peut unir plusieurs personnes ? Quel est le prix de la trahison ? Autant de questions qui se bousculent avec fracas, autant de mots posés qui donnent le tournis. Quelques personnages se détachent bien du lot, comme le GROS SINGE ou encore certains numéros, 0, 6, 12, 24, 26… Des personnalités que l’on distingue, des individus guidés et animés par l’envie de trouver La Sortie. Un mantra leur donne la force d’avancer, des paroles répétées encore et encore, tournant en boucle, insufflant la détermination dont ils ont besoin. Tout va si vite que finalement, nous réalisons que l’amitié et la confiance ne sont que peu de choses, que nous sommes tous des inconnus pour les autres...
« JE LA VOIS… TOUT PRÈS… SI PROCHE...»

Beksinski

La force des livres de Joseph réside sans doute dans la maîtrise du suspense et la manière dont les messages sont distillés. Bien que tout nous y prépare, je n’ai pas vu venir la fin. Un final en apothéose, presque deux en un d’ailleurs, vraiment bien trouvé et orchestré. Une fois de plus, toute cette mise en scène nous donne à réfléchir sur notre société et sur la place que nous y occupons. Nous constatons (surtout en ce moment…) que nos instincts primaires ont très facilement tendance à refaire surface, que lorsqu’il est question de survie plus rien d’autre ne compte… Joseph Kochmann nous livre un récit tristement humain, questionnant la déshumanisation dès lors que l’on plonge les individus dans l’inconnu. Les métaphores de notre époque sont nombreuses, disséminées de telle façon à nous faire réagir, à nous donner à voir. De la réflexion sur les numéros à l’anonymat en passant à celle sur les vêtements qui reflètent l’intérieur des gens, les images convoquées dans ce livre parlent à notre inconscient, à notre imaginaire. Qu’est-ce qui nous distingue les uns des autres si ce n’est les chemins que nous empruntons et la volonté dont nous pouvons faire preuve ? Peut-être pourriez-vous, vous aussi, rejoindre La Sortie… et qui sait, peut-être reviendrez-vous nous dire ce qui se cache derrière… 
« PAR OÙ ? »
Par où… Paroù… Par… P… Seul l’écho lui répondit.
3 raisons de lire La Sortie :
- Une histoire décalée qui fait réfléchir
- Une ambiance sombre et un univers sanglant
- La surprise de la fin