Editeur : BragelonneNombre de pages : 376Résumé : Ombre, univers peuplé de magie, et Rive, le monde tel qu'on le connaît, sont les deux reflets déformés d'une même réalité. Enora est unique : elle peut traverser d'un monde à l'autre. Lorsque sa famille est brutalement décimée par des assassins masqués, elle se réfugie au seul endroit où ses poursuivants ne peuvent l'atteindre. Au royaume d'Ombre, sur la terre de ses ancêtres. Là-bas, Ravenn, une princesse rebelle, fait son retour après neuf ans d'exil passés à chasser les dragons du grand sud. Sa mère, la reine, est mourante. Ravenn veut s'emparer de ce qui lui revient de droit : le trône d'Ombre. Et elle n'est pas la bienvenue.
- Un petit extrait -
« Ravenn eut un sourire dubitatif. Elle ne croyait pas les gens capables de changer. Que des personnalités évoluent, que certaines facettes se développent au détriment d'autres, que des objectifs différents se révèlent avec le temps, pourquoi pas. Mais un changement véritable ? Non. »
- Mon avis sur le livre -
J’ai très longtemps été une lectrice solitaire, qui dévorait livres sur livres dans son coin sans jamais en parler avec personne, sans jamais chercher à savoir ce que d’autres lecteurs pensaient de ces romans : je lisais, j’aimais, je n’aimais pas, et c’était tout. Et puis, j’ai découvert Livraddict et la blogosphère, et je suis enfin sortie de ma coquille : j’ai commencé à échangé avec d’autres lecteurs, j’ai ouvert mon blog … Et depuis quelques mois, je m’essaye aux lectures communes, et le moins que l’on puisse dire, c’est que j’adore ça (même si j’ai encore bien du mal à caler mon rythme de lecture avec celui de mon ou mes coéquipiers de lecture) ! C’est tellement sympathique de pouvoir échanger au fil de la lecture, partager nos impressions, questionnements, débattre sur tel ou tel point … Je pense vraiment que je n’aurai pas autant savouré ce roman si je ne l’avais pas lu en lecture commune ! Car désormais, il sera toujours associé au souvenir de ces conversations passionnées !
Le monde d’Enora éclate en morceau le jour de ses vingt ans : toute sa famille – frère jumeau compris – est massacrée par des assassins masqués, elle apprend l’existence d’un monde parallèle au nôtre et découvre par la même occasion qu’elle a le don d’ouvrir des passages entre les deux univers. Elle se réfugie alors au royaume d’Ombre avec Julian et Charly, deux frères l’ayant sauvé des griffes de l’Ordre, et fomente désormais sa vengeance : ceux qui ont tué les siens mourront. Mais il ne fait pas bon être la descendante du dernier Roi-Passeur en Ombre, et Enora devra ici aussi lutter pour rester en vie … Pendant ce temps, la princesse Ravenn, qui avait été exilée du royaume bien des années auparavant, revient afin de faire valoir ses droits d’héritière. Mais son retour et sa détermination à s’emparer du trône contrarient grandement son père, les magiciens et les prêtres, qui avaient déjà tout prévu afin de récupérer le pouvoir, pour l’instant transmis de mère en fille … Les deux jeunes femmes ne le savent pas encore, mais leurs destins sont liés, et c’est ensemble qu’elles combattront pour atteindre leurs objectifs respectifs …
Cela faisait tellement longtemps que ce roman dormait sur mes étagères (j’ai d’ailleurs un affreux trou de mémoire et suis totalement incapable de me souvenir comment et pourquoi il est dédicacé à mon nom alors que je n’ai encore jamais rencontré l’autrice) que je n’avais plus aucun souvenir du résumé … Pour moi, c’était juste un roman de fantasy écrit bien trop petit pour mon bien, mais qui m’intriguait chaque jour un peu plus. Vous imaginez donc ma surprise quand Enora a débarqué en moto, dans ce qui ressemblait trait pour trait à notre monde ! Plusieurs fois, j’ai vérifié que je ne m’étais pas trompée de livre, jusqu’à ce que notre pauvre Enora (qui, le jour de son anniversaire, se retrouve orpheline et privée de son frère jumeau) découvre l’existence d’Ombre, monde parallèle au nôtre, où va finalement se dérouler la majorité de l’intrigue. Autant le dire tout de suite, j’ai été conquise par cette idée d’univers miroirs, et plus encore par le principe des Noirs-Portraits : « pour chaque personne née en Ombre, une autre voit le jour en Rive », et ces deux individus sont liés, leurs parcours de vie seront similaires malgré les différences entre les mondes, et le jour où l’un d’eux vient à mourir, l’autre mourra également … J’aime vraiment beaucoup cette façon de lier inexorablement les deux mondes !
Plus globalement d’ailleurs, j’ai beaucoup aimé ce roman. Quelques détails ont éloigné le coup de cœur, j’y reviendrais tout à l’heure, mais le moins que l’on puisse dire, c’est qu’à chaque fois que j’ouvrais le livre, celui-ci me captivait tant et bien que je ne voyais plus le temps passer … Je me suis ainsi retrouvé bloquée sur la première marche de l’escalier, car je voulais « terminer le paragraphe » avant de monter, mais ai finalement lu plusieurs chapitres d’affilée (jusqu’à ce que petit frère ait besoin de monter) ! J’avais ce besoin irrésistible de savoir ce qui allait arriver aux personnages, car je me suis vraiment attachée à eux et craignais profondément pour leur vie : Ravenn a beau être rebelle et rusée, il y a tellement de personnes qui fomentent contre elle qu’on a vraiment peur que l’une d’elles parvienne finalement à l’atteindre, et Enora est tellement dévorée par le chagrin et la vengeance qu’on a peur qu’elle ne se méfie pas assez des dangers qui l’entourent … Et puis il y a le petit Lïam, Charly et Julian, que j’ai vraiment beaucoup aimé également. Ce que j’aime beaucoup, finalement, c’est qu’il n’y a ni véritable héros ni grand méchant, uniquement des hommes avec leurs qualités et leurs défauts, leurs forces et leurs faiblesses : ils sont nuancés, ils sont faillibles, et cela ne les rends que plus attachants encore !
Mon seul véritable regret, finalement, c’est le manque de surprise et d’enjeu : plus le temps passait, plus la mise en place s’éternisait, et plus le dénouement devenait prévisible … J’aurai vraiment aimé que l’autrice aille plus loin que le simple couronnement de Ravenn, plus loin que la quête de vengeance d’Enora : ça, on s’y attend depuis le tout début. Lorsque j’ai tourné la dernière page, les mots « tout ça pour ça ?! » m’ont traversé l’esprit. C’est un peu comme gravir longuement et douloureusement une montagne, pour tomber sur un mur qui bouche la vue : tant d’efforts pour si peu de résultats. Tant de pages pour une histoire qui me laisse tout de même sur ma faim, alors que j’ai pris tellement de plaisir à la dévorer. Je quitte les personnages, ces amis de quelques jours, avec un douloureux sentiment d’inaccompli, comme si leur histoire était terminée alors qu’elle ne fait finalement que commencer. C’est un déchirement tel que j’ai cru qu’il manquait une bonne centaine de pages à mon exemplaire : ça ne peut pas se terminer comme ça, alors qu’il y a encore tellement de questions en suspens ! J’espère vraiment que Les Illusions de Sav-Loar, que je compte me procurer lors des Imaginales, m’apporteront quelques éléments de réponse !
En bref, vous l’aurez bien compris, ce fut une très belle lecture, mais pas un coup de cœur, la faute à une intrigue qui met du temps à se mettre en place et à un dénouement un peu trop prévisible. Je suis tombée sous le charme de l’univers créée par l’autrice, et plus encore sous celui des personnages, et ce fut un tel plaisir que de les accompagner dans leurs quêtes respectives (qui finissent par se rejoindre et s’entremêler, parce que, finalement, nous sommes tous liés les uns aux autres) ! La plume de Manon Fargetton est vraiment belle, c’est un véritable régal ! A travers ce roman, l’autrice explore la question du pouvoir, de l’injustice aussi. Elle nous raconte également une belle histoire d’amour et d’amitié, de courage et de confiance. C’est un récit riche en actions, en rebondissements, mais plus riche encore en émotions : on est tellement immergé dans l’histoire que notre cœur vibre à l’unisson avec ceux des personnages, et on souffre quand ils souffrent, on exulte quand ils exultent, on doute quand ils doutent. Tant et si bien qu’on en oublie tout le reste, qu’on en oublie même nos réserves sur l’intrigue, car une seule chose compte finalement : marcher à leurs côtés, et vivre par procuration toutes leurs aventures. Un beau récit de fantasy que l’on ferme avec une bonne pointe de tristesse car c’est déjà fini …