"Je ne veux pas d'enfants"
Depuis l'adolescence, nombreux sont ceux qui ont entendu cette phrase de ma part. Moi, qui petite, disais vouloir "quatorze enfants" alors que j'étais enfant unique. Alors, comment suis-je passée de quatorze à zéro ?
Mon expérience personnelle et l'environnement dans lequel j'ai grandi, ont fortement influencé ce choix. Notamment parce que mon père a grandi dans une famille d'accueil et que j'ai coutoyé les personnes qui ont été élevés a ses côtés. J'ai vu plusieurs profils et surtout, l'impact que leur enfance avait eu sur leur vie. Si mon père l'a très bien vécu et a su tirer de ces expériences des éléments qui l'ont rendu plus fort ; d'autres ont sombré dans la dépression, l'alcool, la drogue... Mais, comment ne pas comprendre ces personnes qui se sont senties abandonnées par leurs parents, dans un moment de leur vie où ils étaient en train de se construire. En prenant du recul sur ce qu'avaient pu vivre ces personnes, dont mon père, j'ai ressenti beaucoup d'admiration pour mes "grands-parents". Pour eux, et toutes ces familles qui accueillent des enfants qui ne sont pas les leurs, qui les aiment, les élèvent, et essaient de leur donner une vie que leurs parents n'ont pas pu leur donner.
Alors non, je ne voulais pas d'enfants. Je ne voulais pas faire "un malheureux" de plus sur cette terre, alors qu'il y a tant d'enfants dont les parents ne peuvent pas s'occuper dans le monde et qui attendent de l'amour. Et progressivement, cette réflexion s'est construite avec d'autres problématiques. La peur que mon enfant ait la même maladie que moi, qui m'a fait souffrir adolescente. La peur que, comme beaucoup d'enfants, il soit victime de harcèlement. La peur qu'il vienne un jour me reprocher de l'avoir mis au monde, comme je l'ai moi-même reproché à mes parents. La peur de voir son éducation et ses bonnes manières s'envoler au contact d'autres enfants éduqués différemment. La peur de lui laisser en héritage une planète avec un état climatique plus que difficile...
Tous ces questionnements, sont venus confirmer mon choix de ne pas vouloir d'enfants. A nouveau, je ne voulais pas faire "un malheureux" de plus sur cette terre. Mais si je ne souhaitais pas mettre au monde un enfant, j'avais tout de même envie d'en élever un. Je ne pourrais jamais nier l'amour que je porte aux enfants. Mon "envie", mon "ambition", mon "choix", parce que je ne saurais pas trop comment l'appeler, était alors l'adoption ou de devenir assistante familiale.
L'instinct maternel
Il y a, aujourd'hui, un grand débat sur l'instinct maternel. Pourtant, ce que je ressens depuis des années, je ne saurais comment l'exprimer autrement qu'en utilisant cette expression. Déjà lorsque j'avais une dizaine d'année, on me voyait toujours avec des tout petits. J'aime le contact avec les enfants, les aider, leur apprendre des choses, leur donner de l'amour, les voir grandir. Si bien que le métier qui me correspond le mieux, est à leurs côtés. Je n'ai ni frères, ni sœurs, ni neveux, ni nièces, qui m'auraient permis de développer cet amour pour les enfants ; je ne saurais expliquer d'où ça vient.
Mes vacances, pendant près de sept ans, ont d'ailleurs été consacré aux enfants, comme animatrice. Un travail que j'ai fait bénévolement pendant quatre ans, par pur passion. Au fil du temps, c'est même apparu comme un besoin pour moi, de donner du temps aux enfants. Et aujourd'hui, j'aimerais qu'ils soient de nouveau au cœur de ma vie professionnelle.
Je savais qu'il y avait une part de moi qui voudrait des enfants un jour, la part "naturelle" et "maternelle". Elle se confrontait aux raisons rationnelles mentionnées plus haut, qui prenaient le dessus. En me faisant culpabiliser moi-même, je partais du principe qu'il fallait que j'étouffe cette part d'envie d'avoir un enfant. Chaque raison de ne pas vouloir d'enfants, était une raison de trop, une raison de plus pour confirmer ce choix. Et en me disant que je pensais plus au bonheur futur de cet enfant qu'à mon envie égoïste d'en avoir un, je faisais assurément le bon choix.
Une relation passionnée : le déclic.
Me faire culpabiliser n'était assurément pas la solution et signifiait sans aucun doute qu'il y avait bien une faille dans ma réflexion. Et c'était le cas, puisque j'ai changé d'avis. Ou plutôt, j'ai décidé de suivre mon envie maternelle, mon instinct. Le déclic, ce fauteur de troubles, il s'appelle l'amour.
Lorsque je me suis mise avec mon conjoint, il a très vite été question d'avoir un enfant. Nous étions tellement fusionnels et notre amour débordait tant l'un pour l'autre, que nous ressentions le besoin de partager cet amour. Le partager, ou plutôt, créer quelque chose à partir de cet amour : donner la vie. A partir de ce moment-là, j'ai décidé d'accepter mes peurs concernant ce projet, sans les laisser s'y interposer. Je ne voulais plus être dans un extrême ou dans l'autre, mais concilier ces deux parties de moi : mes peurs et mon envie.
Aujourd'hui, je sais que mon choix est le bon, parce qu'il m'appartient. Je sais aussi qu'il a été réfléchi, questionné, retourné dans tous les sens. Mes craintes réapparaîtrons très certainement, mais je sais qu'elles sont le fruit de mon inquiétude pour mon enfant. Ces incertitudes me pousseront toujours à choisir le meilleur pour lui et l'éducation qu'il aura sera d'avantage réfléchie grâce à ce chemin personnel parcouru.
Il s'agit là de mon expérience, de la manière la plus sincère possible. Elle n'est qu'un simple témoignage et non pas une argumentation ou un jugement pour pousser quiconque à avoir ou non, des enfants.
Et vous, que ressentez-vous face à ce projet de vie ? Avez-vous déjà ressenti de la culpabilité par rapport à ce choix ?