Il y a un point commun entre les victimes d’un attentat terroriste : elles ont eu le malheur d’être au mauvais endroit au mauvais moment. Qu’ils soient pères ou employés, qu’elles voyagent pour affaire ou pour rejoindre leur famille, ces inconnus ont vu leur destin à jamais uni par le souffle d’une déflagration.
Le silence d’après nous raconte précisément l’instant où ces vies basculent et où de parfaits inconnus, présents dans le même train pour de multiples raisons, deviennent des victimes. Mortes ou vives, mutilées ou détruites psychologiquement, nous suivons les quelques heures qui précèdent le drame sans savoir dans quelle case chacun des personnages sera rangé. Et puis il y a le fou, le meurtrier, le djihadiste qui croit en la justesse de son acte monstrueux. Lui aussi on le suit dans ses dernières heures, on le voit évoluer au milieu de ses futures victimes. L’avant tient une grande part dans ce roman, l’auteur s’attache à nous dépeindre avec précision qui étaient Jeff et Holly, Nick et sa famille, Noman l’agent du train, Rhona, Felicity et Agata, réunis dans le 10h35 qui relit Manchester à Londres. Plus que des noms sur des visages, il nous fait pénétrer dans leur intimité, leurs désirs et leurs attentes afin que l’on mesure bien l’ampleur du massacre et des vies gâchées par la folie d’un seul homme.
La seconde partie est traitée sans pathos. Il ne faut pas plus de quelques lignes pour que tout bascule puis l’obscurité remplace la lumière. Un long tunnel de souffrance et d’ahurissement. A cet instant, plus rien ne sera jamais plus comme avant, on ne connait pas encore la liste des morts et celle des survivants, il n’y a que des corps éparpillés ça et là, des plaintes et des plaies.
Troisième acte : l’après. Il est consacré à la souffrance des survivants et des familles des victimes mais n’occulte pas la douleur et l’immense honte teintée de colère éprouvée par les proches du terroriste. Chacun doit apprendre à survivre au pire et puiser là où il peut la force et l’énergie de continuer à se battre. Le courage et la dignité de ces anonymes qui ont perdu un fils, une femme, une mère, un bras ou des jambes force évidemment le respect.
Il était contre-nature et blasphématoire que les femmes se comportent comme si elles étaient les égales des hommes. Il fallait mettre un terme à cette abomination sans plus attendre. Et instaurer des lois dignes de ce nom. Voilà quelque chose que les Saoudiens comprenaient. Des règles pour chacun : hommes et femmes.
Mais…
Mais je me pose la question : pourquoi ce livre ? A quoi sert-il ? Contrairement à Khalil de Yasmina Khadra, Jake de Bryan Reardon ou encore Il faut qu’on parle de Kevin de Lionel Shriver, il ne bouscule pas, n’interroge pas et ne choque pas non plus. Il est évident, l’histoire coule de source avec un enchaînement d’une logique implacable. Il y a les victimes d’un côté, le bourreau de l’autre. Il y a une vie normale avant et une vie détruite après. Alors pourquoi ce livre ? Pour s’offrir des émotions faciles ? Si c’est juste ça, le projet littéraire est louable mais je ne suis pas le bon public. A vrai dire, je me suis même franchement ennuyée dans ce livre sans surprise. L’écriture sèche, fluide et factuelle n’est pas parvenue à me rendre les personnages suffisamment sympathiques pour que leur seul devenir suffise à me faire vibrer. A réserver donc aux lecteurs capables d’une forte empathie pour les victimes. Ceux au cœur de pierre comme moi qui ont besoin de plonger davantage dans le mal pour éprouver quelque chose à l’encontre des victimes, passez votre chemin, j’ai beaucoup mieux pour vous dans les titres cités précédemment.
L’ESSENTIEL
Le silence d’après
Cath STAINCLIFFE
Editions Stéphane Marsan
Publié le 13/06/2018
320 pages
Genre : drame psychologique
Personnages : Saheel le terroriste et ses victimes : Jeff et Holly, Nick et sa famille, Noman, Rhona, Felicity et Agata…
Plaisir de lecture :
Recommandation : moui
Lectures complémentaires : Khalil de Yasmina Khadra, Jake de Bryan Reardon ou encore Il faut qu’on parle de Kevin de Lionel Shriver
RÉSUMÉ DE L’ÉDITEUR
Les passagers qui embarquent dans le train de 10 h 35 reliant Manchester à Londres ont tous une bonne raison d’espérer des lendemains meilleurs. Jeff se rend à un entretien d’embauche après des mois de chômage, Holly s’offre un peu de répit, Nick se rend à un mariage avec toute sa famille, Meg et sa compagne partent en randonnée, Caroline tente de se soustraire à sa vie compliquée, et Rhona espère rentrer le soir même pour retrouver sa fille. Huit solitudes se côtoient à bord de ce train. Et parmi elles, celle de Saheel, qui peine à trouver sa place dans une société dans laquelle il ne se reconnaît plus. Avec son sac bourré d’explosifs, Saheel n’attend plus rien de l’avenir, il attend le terminus.
« Éprouvant et profondément humain. Un vrai coup de massue.» Ian Rankin
« Impitoyable et palpitant. » Daily Telegraph
TOUJOURS PAS CONVAINCU ?
3 raisons de lire Le silence d’après
- Si vous avez envie d’un livre bouleversant (pour certains)
- Parce que c’est un roman sur le terrorisme qui met l’accent sur les victimes
- Parce que ça se lit facilement
3 raisons de ne pas lire Le silence d’après
- Si vous cherchez de l’inattendu
- Si vous aimez être bousculé
- Si vous avez besoin d’une plume très empathique envers ses personnages pour être vous-même touché par leur sort
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