Le jardin de Belmaray • Elizabeth Goudge

jardin Belmaray Elizabeth Goudge Le jardin de Belmaray • Elizabeth Goudge

Éditions Le livre de poche, 1968 (377 pages)

Ma note : 15/20

La première phrase

" De sa fenêtre, Harriet regardait voler les mouettes ; lorsqu'elles remontaient la rivière, cela indiquait le mauvais temps sur la mer et, en s'éveillant ce matin de bonne heure, dans le silence, elle avait vu le ciel embrumé et compris que la longue période de beau temps allait prendre fin avec un vent violent. "

Mon avis ...

Ma rencontre avec Elizabeth Goudge remonte à l'été dernier : j'avais été envoûtée par la plume de la romancière anglaise en parcourant Le pays du dauphin vert. Il y a quelques mois maintenant, j'ai eu la chance de tomber par hasard sur Le jardin de Belmaray, dans une boîte à livres. Ni une ni deux, j'ai sauté sur l'occasion et suis ravie d'avoir pu ainsi renouer avec les ingrédients qui avaient fait pour moi toute la saveur du Pays du dauphin vert. Cette lecture fut à nouveau une belle surprise, réconfortante à souhait.

Dès les premières pages, Elizabeth Goudge nous prend par la main pour nous conduire vers un charmant village du Dorset. John Wentworth, pasteur, vit au presbytère avec sa famille : Daphné, sa femme, et leurs trois filles (Pat, Winkle et Margary). Harriet, une tante infirme, et Miss Wentworth, une vieille dame excentrique, viennent compléter un tableau où tout ne semble pas si parfait. John et Daphné connaissent des difficultés de compréhension dans leur couple, et leurs filles font les quatre cents coups dans leur école. C'est alors qu'un curieux voyageur pose ses valises au village. Michael Stone, un homme au passé trouble, risque bien de réveiller de vieux fantômes.

Quel bonheur que de retrouver la plume si douce et bienveillante d'Elizabeth Goudge. Le roman prend son temps pour démarrer, il faut parfois s'armer de patience, mais j'apprécie plus que tout cette romancière pour ce que peuvent dégager ses romans : un amour profond pour les êtres, pour la nature, pour les joies simples. Ses personnages sont comme nous, pétris de défauts. John Wentworth est ici un homme faible, qui manque de courage. Daphné se montre orgueilleuse, froide et peu accessible. Mais c'est aussi ce qui fait qu'on finit par s'attacher à eux ! Plus que tout, Elizabeth Goudge offre à ses personnages un pouvoir certain d'introspection : on arrive à suivre leurs questionnements, leurs pensées, leurs souffrances pour les voir peu à peu évoluer, grandir. Elizabeth Goudge était croyante (je l'avais aussi fortement ressenti à ma lecture du Pays du dauphin vert), ce qui peut rebuter tant ses romans sont imprégnés de spiritualité. Pourtant, tous ses personnages ne croient pas en Dieu, ne se jugent pas, se montrent respectueux. C'est aussi ceci qui me plaît beaucoup : j'ai à nouveau dégusté ce roman comme un carré de chocolat.

Vous l'aurez compris, Elizabeth Goudge met davantage l'accent sur une atmosphère, sur les relations (complexes) entre ses personnages, plutôt que sur une véritable intrigue. J'ai pourtant à nouveau été séduite. J'ai aimé suivre John Wentworth dans ses doutes, j'ai adoré me questionner sur la part de mystère qui entoure Daphné. Nul doute que je me plongerai à nouveau un jour dans un autre roman d'Elizabeth Goudge.

Extraits ...

" Elle s'arrêta en rougissant violemment.
- Nous avons le droit de garder pour nous nos épreuves personnelles, dit Michael. Elles font partie de la maison de notre vie ; on n'entre pas dans les demeures des autres à moins d'y être invité. "

" Elle se retourna au milieu du pont et lui fit un signe de la main. Il la suivit des yeux, et les paroles d'un poète irlandais lui revinrent à la mémoire : "Mes pensées la suivent, et c'est de cette manière que mon âme la suivrait, d'un pas léger, avec bonheur, et je serais délivré de tous mes grands tourments." "