Aires de Marcus Malte

Par Krolfranca

Aires

Marcus Malte

Zulma

Janvier 2020

496 pages

Et bien, ça y est, je l’ai lu ce fameux dernier roman de Marcus Malte. Étonnant, détonnant, déroutant (c’est le cas de le dire, j’aurais pu écrire dé-routant). On n’y entre pas facilement, il faut d’abord passer le cap du premier chapitre écrit dans une espèce de Novlangue dont je ne suis pas friande.

Ensuite, l’auteur tente de nous perdre en multipliant les personnages, même s’ils sont reconnaissables par la marque de leur voiture (mais moi les voitures, je n’y connais rien, seule la couleur me fait reconnaître un véhicule… heureusement Marcus Malte a ajouté le prix, ça situe le niveau social), il n’empêche qu’il n’est pas simple de suivre leur parcours. C’est un véritable puzzle que le lecteur doit reconstituer pour assembler les pièces des variations Malte.

Et enfin, il perturbe le lecteur en incorporant à son texte des extraits radiophoniques, des extraits de cahiers, des jeux de mots à tout-va, des extraits de chansons, des slogans, des spots publicitaires et même si tout cela s’intègre parfaitement dans l’ensemble et prend tout son sens, cela déstabilise.

Et pourtant… et pourtant, j’ai toujours eu envie de reprendre ma lecture, de retrouver les personnages, de déguster le style inimitable de l’auteur, j’y ai pris un plaisir fou.

Chaque chapitre se lit comme une nouvelle, tout en s’inscrivant dans un ensemble complètement cohérent. J’avoue que j’ai été ébahie et admirative tout au long de ma lecture. C’est un travail d’orfèvre que Marcus Malte nous livre là, un texte hors normes et inclassable mais terriblement séduisant.

Et pourtant… et pourtant, le message est on-ne-peut-plus pessimiste, c’est sombre, c’est noir, c’est caustique, c’est cruel. Alors pourquoi ai-je commencé par « et pourtant » puisque c’est tout ce que j’aime…

A travers les pensées de chaque automobiliste, Marcus Malte dénonce les travers de notre société avec brio et humour. C’est succulent. On en prend plein la tête, plein les tripes, plein le cœur, on rit, on sourit, on grince des dents, on suffoque, on jubile.

Pas glop, pas glop sur la vision de notre monde (mais peut-on être résolument optimiste aujourd’hui ?) mais glop glop (petite référence que seuls les lecteurs du roman comprendront) sur la qualité littéraire du texte et le plaisir de lecture.