Le cahier d’absence
de Frédéric DARD
Nouveau billet pour ce rendez-vous hebdomadaire, initié par Aurélia du blog Ma Lecturothèque : les premières lignes d’un livre que j’ai lu et apprécié, ou qui se trouve toujours dans ma PAL.
Si vous souhaitez participer aussi, n’hésitez pas à mettre un commentaire avec le lien de votre article pour que je puisse vous ajouter à la liste.
223 pages – Éditions Fleuve Noir – Paru le 01/09/1992
Il y avait plusieurs personnes avant elle dans mon salon d’attente. Je l’ai remarquée tout de suite, à cause du regard qu’elle m’a jeté lorsque j’ai ouvert la porte au premier client.
Bien qu’il y eût des fauteuils disponibles, elle avait choisi une chaise et s’y tenait bien droite, les mains à plat sur sa jupe tirée. En général, quand un malade vient chez vous pour la première fois, il vous regarde avec une certaine inquiétude, cherchant confusément à deviner si sa confiance est justifiée, ou si l’ami qui vous l’envoie ne l’a pas abusé. Dans le regard de la jeune fille, au contraire, il y avait comme un défi tranquille. Chaque fois que j’ouvrais la porte de mon cabinet, je trouvais ses yeux calmes braqués sur moi et j’éprouvais un vague malaise.
Enfin, ç’a été son tour.
Lorsque je reçois un malade, je ne dis jamais un mot. Simplement je le regarde et il se lève. Une fois que nous sommes seuls, je deviens brusquement cordial afin de le mettre en confiance. La confiance, c’est la clé de notre profession.
La plupart des patients ont tendance à vous taire ce qu’il y a de plus intéressant dans leur cas. Ils ont déjà un diagnostic personnel et, au fond, ne viennent vous voir que pour vous le faire ratifier. Les gens croient toujours savoir ce dont ils souffrent et ils doutent de vos capacités si vous leur laissez entendre qu’ils se sont trompés.
Lorsqu’elle est passée devant moi, tandis que je lui tenais la porte ouverte, j’ai respiré son parfum de bazar. Il la situait socialement beaucoup mieux que son petit tailleur fatigué. De près, elle me parut très jeune. C’était une fille de taille moyenne, bien faite ; des cheveux châtains et les yeux d’un bleu si limpide que je ne me souvenais pas en avoir vus jamais de plus clairs. Une petite croix et une main de fatma, curieusement associées au bout d’un cordonnet, brillaient sur son polo noir.
J’ai contourné mon bureau sur lequel trônait la photographie de Juliette.
– Asseyez-vous, mademoiselle !
Résumé:
Comment tombe-t-on amoureux ? D’un coup, d’un seul, c’est bien connu. Et, à ce moment-là, plus rien d’autre ne compte. Ni la différence d’âge, ni le statut social, ni même la famille.
Il n’y a qu’une chose alors qui pourrait séparer les amants : la mort. À moins que ce ne soit le crime.
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