Profession Profileuse
de Carine HUTSEBAUT
Nouveau billet pour ce rendez-vous hebdomadaire, initié par Aurélia du blog Ma Lecturothèque : les premières lignes d’un livre que j’ai lu et apprécié, ou qui se trouve toujours dans ma PAL.
Si vous souhaitez participer aussi, n’hésitez pas à mettre un commentaire avec le lien de votre article pour que je puisse vous ajouter à la liste.
180 pages – Édition Le Cherche Midi – Paru le 01/01/2000
Je suis profileuse et je fais, paraît-il, un drôle de métier. Je ne l’ai pas vraiment choisi, c’est un peu lui qui m’a choisie. Le profiling criminel est une pratique pluridisciplinaire qui trouve ses origines dans la médecine légale. Il demande, au minimum, des connaissances éprouvées en criminologie et en psychologie, ainsi qu’une formation aux méthodes d’investigation médico-légales. Cependant, le profiling n’a, à ce jour, pas encore accédé au rang de « profession » reconnue.
Le profiling comprend deux grandes catégories, deux méthodes : le profiling inductif et le profiling éducatif. Pour décrire brièvement le premier, j’emprunterai cette phrase à Marcus Aurelius : « N’accordez pas trop de foi aux premières impressions. »
Et pour définir le second, je citerai, du même auteur : « Regardez en dessous de la surface des choses : ne laissez jamais échapper leur qualité intrinsèque. »
Le profiling se situe donc au carrefour de nombreuses disciplines et comprend plusieurs points : détermination des faits, analyse médico-légale, typologie, reconstitution du crime, examen des différents types de blessures, profil de la victime et victimologie, mode opératoire de l’agresseur, signature du crime, motivations et caractéristiques psychologiques du criminel, techniques et stratégies d’investigation.
Je m’améliore au contact des criminels ; plus je contemple leur noirceur, plus j’aide le monde à s’en débarrasser. Petit à petit, l’opinion publique prend conscience que ce n’est pas en fuyant la réalité, l’incroyable proflifération des tueurs en série et des pédophiles, que le phénomène cessera d’exister. Il y a quinze ans – quinze ans trop tôt peut-être, si je tiens compte de l’hostilité à l’encontre de ma toute nouvelle profession – j’ai pris conscience qu’existait un énorme tabou : personne ne voulait s’occuper des criminels coupables des crimes les plus atroces. On se concentrait surtout sur les victimes, dans la presse, chez les thérapeutes, ainsi que dans le milieu judiciaire. On avait à coeur de consoler les uns et d’enfermer les autres, sans réaliser que les uns soignaient leur douleur, mais que les autres restaient intacts et ressortaient à l’identique. La théorie des psys (et ils n’étaient pas les seuls) était de penser qu’il fallait se pencher sur les victimes et non sur les agresseurs. C’était prendre les choses à l’envers. Une victime, par définition, parce qu’elle n’est atteinte d’aucune pathologie, d’aucun dysfonctionnement, mais s’est « seulement » trouvée sur le chemin d’un psychopathe, n’est, en principe, victime qu’une fois dans sa vie. Sauf malchance particulière, son état de victime est un accident et non un effet de la constitution de sa personnalité. L’agresseur, quant à lui, ne l’est pas par hasard. Il est acteur, pas spectateur. Il n’a croisé la route de personne, mais erre dans la société en éternel prédateur. Le maillon manquant, jusqu’ici, était de comprendre pourquoi il agissait ainsi et, par la même occasion, comment l’empêcher de recommencer. On ne peut lutter contre un fléau sans le connaître parfaitement. S’intéresser à l’humain, c’est observer ce qu’il a de beau mais aussi de plus laid. Personnellement, c’est l’humain dans sa globalité qui m’intéresse. Et c’est à sa part d’ombre, celle dont personne ne veut, que j’ai choisi de consacrer ma vie…Mes activités sont multiples. Je me forme en permanence, car les criminels évoluent en même temps que la société. Je lis des articles, des livres sur le sujet, je suis des cours de profiling dans le monde entier, et notamment aux États-Unis, je rencontre les criminels en prison, j’étudie leur cas, je rédige des expertises et des rapports pour les juges d’instruction ou les avocats, je témoigne auprès des tribunaux, aussi bien pour des agresseurs que pour des victimes, je reçois en traitement, à mon cabinet de thérapeute, criminels et victimes d’agression.
Résumé:
Carine Hutsebaut est une jeune femme pas tout à fait ordinaire. Elle est profileuse de criminels. Tueurs en série, violeurs et surtout pédophiles, tous ceux que la société condamne sans appel l’intéressent, et ce n’est ni pour les défendre ni pour les absoudre, mais pour comprendre leur psychologie et par conséquent aider à élucider des crimes qui répondent tous à certains rituels. Plus que son diplôme de criminologue, Carine Hutsebaut revendique celui qui n’existe pas : victimologue. Car à tout coupable correspond un profil de victime, et c’est aussi dans le récit des parents de victimes que, après ses heures dans les parloirs des prisons ou à son cabinet de thérapeute, elle cherche la clé des affaires. Van Geloven fut son premier sujet examiné. L’assassin qui poussa le président du tribunal à ordonner le huis-clos, par égard pour la sensibilité de l’assistance. Lors de l’affaire Dutroux, elle a établi dans la presse un profil précis du coupable mais personne n’en tint compte. Car c’est aussi le système qu’elle dénonce, ses mécanismes rigides qui freinent les enquêtes ; la formation de la police, trop classique, nombre d’enquêteurs considérant qu’un « monstre » doit avoir le physique de l’emploi ! À la demande des familles de victimes ou de coupables, de la justice, de la police, et jusqu’au FBI, Carine Hutsebaut cherche, réfléchit et compare. Sa méthode est simple : écouter, sans frémir ni juger. Il y a quinze ans qu’elle a dit non à la fatalité. C’est une passionnée de l’âme humaine, autant qu’une femme exerçant un étrange métier, qui s’adresse aujourd’hui à nous.
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