Opus 77 - Alexis Ragougneau

Opus 77 - Alexis Ragougneau

Présentation
" Un jour, dans mille ans, un archéologue explorera ton refuge. Il comprendra que l'ouvrage militaire a été recyclé en ermitage. Et s'il lui vient l'idée de gratter sous la peinture ou la chaux, il exhumera des fresques colorées intitulées La Vie de David Claessens en sept tableaux. Je les connais par cœur, ils sont gravés à tout jamais dans ma médiocre mémoire, je peux vous les décrire, si vous voulez faire travailler votre imaginaire :
L'enfant prodige choisit sa voie.
Il suscite espoirs et ambitions.
Le fils trébuche, s'éloigne, ressasse.
Dans son exil, l'enfant devient un homme.
Le fils prodigue, tentant de regagner son foyer, s'égare.
Blessé, il dépérit dans sa prison de béton.
Mais à la différence des tapisseries de New York, ton histoire est en cours ; il nous reste quelques tableaux à écrire, toi et moi, et je ne désespère pas de te faire sortir un jour du bunker. La clé de ton enclos, de ta cellule 77, c'est moi qui l'ai, David. Moi, Ariane, ta sœur. "

Avis
Ariane, la narratrice, est une pianiste internationale issue d'une famille dans laquelle la musique tient une place importante. Elle nous raconte l'histoire de sa famille, non pas ce qui l'unit mais ce qui sépare. Le père nommé Claessens dans le roman était un grand pianiste avant de devenir le chef d'orchestre de l'OSR, la mère est une cantatrice israélienne et le frère David devenu contre toute attente un violoniste.
Tout ce petit monde pourrait constituer la famille idéale, belle et riche, sans problème (apparent) mais l'image sans tâche a un revers moins reluisant.

Les enfants, Ariane et David, ont eu une mère absente et névrosée et un père absent et exigeant. Ils gravitent dans cet univers de la musique où rien n'est laissé au hasard, le travail est l'activité principale, et où l'on scrute vos moindres mouvements, analysant chaque gestuelle et chaque choix comme celui fait par Ariane lors de l'enterrement de son père.

Cette narratrice qui n'épargne rien au lecteur tant sa virtuosité que son manque de pudeur et de modestie, s'en sort pas trop mal; à l'inverse de son frère qui après un événement (qui tient lieu de fil conducteur) s'est retiré du monde. Ariane énumère les faits comme on lance les pièces d'un puzzle, il appartient au lecteur de tout mettre dans l'ordre et de tenter de trouver un but à tout ce déballage de sentiments et de références musicales.

Je n'ai pas su, malgré cette belle écriture, m'immerger dans ce monde de la musique classique. L'auteur a su "défendre" son univers mais ne m'a pas touché comme il l'aurait certainement voulu. J'en retiens une fragilité de ces êtres ne vivant que pour une chose, élevant leur art au dessus de leur vie.

Lu dans le cadre de ma participation au Prix Françoise Sagan 2020

Opus 77 - Alexis Ragougneau