Longtemps je me suis couché de bonheur - Daniel Picouly

Publié le 24 septembre 2020 par Nathalie Vanhauwaert

 Longtemps je me suis couché de bonheur   -   Daniel Picouly



Albin MichelParution : 19 août 2020Pages : 336Isbn : 978222644295Prix : 19.90 €
Présentation de l'éditeur
« "Longtemps je me suis couché à plusieurs. Chez nous on est au moins deux par lit. Pas étonnant ma mère a eu treize enfants." Proust serait fier de moi. Sa première phrase "Longtemps je me suis couché de bonne heure" n’est pas à la hauteur.» 
Orly, Cité Million, 1964. Un adolescent de quinze ans, pour l’amour d’une Albertine, plonge dans l’œuvre de Marcel Proust. Jusqu’à l’obsession. Autour de lui, se bousculent un Charlus égoutier, une Odette infirmière à domicile, une duchesse de Guermantes battant ses tapis à la fenêtre…. Rêve ou réalité, peu importe, quand il sera grand, il sera Proust.
Avec la verve et l’imagination qui ont fait le succès du Champ de personne, Daniel Picouly transpose l’univers de Marcel Proust dans sa banlieue d’Orly. Le récit profond et drôle d’une éducation sentimentale, hommage à l’école, à sa famille et à l’auteur de La Recherche. À tout ce qui a fait de lui l’écrivain qu’il est aujourd’hui.
Mon avis
1964 Orly "cité Million" .  Le narrateur issu d'une famille de treize enfants n'est pas nommé.  Est-ce Daniel ou Marcel ?  Il attend avec impatience les points de sa composition de fin de cycle de français, ce résultat est capital pour le passage en deuxième.
Capital car cela lui permettrait de se rapprocher de son "Albertine".
Albertine c'est la fille à la robe rouge rencontrée à la librairie, elle pose à la caisse et attire l'attention de la dame au chignon tenant la caisse.  "Proust, tu lis Proust à ton âge, mais c'est difficile."  "Oui mais nous sommes dans une bonne classe, nous", répond-elle.
Notre narrateur qui allait acheter une maquette d'avion, a lui aussi un peu par défi acheté un Proust "Le temps retrouvé".
Avec son copain Bala (fils d'une concierge qui organise des pots au feu littéraires) , ils vont parler d'Albertine, esssayer de la retrouver, de changer certains éléments de l'oeuvre de Proust.  Faut dire que Bala est atteint de "Proustologie aiguë", il ne lit pas Proust, il le dissèque.
Leur professeur de français Taquin leur sert Proust à toutes les sauces, il lui est arrivé quelque chose d'étrange.  Sa vache a disparu, entendez par là son cartable, les points tardent à arriver et un conseiller d'orientation est dans l'école.
Vous l'aurez bien compris c'est de Proust que l'on parle dans ce roman.  Le passage de la rencontre d'Albertine est magistral (pp137/138). Il s'y dégage beaucoup d'humour, de très belles références littéraires, mais la notion du temps si chère à Proust a pesé pour moi à la lecture.  L'écriture est magnifique mais il faut bien se l'avouer, il ne se passe pas grand chose, trop de digressions à mon goût qui reflète bien l'ambiance de ces années-là dans la cité, les rêves des habitants.   J'ai malheureusement déclaré forfait aux deux tiers du roman ... préférant partir ailleurs à la recherche du temps perdu.
Un roman qui conviendra aux amateurs de Proust, l'idée est originale, transposer cet univers dans une cité de HLM.  
Ce n'était probablement pas le bon moment pour moi.
Ma note : 6.5/10
Les jolies phrases
Chez moi, on dit que les pauvres ne doivent pas se vanter d'être heureux, sinon on risque de leur taxer le bonheur.
En amour, on devrait faire italien première langue.
Dans la loge, les Bala organisent chaque avant-dernier vendredi du mois un "pot-au-feu littéraire et musical", dont il faut être sous peine de n'être pas. 
Bala en est convaincu.  Tout ça parce qu'il est imprenable sur Proust.  Et imprenable parce qu'il déteste Proust.  C'est un cas paradoxal de proustophobie aiguë : il ne lit pas Proust, ne le lira jamais, mais il étudie, dissèque tout ce qui s'écrit sur Proust, pour le plus pur plaisir de clouer le bec au premier qui prétend l'avoir lu.  C'est son plaisir.  Bala est un cochon truffier qui renifle le proustien frelaté à son parfum " fat, chic et snob".
Ma pauvre ! Tu es partie pour trois mille pages et à la fin tu n'auras appris qu'une seule chose : la vie, c'est compliqué.
Le hasard.  C'est le plus important dans une première rencontre.  Surtout le hasard qui n'en est pas un, mais qui doit en avoir les apparences.  Parmi elles, le détachement.  Il faut le soigner.  Ne rien laisser percer de ce qui bouillonne à l'intérieur.  Paraître étanche.  Le couvercle bien vissé. À peine un léger toupet de suffisance en soupape, pour ne pas exploser.  Albertine ! Où est-elle ? Je l'ai encore perdue à force de jouer à la cocotte-minute.
La rencontre d'Albertine pp137-138  magistral !