"Au plus froid de l'hiver les porcs-épics se serrent.
Ils cherchent à se réchauffer.Mais finissent par se piquer.Alors ils s'éloignent jusqu'à ce qu'ils aient froid.Alors ils se serrent et à nouveau s'éloignent.Se serrent, s'éloignent, se piquent, ont froid.Ils passent la saison à vivre en accordéon.Les hommes sont pareils et pas seulement l'hiver."
Ces huit phrases, chaque fois illustrées d'une gravure en vis-à-vis, constituent le début de l'album petit format cartonné "Le porc-épic de Schopenhauer" d'Alice Brière-Hacquet et Olivier Philipponneau qui y a utilisé le procédé de l'estampe japonaise (Editions 3œil, collection "Philonimo", 32 pages). L'histoire, inspirée du philosophe du XIXe siècle, se poursuit chez les humains et présente la solution trouvée pour "aimer sans se piquer". Un plaisant et élégant papier crème, un minimum de texte faisant germer un maximum d'idées et de sobres illustrations en parfaite adéquation.
"Le porc-épic de Schopenhauer". (c) Editions 3œil.
Démarche similaire dans "Le Corbeau d'Epictète" de la même Alice Brière-Haquet mais illustré cette fois par les gravures, ses premières, de Csil (Editions 3œil, collection "Philonimo", 32 pages), aussi bleu que le précédent était rouge, toujours des tons pantone. Fameux défi: il nous fait réfléchir au bonheur et aux influences possibles du chant d'un corbeau sur nos vies en se référant à un philosophe grec d'il y a vingt siècles. Pourquoi un chant de corbeau est-il nécessairement un mauvais présage? On peut aussi y chercher le beau.
"Le Corbeau d'Epictète". (c) Editions 3œil.
Ces deux albums cartonnés mais en format de poche inaugurent la collection "Philonimo", pour "philosophie" et "animaux", reconnaissable à sa découpe ronde dans la couverture en ton vif. Une collection qui veut mettre les grands noms de la philosophie et surtout leur pensée entre les mains des enfants des classes maternelles. Et ceci grâce aux métaphores animalières qu'utilisent les penseurs, résumées pour le jeune public. Quatre volumes sont en préparation, qui seront consacrés à Tchouang-Tseu, Wittgenstein, Diogène et Heidegger.
D'une belle sobriété tant dans le texte que dans l'image en noir, blanc et une couleur franche, laissant de la place au lecteur, ces deux albums permettent peut-être une première approche de la philosophie. Ils ouvrent surtout le chemin de la réflexion aux jeunes enfants confrontés, comme tout le monde, aux questions de la distance entre humains et du bonheur par une approche à leur niveau et donc à leur portée.