Buveurs de vent de Franck Bouysse

Par Isa S.




Editeur : Albin Michel

Parution : 19/08/2020 
Nombre de pages : 400 Genre : littérature française

L'auteur :


 





Franck Bouysse est né à Brive-la-Gaillarde en 1965. Il a publié une quinzaine de romans dont Grossir le ciel, couronné par de nombreux prix (prix SNCF du polar 2017, prix Sud-Ouest du polar 2016...), et Né d'aucune femme (prix des libraires 2019, prix Babelio 2019, Grand prix des lectrices de Elle 2019...)

Quatrième de couverture :

Ils sont quatre, nés au Gour Noir, cette vallée coupée du monde, perdue au milieu des montagnes. Ils sont quatre, frères et sœur, soudés par un indéfectible lien.Marc d'abord, qui ne cesse de lire en cachette.Matthieu, qui entend penser les arbres.Puis Mabel, à la beauté sauvage.Et Luc, l'enfant tragique, qui sait parler aux grenouilles, aux cerfs et aux oiseaux, et caresse le rêve d'être un jour l'un des leurs.Tous travaillent, comme leur père, leur grand-père avant eux et la ville entière, pour le propriétaire de la centrale, des carrières et du barrage, Joyce le tyran, l'animal à sang froid...Dans une langue somptueuse et magnétique, Franck Bouysse, l'auteur de Né d'aucune femme, nous emporte au cœur de la légende du Gour Noir, et signe un roman aux allures de parabole sur la puissance de la nature et la promesse de  l'insoumission.

Mon avis : 

« La beauté est une humaine conception. Seule la grâce peut traduire le divin. La beauté peut s’expliquer, pas la grâce. La beauté parade sur la terre ferme, la grâce flotte dans l’air, invisible. La grâce est un sacrement, la beauté, le simple couronnement d’un règne passager. »

Il était une fois une province hors du temps, sur laquelle régnait en despote le cruel Joyce, propriétaire de la centrale électrique, du barrage et de la carrière permettant aux villageois d'assurer chichement leur pain quotidien. Un ignoble shérif et de non moins cruels hommes de main faisaient régner la terreur sur la vallée, étouffant dans l'œuf toute velléité de révolte. 

Dans cette vallée oubliée des dieux, vivaient quatre frères et sœurs unis comme les doigts de la main qui rêvaient de liberté. Elevés par une mère bigote et mal-aimante et un père traumatisé par la guerre qui distribuait plus de taloches que de bonbons, la fratrie soudée s'entraidait et luttait contre les vents contraires, soutenue par leur grand-père Elie. Pourtant ce bel équilibre allait basculer le jour ou leur sœur Mabel allait fauter et être impitoyablement chassée du foyer familial, reniée par ses géniteurs. 

Libérée des chaînes parentales et assoiffée de liberté, Mabel la rebelle allait faire souffler sur le village un vent de révolte qui allait bientôt bouleverser l'ordre établi. Pour le meilleur ou pour le pire ? On ne provoque pas le diable impunément

"Buveurs de vent" est un conte âpre et vénéneux aux allures apocalyptiques, qui tutoie la noirceur avec beaucoup de poésie. Sans concession ni angélisme bien qu'avec une certaine tendresse, l'auteur dresse habilement le portrait de personnages désillusionnés aux multiples facettes, prêts à tout pour se libérer du carcan qui entrave leurs pauvres carcasses privées de liberté. Dans ces pages, l'innocence et  la grâce s'entremêlent à la ruse et la cruauté dans une ronde incessante, n'accordant nul répit à son lecteur qui cherche en vain une bouffée d'oxygène salutaire. 

Très sombre et pourtant porteur d'espoir, ce roman est une fable onirique qui nous plonge avec délectation dans les abîmes de l'âme humaine !