L'Histoire de la reine des putes de Frédéric Andrei,
Publié aux éditions Albin Michel,
Juin 2018, baie de Sausalito, Californie. Sur le chantier d'un quartier de riches maisons flottantes, Nicholas Dennac, ex-journaliste d'investigation devenu charpentier, découvre une mare de sang. Il n'en faut pas plus pour réveiller son instinct.
Dennac va remonter un à un les affluents d'un ruisseau sanglant dont les méandres traversent un vaste scandale industriel lié à l'exploitation d'huile de schiste, le business du siècle dans cette région. Un sang qui poisse et se faufile entre les derricks qui poussent comme des champignons dans une Californie rurale sacrifiée aux plus offrants. Une navigation dangereuse pour Dennac qui le mènera peut-être jusqu'à la source du mal : la Reine des Putes.
L'Histoire de la reine des putes. Avec un tel titre, Frédéric Andrei happe son lecteur et dès les premières pages il frappe fort. En 1996, Brooke ne cherche qu'une chose: se tirer de sa petite ville merdique où elle vivote avec sa meilleure amie, Terri. Les deux gamines de seize ans écument les bars et les hommes. Quand un groupe de musique passe par leur bled, Brooke saisit sa chance. Elle change de nom, devient Pam et atterrit en Californie, dans la San Joaquin Valley, un des endroits les plus pollués des US.
De nos jours, Nicholas Dennac vit à Sausalito, dans une communauté hippie très chic qui s'est établie sur des maisons flottantes. C'est un ancien journaliste d'investigation, reconverti en charpentier et justement, c'est lors d'un des ses chantiers sur les maisons flottantes qu'il remarque une immense tache de sang frais. Animal coincé et mort? Ou bien s'agit-il de sang humain? Quand on retrouve le cadavre échoué d'un certain David Stevens, géologue, Nicholas fait le lien et mène l'enquête.
Je vais commencer par dire que j'ai tout simplement beaucoup aimé ce roman. Je l'ai lu en quelques jours. L'alternance des chapitres, la fluidité de l'écriture, le style de l'auteur font que les pages se tournent toutes seules. On a vraiment envie de savoir si David Stevens a été assassiné ou s'il s'agit juste d'un accident. L'auteur a su me tenir en haleine d'un bout à l'autre.
L'alternance des chapitres y est pour beaucoup. D'un côté on suit Brooke devenue Pam, dans un rôle terrible. On la suit dans sa déchéance infernale et les passages qui la mettent en scène évoquent une Amérique misérable, brutale, pauvre. De l'autre côté, l'auteur nous présente une Californie riche, confortable mais qui cache la misère sous le tapis à savoir une zone de pollution extrême et surtout un risque sismique décuplé par les forages pour trouver du gaz de schiste.
L'auteur mêle thriller, enquête journalistique et tend à glisser vers le roman écologique. Et c'est peut-être là où le bât blesse, en tout cas pour moi. J'ai trouvé que les thèmes évoqués n'étaient pas assez creusés. L'auteur, à partir dans différentes directions, est parfois trop léger, trop superficiel dans son récit, laissant le lecteur sur sa faim. J'en aurais voulu plus en fait et je me retrouve frustrée. Les idées évoquées sont passionnantes et plutôt originales mais j'en voulais plus: plus d'investigation, plus d'explications.
La vie privée de Nicholas m'a en fait ennuyée et je m'en serais bien passée. En revanche, j'ai adoré la relation nouée avec Owen, le journaliste stagiaire. Cela amène du peps au roman et permet de dynamiser le tout par des dialogues savoureux.
" L'Histoire de la reine des putes " reste un très bon roman qui fait parfaitement le job, mêlant thriller, enquête bien ficelée et réflexions intéressantes sur l'écologie et le monde de demain.