La quête d’Ewilan2, Pierre BotteroLes frontières de glace
Editeur : RageotNombre de pages : 767 pour l’intégraleRésumé : Revenus dans l’Empire de Gwendalavir, Ewilan et Salim partent avec leurs compagnons aux abords des Frontières de Glace pour libérer les Sentinelles. Ils repoussent en chemin les attaques de guerriers cochons, d’ogres et de mercenaires du Chaos, alliés des Ts’liches, mais se découvrent un peuple allié : les Faëls. Salim se lie d’amitié avec une marchombre, Ellana, dont les pouvoirs le fascinent ; tandis que, face au maître d’armes, Ewilan assoit son autorité et affermit son Don. Malgré les attaques d’une goule la petite troupe parvient à destination ....
- Un petit extrait -
« Où tu veux, Camille chuchota-t-il. J'irai où tu voudras. Je te suivrai partout, même dans les étoiles... Je veux juste que tu saches que vivre sans toi m'est impossible. Alors je t'en supplie, ne meurs plus, parce que sinon, moi, je vais mourir pour de bon... Parce que la vie sans toi n'a pas de goût, pas de sens... Parce que sans tes yeux, je suis aveugle. Sans tes mots, je me perds. Parce que sans toi, mon âme est nue. Sans toi, je ne suis rien... Parce que... je t'aime... »- Mon avis sur le livre -
Comme certains le savent déjà, ma famille et moi avons déménagé au cours de l’été : si c’est un changement que nous attendions depuis de très nombreuses années, ça n’en restait pas moins un gros bouleversement qui a eu tendance à m’angoisser et à me peiner quelque peu. Ce n’est pas si facile de quitter une maison dans laquelle on a passé presque quinze ans … Histoire de me changer les idées et me redonner un peu de baume au cœur, je me suis dit que le moment était alors idéal pour se replonger dans les trilogies de Gwendalavir : ce sont des livres qui, systématiquement, à chaque fois que je les relis, me remonte le moral. J’avoue que j’ai tout de même longuement hésité à glisser neuf tomes dans mon planning de lecture (et donc dans le planning de publication du blog : il a fallu réfléchir intensément pour étaler suffisamment les chroniques pour ne pas trop vous lasser), mais l’appel du cœur a heureusement été bien plus fort que cette petite voix inquiète de la raison, et j’ai donc fait de juillet mon « mois Bottero » …
Camille et Salim sont de retour en Gwendalavir, sans être parvenu à convaincre Akiro, le frère de la jeune fille, de les accompagner … C’est donc à l’adolescente que revient la lourde tâche de réveiller les Sentinelles, figées par les terribles Ts’lichs depuis des années. Pour cela, la compagnie au grand complet va devoir traverser tout le continent pour rejoindre la Cité désertée d’Al-Poll dans laquelle sont emprisonnés les puissants Dessinateurs. Le chemin est loin d’être de tout repos : entre les hordes de Raïs et les Marcheurs que les Ts’lichs leur envoient régulièrement afin de les éliminer avant qu’ils ne parviennent à destination, et les nombreuses bêtes et créatures sauvages et féroces qui hantent le territoire, Camille et ses compagnons vont devoir redoubler de prudence, de courage et de talent pour se sortir d’affaire et rester en vie … Mais le plus difficile reste surement à venir : nul ne sait réellement quel est ce mystérieux Gardien qui est censé surveiller le sommeil des Figés.
Si le premier tome nous invitait à découvrir avec émerveillement ce nouveau monde dans lequel Camille et Salim sont tombés, nous offrant un récit somme tout assez joyeux et léger, il en est tout autrement de ce deuxième opus. Tous les membres de la compagnie le sentent au plus profond d’eux-mêmes : l’aventure n’a plus la même saveur maintenant que l’avenir de leur monde repose sur leurs seules épaules. Le voyage se transforme en quête. Et l’histoire se fait subtilement mais indéniablement plus profonde. Tandis que la compagnie traverse maintes épreuves, franchissent maintes obstacles, affrontes maintes embuches, pour atteindre leur destination finale où se jouera le sort de tout un monde, nous voyons avec plaisir, mais toutefois un peu de tristesse également, notre chère Camille grandir, murir. Jusqu’alors encore une petite fille, insouciante et innocente malgré son intelligence, Camille devient une jeune femme consciente des responsabilités qui sont désormais les siennes … C’est pour elle l’occasion de s’affirmer. Jusqu'à présent, elle suivait gentiment le mouvement en laissant les autres décider pour elle. Désormais, elle fait comprendre à tous ceux qui entendent dicter sa conduite qu’elle est la seule et unique maitresse de son existence. Envers et contre tout et tous s’il le faut ….
Mais cette profondeur se retrouve également, si ce n’est surtout, dans les relations entre les différents personnages. Je dois vous avouer que certains passages m’ont tiré les larmes aux yeux tant ils sont puissants. J’ai particulièrement apprécié le moment où Camille apprend à quel point Edwin (et dans une moindre mesure l’Empereur) était proche de ses parents … A partir de ce moment-là, Edwin n’est plus ce maitre d’armes si sévère et pragmatique qui ne fait que son devoir en aidant cette jeune Dessinatrice à sauver leur monde. Il a une toute autre raison, bien plus personnelle, de veiller sur cette jeune fille, qui aurait pu être la sienne si les choses avaient été quelque peu différentes. C’est vraiment très émouvant. De même, j’ai beaucoup aimé les différentes « rencontres » entre Camille et la Dame : je ne vous en dis pas plus pour ne rien gâcher au plaisir de ceux qui n’ont toujours pas découvert cette formidable saga, mais ces passages sont d’une poésie incroyable. A la fois si doux et si forts … J’ai également été très émue par tous ces petits moments où Ellana s’affirme comme grande sœur de cœur de Camille. Mais rien n’égalera jamais la déclaration de Salim à Camille. C’est juste magnifique, il n’y a pas d’autres mots : il y a entre ces deux-là un lien si fort, si pur, si simple mais si complexe à la fois.
Un récit bien plus profond et émouvant, donc … Mais n’ayez crainte, comme dans toute bonne quête de fantasy qui se respecte, ce deuxième tome nous offre également des moments de pure action. Des instants de grande tension. Plus d’une fois, mon cœur s’est emballé, mon souffle s’est coupé, tandis que je craignais pour la vie de nos compagnons : on a ce sentiment atroce que tous ne n’en sortiront pas indemnes … ou ne s’en sortiront pas tout court. Sans s’en rendre vraiment compte, on s’est attaché à cette étrange équipée, et c’est un crève-cœur de se dire que, peut-être, certains vont nous quitter. A chaque nouvel obstacle, à chaque nouvelle embûche, à chaque nouveau combat, on est tiraillé entre l’envie de lire toujours plus vite pour savoir comment tout ceci va se terminer, et la crainte de ce qui nous attend et qui nous contraint donc à ralentir de peur de ce qu’on pourrait trouver en tournant la page … Que de rebondissements : on n’a jamais le temps de s’ennuyer ! Page après page, on sent que le grand basculement se rapproche, inexorablement : nos héros se rapprochent du terme de leur voyage, mais pas de leur mission. Tandis que l’échéance se précise, la tension enfle progressivement, jusqu’à devenir insoutenable au moment où Camille se retrouve seule face à son destin …
En bref, vous l’aurez bien compris, si le premier tome était déjà exceptionnellement captivant, celui-ci est tout simplement extraordinairement haletant. L’histoire a beau être bien moins légère que dans le premier opus, il y a toujours cette fraicheur qui nous fait redécouvrir la fantasy avec ce regard d’enfant : on se laisse totalement transporter par cette quête riche en rebondissements, qui nous fait passer par toutes les émotions possibles et inimaginables. Nous ne sommes pas de simples spectateurs, mais nous avons vraiment le sentiment de vivre cette aventure avec les personnages, et ceux-ci deviennent rapidement de bons amis que l’on retrouve avec une joie intense à chaque fois qu’on rouvre le livre. Et que dire de la plume de notre regretté Bottero, cette plume à la fois si simple et si belle, si douce et si intense ? Je suis toujours bluffée par ce style, et je dois souvent lutter contre l’envie irrésistible de lire à voix haute, tant cette histoire se prête au partage au coin du feu … Clairement, si vous avez cette chance de pouvoir encore découvrir cette histoire (car même si je la redécouvre à chaque fois que je la relis, rien n’égale jamais la force de la toute première fois), je ne peux que vous inviter grandement à le faire !