Quatrième de couv’ :
Claude a quarante ans, et elle les fait. Sa vie est un désert à tous points de vue, amoureux et professionnel ; au RSA, elle va être expulsée de son appartement. Aussi quand un mystérieux juriste américain la contacte sur Linkedin – et sur un malentendu – pour lui demander d’enquêter sur la disparition d’une famille moyennant un bon gros chèque, Claude n’hésite pas longtemps. Tout ce qu’elle a à faire c’est de louer la villa « isolée en pleine campagne au fond d’une région dépeuplée » où les disparus avaient séjourné un an plus tôt. Et d’ouvrir grands les yeux et les oreilles. Pourquoi se priver d’un toit gratuit, même pour quelques semaines ? Mais c’est sans doute un peu vite oublier qu’un homme et cinq enfants s’y sont évaporés du jour au lendemain, et sans doute pas pour rien.
Une famille entière disparaît, un manoir comme premier suspect. Entre frissons et humour Au bal des absents est une enquête réjouissante comme on en lit peu.
Mon avis :
Ce livre est apparu par surprise dans ma boîte aux lettres après une journée de travail avec heures supplémentaires c’était tellement bienvenue ^^, merci Catherine et merci aux éditions du Seuil :
- L’intrigue :
Claude, 40 ans, est en fin de droit pour le chômage et le RSA c’est pas bézef, comble du malheur, elle doit quitter son domicile car elle ne peut plus payer et n’a pas vraiment de solution de repli. Quand elle va sur son compte Linkedin dans l’intention de le fermer, elle tombe sur le message d’un américain qui a vu dans son CV la mention d’un emploi dans la Police et souhaite l’engager pour enquêter sur la disparition de la famille Grue en indiquant la somme qu’il se propose de lui verser tout de suite. Claude pense d’abord à détromper cet homme en lui disant qu’elle ne s’occupait que de l’administratif mais la pauvreté ne permet pas de s’encombrer d’honnêteté. Claude part donc pour Sainte-Bérégonne direction sa réservation Airbnb lieu de la disparition familiale, dans la maison de Tante Colline et c’est aussi l’occasion de se remettre le pied à l’étrier. Tante Colline est une maison sans habitant fixe là où Claude est sans domicile fixe, elle en est sûre, elles sont faites pour s’entendre….si ce n’était un léger problème de manifestations paranormales…
- La violence démoniaque VS la violence sociale :
Dès la première nuit écourtée dans la maison pour cause d’apparition flippante dans un miroir en plus d’une ambiance lugubre qui l’a agressé dès son entrée dans la maison, Claude se réfugie dans sa voiture, mais voilà, l’hiver approche et les températures ne vont pas lui permettre de rester dormir dehors bien longtemps. Après toutes les merdes subies dans sa vie, Claude voit rouge, ce n’est pas un fantôme qui va la condamner à mort en plus de l’Etat français, elle va se battre pour survivre. On va donc suivre Claude préparer la contre-attaque en faisant le siège de la bibliothèque du coin pour se former à la chasse aux entités maléfiques en lisant tous les livres et visionnant tous les films d’horreur qu’elle peut trouver, en prenant des notes afin d’établir un plan d’action et c’est armée d’une binette, d’encens et d’incantations mélangées de grossièretés que Claude part au front. Ce sera les fantômes ou elle.
Dans ce roman, en plus de l’enquête de Claude on s’intéresse également à ses pensées qui nous brossent un tableau de sa situation avec les problèmes de finance récurrents quand on est au SMIC, avec une multiplication des emplois précaires et peu valorisés puis la descente dans l’échelon social avec le chômage qui dure, la fin de droits et le RSA. Deux images ressortent pour illustrer ces difficultés, d’abord une paire de chaussons chauds qui coûtaient deux semaines de chauffage, parce que c’est ça le SMIC, c’est renoncer à se faire plaisir avec son salaire, tout passe dans les factures et il ne reste rien avant même la fin du mois, c’est être obligé de tout faire avec une calculette dans la tête et faire des choix, renoncer à une chose essentielle (comme se nourrir ou se chauffer) pour obtenir un petit plaisir inaccessible autrement (une paire de chaussons ici) pour adoucir la vie quelques instants et essayer de faire comme les autres, s’insérer socialement. La seconde image parlante c’est la conseillère Pôle emploi, Mme Colombe Flenche-Rian, qui transpirait le mépris pour les ayants droit telle que Claude du haut de son brushing impeccable, un mépris assez généralisé dans un pays où beaucoup pensent que pour réussir il suffit de le vouloir, il faut bien travailler à l’école et tout ira bien. AH. Dans l’esprit de Claude, le manoir hanté sera l’incarnation de cette conseillère et réussir à éradiquer les fantômes de la demeure sera une revanche sur toutes les Colombe qui lui ont mis des bâtons dans les roues tout au long de sa vie.
En bref :
Comme dans Danse avec les lutins, c’est avec un humour noir bien prononcé et sans jamais tomber dans le pathos que Catherine Dufour nous sert un roman dans le genre du polar fantastique où se mêle histoire de manoir hanté et critique sociale comme elle sait si bien le faire. Si les squelettes dans le placard de Claude vous intéressent, vous pouvez la retrouver 10 ans plus jeune dans le recueil L’Accroissement mathématique du plaisir dans la nouvelle nommée Immaculée Conception. Je continuerai bien sûr à cabotiner dans le sillage de la grande Catherine pour découvrir tous ses écrits petit à petit, c’est un sans faute pour le moment.
D’autres avis chez : Tigger Lilly, Celindanae, Gromovar,
Bonne lecture !