Editeur : RageotNombre de pages : 892 pour l’intégraleRésumé : À Gwendalavir, Ewilan se prépare à partir pour Valingaï afin de rendre Illian à sa famille et retrouver les siens. Avec Liven, apprenti dessinateur, elle découvre qu’une méduse aux tentacules mortels tente de bloquer l’accès à l’Imagination. Mais peu à peu, un mal sourd infecte son organisme. Soutenue par Salim et Ellana, elle parvient cependant aux confins de l’Empire devant l’œil d’Otolep. Ce lac mythique la délivrera-t-il du parasite mortel qui lui a été inoculé à l’Institution ?
- Un petit extrait -
« Elle passa la main sur son front, s’obligeant à respirer avec lenteur pour chasser le cauchemar qui pulsait encore dans chacune des fibres de son corps. Elle se leva sans bruit.— Que t’arrive-t-il ? murmura Salim près d’elle.— Un mauvais rêve. Je vais marcher un peu. Pour oublier…— Je viens.Ce n’était pas une question ni même une proposition. Aussi silencieux l’un que l’autre, ils s’éloignèrent du tas de cendres qui rougeoyait toujours. Ils n’avaient pas fait trois pas que la voix d’Edwin s’éleva. Parfaitement éveillée.— Ne dépassez pas la limite des arbres.Puis celle d’Ellana. Gouailleuse.— Ni les autres.Salim n’eut pas le temps de trouver une réplique.— Les limites exister pour être dépassées !— Et si vous fichiez la paix à ces jeunes gens ?Chiam et Erylis ! Son cauchemar eût-il été moins prégnant, Ewilan aurait éclaté de rire. »- Mon avis sur le livre -
S’il y a bien une chose que je trouve incroyable, prodigieux, époustouflant, dans les romans de Pierre Bottero, c’est qu’aucune relecture ne ressemble à la précédente ou à la suivante. Tantôt je vais être émue par tel aspect du récit, tantôt je serai ébahie par une autre facette de l’histoire, tantôt je vais pleurer toutes les larmes de mon cœur, tantôt je vais juste être émerveillée par l’épopée relatée … C’est une éternelle redécouverte, car l’histoire me touche différemment à chaque fois que je la relis ! Aussi, j’ai beau connaitre par cœur certains passages, j’ai beau savoir d’avance tout ce qui va arriver, je savoure chaque lecture de la saga comme si c’était la toute première fois que je m’y plongeais … Si je ne devais conserver qu’une petite dizaine de livres à emmener sur une île déserte, je pense que mes trois intégrales des trilogies de Pierre Bottero feront partie du voyage (comment ça c’est de la triche de choisir des intégrales ?) : ce sont clairement des livres que je relirais bien volontiers en boucle sans jamais me lasser, tant ils me ravissent à chaque fois !
De retour en Gwendalavir après la traumatisante épreuve de l’Institution, Ewilan a repris avec plus de fougue que jamais ses études à l’Académie des Dessinateurs, affinant toujours plus son Don déjà puissant. Tandis que les examens de fin d’année approchent pour les étudiants de dernière année, voici qu’une monstrueuse créature envahit l’Imagination … et semble bien décidée à briser la frontière entre les dimensions pour se matérialiser dans la réalité. Pressentant au plus profond d’elle-même que les réponses à toutes ses questions se trouvent de l’autre côté de la Mer des Brumes, la jeune fille remue ciel et terre pour intégrer l’expédition chargée de raccompagner le jeune Illian chez lui et de rejoindre les parents et le frère d’Ewilan … Pendant ce temps, Salim poursuit son apprentissage marchombre auprès d’Ellana, plus exigeante que jamais. Mais les vieux désaccords entre la jeune femme et les responsables de la guilde refont surface, et la marchombre et son apprenti doivent quitter la capitale pour avoir la vie sauve … C’est ainsi que la compagnie se retrouve à nouveau réunie sur les routes, prêts à affronter ensemble tous les dangers qui se dresseront devant eux … et ils seront nombreux.
Si je devais résumer ce tome en un seul mot, ce serait assurément le terme « palpitant ». En effet, l’action qui faisait quelque peu défaut au premier tome selon certains lecteurs semble s’être condensée dans cet opus : du début à la fin, le lecteur est tenu en haleine. Entre les démêlés d’Ellana et Salim avec le conseil de la guilde marchombre, le mystère qui entoure toujours l’enlèvement d’Ewilan dans le tome précédent, celui que représente le surprenant pouvoir d’Illian ainsi que ses origines, et la nouvelle menace que fait planer la méduse au cœur même de l’Imagination, croyez-moi, on ne s’ennuie pas une seule seconde ! On sent confusément que tout est intrinsèquement lié, qu’il ne s’agit finalement que de différentes facettes d’une même machination bien plus grande et terrifiante … Et la tension enfle donc progressivement au fil des chapitres, à chaque nouveau rebondissement, à chaque nouvelle révélation ou découverte. Il y a ce sentiment d’urgence qui se fait toujours plus présent, qui s’agrippe au lecteur pour ne plus jamais le lâcher : j’étais si captivée par ce récit, si entrainée par ce besoin irrésistible de connaitre la suite, que j’ai lu ce tome en une journée à peine ! Un opus incroyablement haletant, donc …
Mais incroyablement poignant également. Car Pierre Bottero ne sombre jamais dans l’action démesurée à outrance, il la contrebalance toujours par quelque chose de plus profond, de moins spectaculaire. Notre jeune Ewilan a le sentiment de perdre pied, de ne plus avoir la moindre prise sur sa vie, comme si elle était poussée par une force qui la dépasse vers un destin qui l’écrase. Elle a l’impression de suivre une route qu’un autre a tracée pour elle mais qu’elle n’a pas choisi d’emprunter. Incapable de résister à cette force implacable, la jeune fille qui a toujours été maitresse de son existence n’a d’autre choix que d’aller de l’avant. Toujours plus. Alors même qu’un mal se développe silencieusement dans tout son être … Tous ces questionnements sur la destinée, sur le sens de la vie et le poids des responsabilités m’ont énormément plu. De la même manière, j’ai beaucoup aimé le fait qu’Ewilan commence à s’interroger sur les motivations d’Eléa. Car comme le dit le petit Illian avec ses mots d’enfants, « la sorcière n’a pas toujours été méchante ; elle a dû avoir des amis, rire avec eux, se trouver un amoureux ; elle a beau être très méchante, elle reste une personne ». Jusqu’à présent, on avait en effet le sentiment que la Sentinelle félonne était l’incarnation du mal, et on commence à entrevoir son humanité désormais envahie par la haine et l’ambition … Très intéressant, donc.
Et comme toujours, enfin, Pierre Bottero explore et approfondie les liens qui unissent entre eux les personnages. Il y a ce lien qui s’est créé entre le petit Illian et sa « sauveuse » Ewilan, un lien aussi évident que surprenant : la jeune fille elle-même ne comprend pas comment elle a pu s’attacher si vite à ce petit garçon, tantôt si innocent et gentil, et tantôt si implacable et insensible … Elle se sent responsable de lui, comme une sœur, une mère, alors même qu’on les a séparé dès leur retour en Gwendalavir. Il y a, bien évidemment, l’amour qui unie Ewilan et Salim. Un amour qui, pour la première fois, ne semble plus aussi pur, aussi simple : ils s’aiment, cela ne fait aucun doute, mais c’est comme si le monde extérieur était parvenu à se glisser entre eux. Au début, je dois avouer que cela m’a quelque peu brisé le cœur de voir Ewilan se rapprocher de Liven, de voir Salim sous le charme d’une autre … Et puis, après un passage atrocement déchirant, voilà que l’harmonie entre nos deux amoureux est revenue, plus forte que jamais. Qu’est-ce qu’ils sont beaux, ces deux-là, quand même ! J’aimerai pouvoir en dire autant d’Edwin et Ellana, mais à mon plus grand désespoir, notre brave Général est bien trop occupé par son statut de grand chef de l’expédition pour prendre le temps de penser à lui … et à elle. Je croise les doigts pour la suite !
En bref, vous l’aurez bien compris, je pourrais continuer très longtemps à vous parler de ce tome qui est, tout simplement, excellent ! L’intrigue progresse dans une direction que j’apprécie énormément, les choses se mettent progressivement en place pour nous offrir un troisième et dernier opus qui promet d’être exceptionnellement saisissant, excitant et passionnant ! Je ne me lasserai jamais de cheminer aux côtés de nos compagnons, de les accompagner dans leurs épopées … J’aime trembler, rire et pleurer avec et pour eux, j’aime ce sentiment d’avoir basculé corps et âme au cœur de l’histoire, de la vivre pleinement et non pas seulement par procuration. Ewilan et ses compagnons ne sont plus de simples personnages dont on lit les aventures, mais de véritables amis que l’on aime retrouver dans nos rêves, que l’on suit avec un plaisir immense. Et surtout, une fois encore, j’aime la plume de Pierre Bottero. Cette plume qui rend chaque passage, même le plus « banal », incroyablement puissant, cette plume qui rend chaque chapitre, même le plus « simple », inoubliable. J’aime cet humour qu’il distille savamment dans ses ouvrages, et j’aime plus que tout cette poésie qui se retrouve dans chacune de ses phrases. J’aime ces livres, beaucoup, passionnément, à la folie, voilà tout !