Avant de débuter mon billet je tiens à prévenir ceux dont je vois déjà l’œil égrillard attiré par le titre de ce roman qu’il ne s’agit pas d’un bouquin d’Esparbec ni même de Frédéric Dard, aussi veuillez remballer vos fantasmes et éventuellement poursuivre votre lecture.
Ce roman – l’un des moins connus de l’écrivain - paru d'abord sous le nom Les Deux étoiles en feuilleton dans un périodique (1848), puis sous le nom de Partie carrée en 1851, et publié à nouveau dans le journal L'Univers illustré sous le titre La Belle-Jenny entre juin et septembre 1865. Mais c'est sous le titre de Partie carrée qu'il est actuellement le plus souvent publié.
Sir Benedict Arundell va entrer dans l’église où il doit épouser la charmante lady Amabel Wyvyan quand il est enlevé ! Mr de Volmerange et Edith Harley viennent de s’épouser mais au matin, quand on ouvre la chambre nuptiale, ils ont tous deux disparus ! Le lecteur ébahi va suivre ces deux couples séparés et embarqués dans des aventures extravagantes…
Je suis toujours fasciné quand aujourd’hui et à mon âge, je me replonge dans ces vieux romans d’aventures, par la différence de mentalité/esprit/psychologie qui pouvait exister entre les lecteurs d’hier et ceux de maintenant. Car avouons-le il faut faire des efforts considérables pour accepter ces abracadabrantesques situations tout comme les caractères (surtout amoureux) des personnages. Autres temps, autres mœurs.
Le roman n’est pas bien long mais il est plein de trucs et de machins menés à un train d’enfer, de ceux qu’on voit souvent dans les bouquins d’aventures de cette époque : cavalcades, tempêtes, enlèvements et séquestrations, complot et société secrète, messages secrets et mystérieux, il y a même un genre de sous-marin (pour rappel : Vingt milles lieues sous les mers de Jules Verne date de 1870), coups de théâtre extravagants, passion, jalousie et félonie etc.
Si une grande part du récit se déroule en Angleterre, nous irons aussi au bout du monde en Inde (Ah ! l’exotisme, les mystères de son ésotérisme proche du paranormal) et, pompon, sur l’île de Sainte-Hélène où réside Napoléon, figure centrale du livre puisqu’il en expliquera (enfin, après une longue attente) une bonne part du mystère dans lequel le lecteur pataugeait depuis le début.
Toute cette action est motivée par les sentiments et là encore, le lecteur va ramer pour se mettre à la hauteur des protagonistes : amours fleur bleue tout en angélisme et espérances confronté à la jalousie, la vengeance et la trahison, voir à la tentative d’homicide. Comme l’annonçait le titre du roman, nous avions deux couples à son début, il n’en sera plus de même à la fin…
Il y a quand même de bonnes choses, ne serait-ce que le riche vocabulaire de l’écrivain, plein de mots rares ou plus usités de nos jours (« Une pendule incrustée de burgau et posée sur un piédouche. »). Le seul vrai reproche qu’on puisse faire à ce livre, ce sont les derniers chapitres exécutant l’épilogue par des raccourcis et coups de théâtre trop improbables pour faire semblant d’être crédibles. Mais au second degré, avec beaucoup de complaisance et pour retrouver une âme d’enfant, une lecture assez « amusante »…
« Certes, Benedict, qui avait étendu un pan du surtout que lui avait prêté Saunders sur les épaules de la malheureuse jeune femme vêtue seulement de mousseline blanche, ne se doutait pas qu’il l’eût déjà vue une fois dans la journée sous le porche de Sainte-Margareth, où la manche de son habit avait effleuré le voile de dentelle qui la couvrait ; et certainement la pauvre Edith Harley – car c’était elle – n’aurait pas cru que l’homme aux pieds duquel, par cette nuit glacée, elle se tordait en sanglotant, était l’heureux Benedict Arundell. »