Publié aux éditions Folio,
Le 9 janvier 1993, Jean-Claude Romand a tué sa femme, ses enfants, ses parents, puis tenté, mais en vain, de se tuer lui-même. L'enquête a révélé qu'il n'était pas médecin comme il le prétendait et, chose plus difficile encore à croire, qu'il n'était rien d'autre. Il mentait depuis 18 ans, et ce mensonge ne recouvrait rien. Près d'être découvert, il a préféré supprimer ceux dont il ne pouvait supporter le regard. Il a été condamné à la réclusion perpétuelle à perpétuité.J'ai découvert ce titre grâce au bookclub auquel je participe dont le thème était de lire un roman d'Emmanuel Carrère. Pour moi ce fut une première car je n'avais jamais lu l'auteur. Son style est assez déconcertant mais il se marie parfaitement bien avec le livre que j'ai choisi.
Qui n'a jamais entendu parler de l'affaire Jean-Claude Romand, un drame sordide et terrible qui a défrayé la chronique dans les années 90 et qui continue à " fasciner " si l'on peut dire ainsi car cette affaire est hors du commun. Pendant 18 ans, Jean-Claude Romand a menti à sa famille, ses amis, ses proches, en prétendant qu'il était médecin à l'OMS, en Suisse. Il a berné tout le monde, empruntant de l'argent à droite à gauche, feignant de la placer dans des comptes en Suisse, mentant de plus en plus. Lorsque l'argent est venu à manquer et ses débiteurs lui ont réclamé leur dû, Jean-Claude Romand a préféré assassiner ses enfants, sa femme et ses parents plutôt que de révéler toute la vérité.
Emmanuel Carrère offre au lecteur un livre sans concession à la limite du roman et de l'enquête journalistique. Il est allé au procès d'assise et a même correspondu avec Jean-Claude Romand. Il propose de revenir sur la vie de Jean-Claude Romand et d'essayer de comprendre où le point de bascule a pu se faire. Sans jugement, il nous dévoile la vie d'un homme, imaginant certaines scènes, certains dialogues. C'est redoutable d'efficacité. On suit Jean-Claude, enfant puis adolescent sans histoire, jusqu'à cette fameuse année de médecine qu'il rate mais qu'il affirme pourtant à tous avoir réussi haut la main. Et c'est justement ce sentiment d'invisibilité qui fait que Jean-Claude Romand a pu mentir pendant des années. Jean-Claude, c'est le copain qu'on ne remarque pas s'il quitte la fête, le genre de type passe-partout qui ne manque à personne au final.
Le point de non retour: c'est ce qui fait aussi tout l'intérêt du livre. A quel moment Jean-Claude Romand s'est dit qu'il n'avait plus le choix, qu'il devait persister dans son mensonge, qu'il était trop tard pour faire machine arrière et avouer? Nous sommes ici en présence d'un mythomane au sens pathologique qui ne sait plus vraiment distinguer la vérité de ce qu'il a inventé. J'ai dévoré ce petit livre que j'ai trouvé d'une puissance d'évocation sans faille, sans jamais tomber dans le voyeurisme ou le dramatique.
" L'adversaire " est un livre à lire assurément, un ouvrage qui confronte le lecteur à l'indicible, une histoire vraie et profondément troublante d'une fulgurance rare!