5 questions à…

Aujourd’hui, j’inaugure une nouvelle chronique! Tous les mois, je vous propose de découvrir un auteur en 5 questions.

5 questions à…

Yasmina Behagle, née en 1992, est titulaire d’une licence de lettres modernes à l’université de Bordeaux Montaigne. Elle est l’autrice du roman Fièvre de lait.

5 questions à…

  • Comment vous est venue l’envie d’écrire ?

Déjà enfant, j’aimais écrire, surtout de la poésie. Puis cela s’est atténué, j’ai commencé à dessiner, à gribouiller et j’ai finalement passé mon adolescence sans passion spécifique. Adulte, souvent après avoir lu (ou vu) des chefs d’œuvres, j’avais une envie folle de raconter moi aussi une histoire. Mais je n’y arrivais pas. Je pense que j’étais aveuglée par la finalité, je ne laissais pas de place au hasard. Or, la création, c’est beaucoup de hasard.  Je calibrais mes récits pour qu’ils plaisent au plus grand nombre, je m’en lassais aussi vite… Je me suis lancée deux fois dans des dystopies vues et revues mille fois. J’avais un désir trop fort, que je n’arrivais pas à canaliser. Finalement, quand l’idée de Fièvre de lait est venue, je n’avais plus cette envie d’écrire à tout prix. C’était un cadeau qu’il fallait accepter. J’ai eu ce pressentiment que c’était la bonne, qu’il suffisait d’aller au bout, que ça n’allait pas être facile, mais que c’était nécessaire. J’y ai pris énormément de plaisir.

  • Dans Fièvre de lait, vous parlez des difficultés de la maternité. Pourquoi avoir choisi ce thème en particulier ?

C’est un thème qui me touche parce que j’ai pu me situer moi-même dans ce spectre des difficultés maternelles, qui commence avec le baby blues, pour aller jusqu’à la psychose puerpérale. Quand je recherchais des réponses, j’ai vu que beaucoup de femmes étaient dans mon cas. Pourtant, dans mon entourage, on me disait surtout le fameux « Profite, ça passe si vite ! ». Je voulais mettre en relief ce paradoxe et montrer, à travers la solitude de Delphine, que l’entourage a aussi son rôle à jouer. Je désirais aussi que la fin soit ambiguë, pour ne pas stigmatiser les femmes dans le cas de Delphine. Ce n’est pas la psychose puerpérale qui est la cause de l’effondrement de sa vie, ce n’est qu’une brique parmi d’autres. Je pense que c’est important de le souligner.

  • La fin de votre roman est véritablement glaçante et tragique. Aviez- vous dès le départ cette fin en tête ?

Oui, dès le départ, j’ai visualisé la scène du début, et la scène de fin. J’ai voulu la modifier parfois, à cause des raisons évoquées plus haut. Je ne voulais pas un rendu sensationnaliste. Mais il le fallait, c’est terrible à dire, mais je n’arrivais pas à imaginer un happy end. Je n’arrivais pas à créer une autre issue. Et j’en suis heureuse, car je dirais que le récit perdrait en force, si la fin n’était pas celle-ci.

  • Pourquoi avoir opté pour l’autoédition ?

J’ai envoyé mon manuscrit à plusieurs maisons cet été, je n’ai pas encore eu toutes les réponses, mais je suis une grande impatiente, et je n’arrivais pas à me résoudre à l’idée qu’il reste dans mon tiroir. J’avais vu beaucoup de vidéos d’auteurs auto-édités, et je me suis dit pourquoi pas. Je ne suis pas mécontente. Ce qui me plait le plus, c’est la liberté. Je peux modifier ma couverture si je veux (ce que j’ai d’ailleurs fait, en faisant moi-même l’illustration), j’ai une visibilité des ventes en temps réel, ce qui n’est pas le cas en maison traditionnelle. L’inconvénient, c’est la promotion. C’est très chronophage, sur les réseaux sociaux, et le fait de ne pas savoir si on s’y prend bien, si c’est utile, est assez frustrant… De plus, et encore plus depuis le second confinement, le regard porté sur l’autoédition est assez dur, ce qui n’arrange pas le syndrome de l’imposteur qui traverse un certain nombre d’entre nous. Mais je vais réitérer l’expérience pour mes prochains, en m’occupant encore de mes illustrations pour qu’il y ait un code visuel reconnaissable. On apprend chaque jour, j’espère que mes erreurs m’aideront à m’améliorer.

  • Quels sont vos futurs projets ?

Le premier tome de mon second roman, Leur mère à toutes sort en 2021. Il s’agit d’un diptyque, dont l’intrigue se situe dans la prison Saint-Lazare à la fin du XIXème siècle. On va suivre le quotidien de Sœur Marie, une religieuse. Celle-ci, depuis son affectation, s’interroge sur sa vocation, sur ce qu’elle peut apporter aux détenues, mais aussi sur ce qui la différencie d’elles. C’est un roman choral puisqu’à plusieurs reprises les prisonnières interviennent pour expliquer les raisons de leur incarcération. L’anachronisme de certaines situations permet une réflexion sur le féminisme. J’ai vraiment hâte de le terminer.

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