Daughter of the River, de Hong Ying, traduit du mandarin (Chine) par Howard Goldblatt, Bloomsbury, 1999 (VO : 1997), 279 pages.
L’histoire
Lorsqu’elle est née, à Chongqing, l’année de la grande famine, le tigre du zoo a mangé son gardien. Hong Ying est originaire du quartier des ouvriers du fleuve Yangzi, bateliers comme son père ou coolies comme sa mère. Dans ces cahiers de départ d’un pays natal, elle dresse le tableau poignant et terrifiant d’un monde misérable et sans amour, une fois dissipée l’hypnose maoïste. En 1980, à l’âge de dix-huit ans, Hong Ying cherche à comprendre pourquoi elle s’est sentie étrangère dans sa propre famille.
Note : 4 sur 5.
Mon humble avis
J’ai dû couper le résumé de l’éditeur parce qu’il raconte absolument tout l’ouvrage (je savais qu’Actes Sud avait des tendances pareilles mais visiblement chez le Seuil aussi ça arrive). Donc si vous souhaitez lire l’ouvrage sans tout savoir à l’avance, restez loin du résumé…
Cet ouvrage est l’autobiographie de l’enfance et de l’adolescence de l’autrice, en Chine dans les années 1980. Tandis qu’elle grandit après l’époque maoïste, et qu’elle essaie de retracer l’histoire de sa famille – notamment de ses parents et de l’aînée de la famille – la vie de Hong Ying s’ancre dans l’Histoire du pays. Je ne connais pas grand-chose de l’histoire de la Chine mais Hong Ying rappelle à chaque fois les grands événements et les changements qui ont pu arriver avec la mort de Mao. Ses parents ont connu la révolution culturelle, la famine, et à présent elle-même connaît des gens menacés par le Parti. La période est loin de se prêter à la joie et l’insouciance, et la situation familiale de Hong Ying est loin d’être plus légère. L’histoire est si sombre, si tragique qu’on aurait presque du mal à croire qu’il s’agit d’un récit autobiographique – les photos de la famille de Hong Ying permettent de dissiper le doute.
Le récit est assez complexe puisqu’il n’est pas chronologique et qu’il faut parfois s’accrocher pour comprendre dans quelle temporalité on se trouve : Hong Ying raconte l’histoire de sa grande-sœur, de son père, de sa mère… J’ai parfois été un peu perdue même si j’arrivais toujours à m’y retrouver au bout d’un moment – il est fort possible que le fait que je connaisse si peu de choses de l’histoire chinoise ne m’ai pas permis de me resituer facilement.
Si aux premiers abords, la famille de Hong Ying a l’air tout à fait normal, elle se rend compte au fur et à mesure que de nombreux secrets se trament, et elle décide donc d’aller au bout des choses pour découvrir ce qui se cache derrière les non-dits, les traitements différents entre ses frères et sœurs, jusqu’à découvrir enfin sa propre histoire.
L’autrice ne prend pas de gants dans ses descriptions et dans certains détails de sa vie, je pense qu’un certain passage où elle va utiliser les toilettes publics et où il est question de vers intestinaux restera gravé longtemps dans ma mémoire (j’espère que ce ne sera pas la seule chose de ce livre qui y restera…). On suit finalement la vie d’une adolescente un peu perdue dans ses sentiments et ses relations avec sa famille ou encore avec son professeur d’histoire.
Cette lecture était tout sauf simple, autant au niveau de la chronologie que des événements qui nous sont racontés, mais elle était intéressante et assez émouvante par moment malgré le détachement avec lequel l’autrice semble conter son histoire.
Trigger warnings : maltraitance d’enfants, assassinats politiques, famine, avortement violent, sexe, relation professeur / élève (avec élève majeur).