Wandavision : histoire d'amour entre une sorciere et un androide sur disney +

Par Universcomics @Josemaniette

Les Marvel Studios sont de retour aux affaires. Cette fois ça se passe sur le "petit écran" avec une première série chez Disney +, la plateforme qui va produire et proposer les nouvelles créations made in Marvel dans les prochains mois. WandaVision pour commencer, donc, avec le sort de deux des personnages les plus touchés par l'orgie récente, Avengers: Infinity War et Avengers: Endgame.

Wanda et la Vision s'aiment. Un couple fort étrange. Improbable. Voyons ce qu'il en est , du coté des comics, pour mieux appréhender la série. Nous sommes au milieu des années soixante-dix lorsque Wanda et la Vision sont coéquipiers au sein des Avengers. Les deux ont fait leurs débuts en tant qu'adversaires féroces des héros les plus puissants de la Terre, avant de changer de camp et de rejoindre le groupe. Apparemment, ils ne pourraient pas être plus éloignés l'un de l'autre: elle est une femme compromise avec le monde de l'occultisme et de la magie, lui est un être synthétique, le fils de la science, mais doté d'une technologie basée sur une personnalité humaine.

Une "vraie personne" peut-elle tomber amoureuse d'une machine et d'une intelligence artificielle? Quelques décennies avant le film Her, l'univers Marvel répond oui. Depuis des années, Wanda et Vision forment un couple heureux de superhéros, et cela malgré la nature étrange de leur ménage. Nous savons que le bizarre est du pain béni pour la Maison des idées, alors Wanda et son bien-aimé finissent par se marier. Nous sommes en 1975 quand ça arrive, sur les pages de Giant-Size Avengers # 4. C'est un scénariste de grand talent comme Steve Englehart qui officie, un auteur avec une sensibilité et une capacité réelle d'utiliser des superhéros et leurs contradictions morales et personnelles comme thème de ses histoires. Il n'est pas surprenant que le récit qui mène au mariage entre la sorcière et l'androïde anticipe de beaucoup des thèmes qui caractériseront plus tard leur amour: la passion de la sorcière en contraste avec la nature de la machine de Vision, la magie qui s'en mêle (pour le pire) avec le perfide Dormammu qui prend le contrôle de Wanda, l'effort du syntezoïde pour se voir comme un homme à tous égards... ce sont autant de thèmes présents dans cette aventure, qui voit pourtant les deux amants triompher . Les héros sont désormais liés et entament une vie assez complexe: se diviser entre "famille" et missions et, en plus, trouver un équilibre et une forme de normalité dans une relation insolite entre femme et machine.

L'élément qui complique tout, c'est le personnage de Wonder Man. Le superhéros et star hollywoodienne est en fait celui qui donne une personnalité à Vision, dont les comportements sont essentiellement empruntés à ceux de Simon Williams. On pourrait dire que les deux partagent la même personnalité. De fait, ils vont aussi se retrouver amoureux de Wanda en même temps. Imaginez la confusion: vous aimez une machine pour sa personnalité et vous constatez qu'elle habite également une personne réelle. Certainement pas une pensée qui permet de choisir facilement l'amour du robot, et de garder de la sérénité. Wanda sera le pivot d'un triangle amoureux plutôt complexe flirtant même avec le scabreux, à bien y penser. Bien que difficile, cependant, la relation entre Vision et Scarlet se poursuit longtemps et survit jusqu'aux années 80, lorsque l'androïde devient essentiellement le chef des Avengers et décide ensuite de fonder un deuxième super groupe: les Avengers de la côte ouest. Les deux ont également eu deux enfants depuis un certain temps. Jumeaux, les nouveau-nés ont été accueillis par le couple avec joie, mais ils sont aussi une source d'inquiétude pour leurs amis héros: puisque Vision est un être artificiel, qui est le père des deux enfants? Insémination artificielle ou entourloupe?

Durant cette période l'étrangeté de la relation entre les deux, et les contradictions qu'elle entraîne, remontent à la surface de la manière la plus tragique. Au cours d'une mission, la Vision perd considérablement la capacité de ressentir et d'exprimer des sentiments. Wanda, peinée et de moins en moins stable, se retrouve à révéler à ses compagnons que les jumeaux ont été créés grâce à des pouvoirs magiques et innés, qui lui permettent d'altérer les probabilités des événements, et par extension, la réalité autour d'elle. De plus, il s'avère que la création des enfants a eu lieu grâce à la soustraction de deux âmes au contrôle de Méphisto, essentiellement le diable lui-même dans l'univers Marvel, ce qui fait de la progéniture du couple très étrange l'objet du désir des démons et des occultistes. Nous trouvons le superbe John Byrne pour écrire et dessiner les histoires des Avengers à l'époque, et la famille de Vision et Scarlet ne trouve pas la paix. Mephisto a l'intention de se venger du vol des âmes par une Wanda de moins en moins capable de se contrôler d'elle-même. Le démon défie la sorcière et semble être en mesure de détruire les deux enfants, dont les âmes finiront par se réincarner dans d'autres corps et grandir en tant que superhéros connus sous le nom de Wiccan et Speed. Le traumatisme est énorme, rendu encore plus douloureux par l'absence substantielle, même innocente, de son mari.

Scarlet est en proie à la dépression. Pour tenter de l'aider, la sorcière Agatha Harkness efface de son esprit le souvenir de ses enfants perdus, qui n'abandonne pourtant pas l'âme de Wanda; elle finira bientôt par retrouver la mémoire en raison de la fluctuation de ses pouvoirs et des plans d'Immortus. Le terrible traumatisme est cependant à nouveau enterré et les difficultés semblent même surmontées. La Vision retrouve sa personnalité et les deux époux semblent faire la paix et trouver un nouvel équilibre... sauf que les choses sont destinées à exploser à nouveau. En raison d'un commentaire malheureux de son amie Janet Van Dyne, également connue sous le nom de la Guêpe, Wanda récupère soudainement et de manière traumatisante le souvenir de la perte de ses enfants. La douleur et la frustration de ne pas pouvoir être mère, la manipulation qu'elle a subie de la part de ses propres alliés, même bien intentionnés, les blessures d'un passé tragique et d'un amour apparemment impossible, contrarié par une réalité qu'elle ne veut pas accepter, la rendent folle et l'amènent à modifier terriblement la réalité. Wanda se souille, plus ou moins consciemment, des terribles décisions qui mèneront à Avengers Disassembled. Ses alliés seront contraints de faire des choix traumatisants afin de mettre fin à la menace qu'elle représente et qu'elle représentera également, plus encore, à l'occasion de House of M, lorsque son instabilité sera exploitée pour effacer toute la race mutante de la surface de la Terre.

Pour Wanda et Vision, les années vont passer, bien qu'à distance, ce qui renforce leur stabilité respective. Leur amour est apparemment terminé. Mais si Brian Michael Bendis, au début des années 2000, montrait aux lecteurs de Marvel les terribles conséquences du désir de maternité et de normalité de la sorcière, ce sera un autre grand scénariste, Tom King, qui nous montrera l'autre côté de la médaille en 2016, c'est-à-dire la personnalité de Vision. Dans la célèbre maxi-série éponyme, que King signe avec Gabriel Hernandez Walta, on voit le syntezoïde, de nouveau membre des Avengers, gérer à sa manière la perte de Wanda et de son amour, ainsi que le désir ardent d'être un véritable être humain, d'être perçu comme telle. Une nécessité qui le conduit à créer une famille apparemment parfaite, une épouse serviable et adorante, deux enfants syntezoïdes qui vont à l'école et tentent de vivre une vie normale, au milieu de la confusion des voisins méfiants et effrayés. Le spectre de Wanda et sa mémoire ne sont pas loin et se manifesteront à nouveau de manière tragique. Ce dernier cycle d'histoires, récompensé par un Harvey Award et un Eisner Award, semble être en partie l'inspiration de WandaVision. La recherche obsessionnelle d'une normalité niée dès le début, l'apparence artificiellement parfaite superposée à la réalité douloureuse et impossible à accepter, la folie d'une situation qui s'étend à celle de l'esprit, tout ceci est suggéré dans les bande-annonces de la série, qui se veut aussi un hommage, sur le plan formel, aux grandes heures de la télévision américaine, quitte à pasticher des sitcoms comme Ma Sorcière bien aimée, comme cela est évident dans les deux premiers épisodes, déjà diffusés. 


Le récit indispensable de Tom King, c'est celui-ci :