L’envol du moineau
Amy Belding Brown
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Cindy Colin Kapen
Editions du Cherche midi
2019
Lu en poche, collection 10/18
451 pages
1672, dans la baie du Massachusetts, Mary Rowlandson, femme de pasteur, se fait capturer par des Indiens avec ses enfants. Mais auparavant, sur quelques chapitres, on découvre la vie d’une femme à cette époque-là, qui doit obéir à son mari, qui ne peut sortir de chez elle sans autorisation, qui travaille du matin au soir jusqu’à épuisement, et qui est mère de plusieurs enfants, bien sûr. Une bonne ménagère que son mari se devait d’honorer de temps en temps… Bref ! Une vie de rêve !
Le puritanisme est une vraie plaie… Mary le découvrira quand elle vivra chez les Indiens. Par comparaison…
Amy Belding Brown ne présente jamais les Indiens comme les bons sauvages par opposition aux méchants puritains chrétiens (ou l’inverse). C’est le point fort du roman. Mary souffrira chez les Indiens, elle sera confrontée à leur cruauté, sa vie sera rude, elle sera l’esclave d’une femme puissante (et oui une femme peut exercer des responsabilités chez les Indiens…) qui ne la ménagera pas mais qui saura aussi la sauver des griffes d’un homme qui voulait la prendre pour épouse. Ce séjour de trois mois chez les Indiens, lui permettra néanmoins d’ouvrir son horizon, de comprendre que la vie telle que la vivent les Anglais, n’est pas la seule possible, la seule viable. Elle va entrevoir la liberté, la possibilité de s’isoler à sa guise, de penser par elle-même. Et surtout elle va comprendre que l’esclavagisme est une aberration, ce que la Bible accepte, voire revendique, est donc une ineptie (idée qui avait commencé à germer en elle lorsqu’elle avait aidé une femme à accoucher au tout début du roman…)
L’auteure s’est inspirée d’un fait réel pour bâtir son roman. La vraie Mary Rowlandson a-t-elle ressenti tout ça ? De cette manière-là ? On ne sait pas. L’auteure ne lui prête-t-elle pas, parfois, des sentiments ou des réactions un peu trop « actuelles » ? Je me suis posée la question de temps en temps.
Mary peut agacer le lecteur par ses hésitations, ses pleurnichements, sa soumission, mais on doit sans cesse avoir à l’esprit, que ces événements se sont déroulés quatre siècles plus tôt… on ne peut la blâmer… Il n’est pas facile de s’extraire du poids des traditions et de la religion.
Non, mes bémols ne sont pas là, ils sont plutôt dans le style que j’ai trouvé trop neutre. J’aime être malmenée par les mots ou alors séduite jusqu’à relire plusieurs fois des phrases ou encore dérangée, j’aime éprouver des sensations fortes face à l’écriture d’un texte. Rien de tout ça avec ce roman. On ne trouve pas la puissance d’évocation de Tiffany Mc Daniel ou encore le souffle poétique de Richard Wagamese. Et puis, personnellement, je n’y aurais pas mêlé une tentative de romance (même si elle n’est que platonique) entre le bel Indien converti et Mary. Elle n’était pas nécessaire pour sa prise de conscience.
Pour conclure, c’est un roman plutôt agréable à lire. Je n’ai pas boudé mon plaisir. Tout ce qui touche aux Indiens me passionne, je n’ai pas perdu mon temps… mais je ne déborde pas d’enthousiasme. Je préfère les romans écrits par des amérindiens, je crois.