Famille Parfaite
de Lisa GARDNER
Je profite de ce nouveau confinement pour reprendre les bonnes habitudes de nos rendez-vous hebdomadaires, en commençant par celui-ci, initié par Aurélia du blog Ma Lecturothèque : les premières lignes d’un livre que j’ai lu, pioché au hasard (ou presque) sur mes étagères ou dans mes e-books.
Si vous souhaitez participer aussi, n’hésitez pas à mettre un commentaire avec le lien de votre article pour que je puisse vous ajouter à la liste.
572 pages – Éd. Le livre de Poche – Poche – E-book – 01/2018
Voilà une chose que j’ai apprise quand j’avais onze ans : la douleur a un goût. La question, c’est de savoir celui qu’elle a pour vous.
Ce soir, ma douleur a un goût d’orange. Je suis attablée avec mon mari dans un box du Scampo, dans le quartier de Beacon Hill à Boston. Sans bruit, des serveurs discrets viennent remplir nos flûtes de champagne. Deuxième fois pour lui. Troisième fois pour moi. La nappe en lin blanc disparaît sous les petits pains maison et un assortiment d’antipasti. Viendront ensuite, dans des assiettes à la présentation soignée, des pâtes fraîches aux petits pois et à la pancetta grillée dans une sauce à la crème légère. Le plat préféré de Justin. Il l’a découvert il y a vingt ans lors d’un voyage d’affaires en Italie et, depuis cette époque, il le commande dans les bons restaurants italiens.
Je prends ma flûte. Je bois une gorgée de champagne. Je repose le verre.
En face de moi, Justin sourit et des rides lui plissent le coin des yeux. Ses cheveux châtains coupés court grisonnent aux tempes, mais ça lui va bien. Il a cette allure rude et indémodable des hommes qui vivent au grand air. Quand nous entrons dans un bar, les femmes le regardent. Les hommes aussi, intrigués par ce nouveau venu, manifestement un mâle dominant, capable de porter de vieilles chaussures de chantier avec une chemise Brooks Brothers à deux cents dollars et que l’ensemble soit du meilleur effet.
« Tu ne manges pas ? me demande-t-il.
– Je me réserve pour les pâtes. »
Il sourit encore et je repense à des plages de sable blanc, à l’odeur iodée de l’air marin. Je me souviens de la douceur des draps de coton entortillés autour de mes jambes nues lorsque nous avions passé la deuxième matinée de notre lune de miel encore enfermés dans notre bungalow. Justin m’avait donné à manger des oranges fraîchement pelées de sa main et j’en avais délicatement léché le jus poisseux sur ses doigts calleux.
Je prends une nouvelle gorgée de champagne, mais, cette fois-ci, je la garde dans ma bouche en me concentrant sur la sensation des bulles liquides.
Était-elle plus jolie que moi ? Plus excitante ? Meilleure au lit ? Ou peut-être, puisque ces choses-là marchent comme ça, aucun de ces paramètres n’était-il entré en ligne de compte. N’avait joué de rôle dans l’équation. Les hommes sont infidèles parce qu’ils sont infidèles. Si un mari a l’occasion de tromper sa femme, il le fera.
Si bien que, d’une certaine manière, ce qui s’est passé durant les six derniers mois de mon mariage n’a aucun rapport avec moi.
Je prends encore une gorgée, toujours du champagne, toujours ce goût d’orange.
Justin, qui a fait un sort aux hors-d’oeuvre, boit une gorgée mesurée et déplace distraitement ses couverts.
Il a hérité de l’entreprise de son père à vingt-sept ans, une boîte de BTP, vingt-cinq millions de chiffre d’affaires. Certains fils se seraient contentés de laisser cette société florissante continuer sur sa lancée, mais pas Justin. À trente-quatre ans, quand je l’ai rencontré, il avait déjà doublé le chiffre d’affaires, qui venait de franchir la barre des cinquante millions, et il se donnait comme objectif d’atteindre les soixante-quinze millions dans les deux ans. Et pas en restant assis derrière un bureau. Justin se faisait une fierté de connaître à fond la plupart des métiers du bâtiment – plomberie, électricité, plâtre, béton. Présent sur le terrain, il passait du temps avec ses ouvriers, se mêlait aux sous-traitants, premier sur le chantier, dernier à partir.
Au début, cela faisait partie des choses qui m’avaient le plus séduite chez lui. Un homme, un vrai. Aussi à l’aise dans une salle de réunion lambrissée que sur un terrain de basket de rue, et qui prenait volontiers son calibre 357 préféré pour aller faire un carton au stand de tir.
4ème de couverture :
Les Denbe semblaient sortir des pages des magazines glamour : un mariage modèle, une belle situation, une ravissante fille de quinze ans, une demeure somptueuse dans la banlieue chic de Boston… une vie de rêve.
Jusqu’au jour où ils disparaissent tous les trois. Pas d’effraction, pas de témoin, pas de motifs, pas de demande de rançon. Juste quelques traces de pas et des débris de cartouches de Taser sur le sol de leur maison. Pour la détective privée Tessa Leoni, l’enlèvement ne fait aucun doute. Mais que pouvait bien cacher une existence en apparence aussi lisse ?
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