Je mets souvent à l’honneur des personnages dans mes articles, et regroupent plusieurs albums jeunesse avec un même protagoniste, qu’il soit humain ou animal. Mais aujourd’hui je choisis de m’intéresser à un cas particulier et pars sur un élément du quotidien que l’on trouve plus que souvent dans nos histoires : les maisons. Les immeubles, les cabanes, les terriers, les trous de souris… tout ce qui peut servir d’abri un jour ou l’autre. Dans mes recherches, je suis tombée sur beaucoup de beaux ouvrages documentaires sur les maisons à travers le monde ; mais j’ai décidé de ne me consacrer ici qu’aux bâtiments dans des récits fictifs. Mais des récits où la place centrale est réservée – ou joue un grand rôle pour le déroulement de l’histoire – aux abris en tout genre. Parce qu’on ne s’en rend pas compte mais le lieu où l’on vit est très important, il peut façonner notre vision et notre mode de pensée. Laissez ces quelques albums sur les cabanes vous faire rêver d’un ailleurs.
Graines de cabanes de Philippe Lechermeier (texte) et Eric Puybaret (illustrations), paru en 2005 chez Gautier Languereau
Alphonse Gabini, poète, rêveur et voyageur, prend un jour sa valise sous le bras et s’en va parcourir le monde pour découvrir les multiples cabanes qui existent et en récolter les graines dans le but de se faire une jolie collection. Dans son périple, il découvre les plus belles, les plus ingénieuses, les plus loufoques, les plus astucieuses des cabanes. Toutes avec leur utilité, leur fonction propre, leur propriétaire charmant et leur poésie. Entre la cabane à livres, la cabane en pain d’épices, la cabane de rêve (à ne pas confondre avec la cabane à rêves), ou encore la cabane aux mille et une portes, Alphonse apprend également à connaître les métiers essentiels à la construction d’une cabane, les outils nécessaires, ainsi que les étapes d’éclosion d’une belle cabane.
C’est un vrai moment de poésie, de rêverie et de douceur que nous offrent là les deux artistes que sont Philippe Lechermeier et Eric Puybaret, que j’admire depuis longtemps. A chaque double page on découvre une nouvelle cabane et ses propriétés, mais surtout on s’envole au pays de l’imagination fertile. Je possède la seconde édition, de 2008, publiée en petit format (pour des questions de budget pour ma part), mais cet album révèle toute sa splendeur dans son format original qui permet de profiter pleinement des magnifiques illustrations d’Eric Puybaret. Pour faire rêver petits et grands.
Rêves de cabanes de François David (texte) et 31 illustrateurs, paru chez Sarbacane en 2008
31 petites histoires, sous forme de poème, de dialogue ou encore de réflexion, pour décrire tout autant de cabanes, plus merveilleuses les unes que les autres. Tantôt fragile, tantôt solide, parfois toute petite, parfois immense, faite de bric et de broc ou bien solide, l’une réelle, l’autre bien au chaud dans le cœur d’un enfant, toutes ses cabanes sont des refuges de rêves pour l’imagination des enfants.
Chacun des textes de François David est accompagné d’une superbe illustration. Ces dernières sont aussi diverses dans leur style que le sont les textes écrits par l’auteur. Le tout pour ravir petits et grands, chacun pourra y trouver un élément à son goût. Pour la couverture, a été choisie l’illustration de Gilles Bachelet, mon idole, je ne pouvais donc que craquer.
La moufle de Bernard Villiot (texte) et Antoine Guilloppé (illustrations), paru chez L’élan vert en 2012
Par un soir glacial d’hiver, alors que toute la forêt est blanche, un rat trouve une belle moufle rouge et chaude. Tout heureux, il s’y installe pour passer une bonne nuit. Quelques instants plus tard, arrive une grenouille, qui elle aussi cherche refuge. La moufle est bien assez grande pour deux, le rat se pousse un peu. Puis surgit un hibou. On se sert encore un peu pour y rentrer à trois. Se succèderont ainsi divers animaux, jusqu’à ce que la moufle, étirée en tous sens et pleine à craquer de ses habitants, ne tienne plus et se déchire en mille morceaux.
Même si au premier abord, ce récit dénote un peu par rapport à mes autres choix, il m’a pourtant paru évident qu’il fallait que je case cette histoire relatant la recherche d’un refuge par divers animaux dans mon opus sur les abris. La moufle est un conte traditionnel et de randonné (c’est-à-dire où s’enchaînent un tas d’évènements répétitifs), datant de bien plus loin que 2012, qui a été pris, repris, travaillé, retravaillé, adapté et réadapté des dizaines de fois par de multiples auteurs, illustrateurs et maisons d’édition. J’ai choisi de vous faire découvrir cette version, car c’est le travail d’Antoine Guilloppé qui m’a intéressée. Il rend ce conte prenant et incisif grâce à ses choix de couleurs : 3 seulement. Le blanc pour la neige, le noir pour les ombres de tous les éléments qui entourent l’histoire et le rouge pour la moufle. Un récit que l’on prend donc plaisir à redécouvrir avec cette nouvelle façon de l’illustrer.
Lulu et le château des quatre saisons de Daniel Picouly (texte) et Frédéric Pillot (illustrations), paru chez Magnard jeunesse en 2014
Par une belle soirée d’été, Lulu et ses amis profitent d’un magnifique coucher de soleil. Rassasiés de ce beau spectacle, ils vont ensuite se coucher. Quelle n’est pas leur surprise quand le lendemain une épaisse couche de neige recouvre leur pays ! Vite vite, ils vont demander de l’aide à Qui-sait-tout. Le hibou sage est affolé, il a perdu la clef qui permet de remonter l’horloge du château des quatre saisons, demeure où se relaient, normalement dans le bon sens, été, automne, hiver et printemps. Tant que la clef n’est pas retrouvée et que le château demeure détraqué, le temps n’en fera qu’à sa tête. Lulu et ses amis se mettent en quête de cette fameuse clef.
Les aventures de Lulu sont nombreuses et plaisent à beaucoup de bambins, c’est pourquoi j’ai choisi ce tome pour ma sélection. Une jolie façon d’aborder avec les enfants le thème des saisons. La taille de l’album permet de voir tous les détails et d’apprécier les magnifiques illustrations. Le château et ses quatre tours représentatives des saisons sont splendides.
Abris d’Emmanuelle Houdart, paru chez Les fourmis rouges en 2014
« Un abri, c’est un endroit où l’on se sent en sécurité. Où rien de mauvais ne peut nous arriver. Dans un abri, les chagrins sont consolés. Un abri, c’est un refuge contre les difficultés. »
Dans cet ouvrage aux grandes dimensions, Emmanuelle Houdart nous offre un panel de ce qu’est un abri. Car un abri ce n’est pas seulement quatre murs ou un endroit où l’on a chaud ; ce n’est pas seulement un lieu qui nous protège physiquement. Un abri peut aussi protéger psychiquement, intellectuellement. Un abri est un lieu, physique ou immatériel, mais surtout personnel, où l’on se sent bien, chez soi, sans jugement. Une place où chacun peut être ce qu’il est, que l’on peut garder pour soi ou partager. Cet album, un peu à part dans ma sélection, est également magnifique de par ses illustrations tout aussi importantes, voire plus, que le texte.
La poudre d’escampette de Chloé Cruchaudet, paru en 2015 chez Delcourt
Paul est nouveau dans le quartier et n’y connaît personne. Un matin, alors qu’il promène sa chienne Paulette, celle-ci l’emmène près d’un groupe d’enfants en train de construire une magnifique cabane-radeau en bois, sur l’eau. Pardons, pas une cabane, mais un paquebot. Un paquebot qui pourra les emmener vers l’endroit de leur rêve, là où se trouve leur place, leur destinée. Quand leur navire est prêt, la petite bande part à l’aventure. Mais sur le chemin ils rencontrent une autre bande ayant eux-aussi construit un paquebot. La guerre commence.
Une bande dessinée aux dimensions grandioses pour révéler toute la splendeur de cette histoire cocasse et remplie d’imagination. Une belle façon de rendre hommage aux rêves des enfants, qui peuvent devenir réalité avec une simple cabane. A la fin de l’album, une maquette détachable pour construire sa propre cabane et partir à la conquête de sa destinée.
Le manoir hanté de Florent Lepeytre (texte) et Virginie Vidal (illustrations), paru en 2015 aux éditions Les Deux Coqs d’Or
Un après-midi, un bus rempli d’écoliers se gare entre la salle des fêtes et le manoir hanté. Dans la précipitation, la troupe se trompe de porte et au lieu d’aller prendre un gentil goûter dans la salle des fêtes, elle se retrouve à déambuler à travers les cinq étages du manoir. A chaque salle ses surprises et les enfants vont en faire les frais. Ou bien est-ce les habitants de la demeure hantée qui vont s’en mordre les doigts ?
Un album tout en hauteur, montrant au fil des pages la découpe transversale du manoir hanté pour que le lecteur puisse observer à chaque fois les 5 étages en même temps. A chaque page, une avancée de quelques minutes, avec de nouveaux enfants dans une nouvelle pièce et des rencontres cocasses. Un très bel album foisonnant de détails où le lecteur peut s’amuser à chercher les avancements et différences à chaque étape. Des heures de recherches en perspective, à la façon d’un Où est Charlie ? A la toute fin, les élèves peuvent enfin prendre le goûter dans la salle des fêtes. Mais ils ont emporté avec eux des ustensiles du manoir. Au lecteur de replacer ces éléments dans les bonnes pièces du château.
Pas assez d’abris à votre goût ? En voici des supplémentaires :
- La maison de Roberto Innocenti et Patrick Lewis chez Gallimard jeunesse
- Le livre qui rend heureux de Marije Tolman et Ronald Tolman chez Milan jeunesse
- La maison penchée de Marine Benezech chez Chouetteditions
- La maison en petits cubes de Kenya Hirata et Kunio Katô
Installez-vous confortablement dans votre abri préféré pour ces lectures les loulous !