C'est encore une lecture commune que nous vous proposons aujourd'hui...
Pachinko, c'est la triste mélopée de plusieurs générations d'exilés, devenus apatrides et jamais adoptés. C'est, à travers l'histoire de Sunja et de ses descendants, l'histoire de la Corée, conquise par le Japon, puis déchirée en deux états que tout oppose. Mais c'est surtout l'histoire d'individus qui subissent. Et en première ligne donc, Sunja, jeune femme désirée par un homme riche qui obtiendra ses faveurs avant de lui avouer qu'il est déjà marié, mais qu'il peut l'entretenir, elle et l'enfant qu'elle porte. A partir de là, le mécanisme tragique est enclenché et Sunja n'en sera jamais vraiment débarrassée. Sauvée par un homme bon, Sunja, le suivra et fuira l'opprobre en s'installant au Japon. Mais évidemment, cela n'ira pas sans mal. Sunja, son mari, ses fils, son beau-frère et sa belle-sœur, ses petits enfants ensuite, vivront constamment sous le poids de leur non-définition : ils ne sont pas japonais. Ils ne pourront jamais travailler où ils veulent, partir où ils veulent, vivre décemment.
Le livre se divise en trois parties. La première commence doucement, met en place la situation, au rythme de la vie, plutôt tranquille (en regard de ce qui suivra) que Sunja mène en Corée auprès de sa mère jusqu'à sa rencontre avec Hansu. La deuxième se passe au Japon et l'on y suit la vie de cette famille en proie à la seconde guerre mondiale, au racisme, à la maladie, à la pauvreté, mais toujours avec dignité et amour. Il s'y passe beaucoup plus de choses, bien plus graves, bien plus rapidement, et c'est celle que j'ai préférée, car Sunja s'y révèle et devient une vraie femme. La troisième suit davantage la génération suivante et, au gré de l'époque, nous fait voyager d'histoire en histoire, à travers l'émergence du divorce et de l'opprobre qu'il fait naître, à travers les possibilités offertes par les Etats-Unis, l'argent, mais aussi dans l'ombre d'une identité toujours peu claire, des préjugés, de l'alcool, de la drogue, du suicide...
Si j'ai beaucoup aimé l'histoire entre Sunja, Hansu et Isak, j'ai été beaucoup moins touchée par les personnages qui apparaissent ensuite. Ils sont certes le reflet de cette société qui évolue, pas toujours positivement, mais je ne me suis pas sentie touchée par les histoires d'Etsuko, Hana, la famille de Noa ou même Solomon, ils viennent de trop loin, trop vite. Peut-être aussi Sunja vit-elle trop de choses : les deuils, la pauvreté, l'ingratitude, la solitude...
Le triangle amoureux initial est bien plus prenant. Il m'a fait, personnellement, étrangement penser à Tess d'Urberville de Thomas Hardy. C'est un peu l'histoire telle qu'elle se serait produite si, après avoir été abusée par Alec, Tess n'avait pas perdu leur bébé. Cet homme sombre, mais pas malveillant, à la moralité douteuse mais toujours là en cas de besoin, est une des plus grandes énigmes du roman. Dans quelle mesure peut-on le condamner ? Et de toute façon, comme dans toute tragédie, y a-t-il réellement un fautif ? Difficile à dire.
C'est un roman qui m'a plu, mais dont la fin m'a un peu déçue ; un roman très fort mais qui semble pécher par excès de zèle. Peut-être aurait-il fallu s'arrêter avant... Ne pas vouloir en dire trop ! Voilà pour mon avis... Je laisse maintenant la parole à Mag 😉
Priscilla
Cette lecture commune me laisse un goût d'inachevé, une histoire dont le sujet, pourtant si fort, aurait pu me transporter et m'émouvoir, m'a au fil des pages perdue et même parfois ennuyée. Certes les peuples Japonais et Coréen sont bien plus dans la réserve que nous, pourtant il me semble difficile de lire l'histoire de Sunja, qui a traversé tant d'épreuves et montrer tant de courage, sans ressentir aucune émotion, c'est pourtant presque le cas. La part historique que l'on découvre à travers les générations qui se succèdent, est par contre instructive et même passionnante, la place de la femme dans cette société est une découverte pour moi, ainsi que l'animosité et le mépris des Japonais envers les Coréens, cela aura d'ailleurs un impact sur la vie de chacun des personnages rencontrés au fil des ces trois parties.
Je rejoins Priscilla sur la préférence qu'elle évoque pour le livre 1, la rencontre entre Sunja, Hansu et Isak laissait présagée une histoire passionnante, peut-être que certains protagonistes ont été injustement survolés, alors que d'autres, moins passionnants, méritaient que l'on s'y attarde moins longtemps. Ce livre, dont je retiendrai avant tout, le courage et la détermination de chacun à survivre et nourrir les siens quelque soit le prix à payer, la rudesse de la vie, n'est pas un déception, je m'attendais à autre chose et j'ai trouvé tout cela assez lisse, n'ayant pas lu les avis d'autres lecteurs, je ne sais pas si mon ressenti est partagé, à vous de me le dire.
Heureuse une nouvelle fois d'avoir partagé cette lecture avec Priscilla.