Encore… un récit qui fait résonner l’actualité des migrants. Choquant et bouleversant.
╰☆ Résumé ☆╮
Gazâ a neuf ans et vit sur les bords de la mer Egée. Il travaille avec son père Ahad, passeur de clandestins. Ils entreposent dans un dépôt les individus qui viennent de parcourir plusieurs milliers de kilomètres. Un jour, Gazâ cause la mort d’un jeune Afghan. Dès lors, le garçon ne cesse de penser à lui et conserve précieusement la grenouille en papier qu’il lui avait donnée – ce qui ne l’empêche pas de devenir le tortionnaire des clandestins qui ont le malheur de tomber entre ses mains. Un soir, tout bascule, et c’est désormais à Gazâ de trouver comment survivre…
On retrouve dans ce roman coup de poing le regard sans concession sur le monde contemporain et l’insolence de ton de l’auteur de D’un extrême l’autre (Prix du meilleur roman de l’année 2011, Turquie).
✿ Mon avis ✿
Voici un livre que je n’ai pas choisi ni acheté moi-même. Je l’ai réceptionné lorsque j’ai voulu tester la Kube, une box littéraire qui comprend un livre et quelques goodies, le tout expédié de France. J’avais uniquement spécifié que j’aimerais lire quelque chose qui me ferait découvrir une autre culture (style Nadia Hashimi ou Khaled Hosseini). Résultat : je n’ai pas été déçue!
Ce livre est très original et m’a fait sortir de ma zone de confort. On suit un jeune garçon de 9 ans (au début de l’histoire) qui ‘aide’ son père à gérer le flot de migrants qui sont de passage sur leur terrain. Son père est un trafiquant de clandestins qui s’occupe de faire le passeur de territoire en territoire. Les migrants sont gardés enfermés durant leur séjour – parfois quelques heures ou jours, parfois des semaines entières – et Gazâ qui vit sur les bords de la mer Egée se voit obligé de jouer l’intermédiaire.
Il nous raconte tout simplement son histoire. Tragique, violent, cruel même, son quotidien est des plus choquant. Il déteste son père et ce qu’il lui demande de faire mais en même temps, il a tellement envie de lui plaire qu’il fait de son mieux lorsqu’il lui confie des tâches. Enfin, sauf cette fois-là…
Le récit semble être construit comme une satire de la société, comme une expérience sur la vie en groupe. Gazâ s’amuse à faire une étude à une taille minime, lui dans sa tour d’Ivoire où il peut tout observer. De nombreux sujets sont abordés, rendant le texte très riche et bien plus varié qu’un simple récit de vie : démocratie, patrie, droit des femmes, nature humaine, homosexualité, viol et religion… Une oeuvre dense qui nous fait passer par tout un panel d’émotions.
Moi qui pensait être au summum de l’horreur en débutant le récit… j’ai été bien plus surprise aux environs de la moitié quand l’accident survient et que l’histoire de Gazâ se transforme en véritable cauchemar. Un cauchemar qu’on ne peut s’empêcher de continuer à lire tant la plume choque et divertit le lecteur en quelque sorte. La fin m’a cependant laissée de marbre et j’ai eu plus de mal à lire le dernier tiers.
Dans l’ensemble, un livre que je suis contente d’avoir lu pour son originalité et son cadre si déroutant. La plume et l’histoire de Gazâ sont uniques et méritent des distinctions. A découvrir si vous cherchez quelque chose de plus profond, qui vous sort de votre zone de confort et vous fait réfléchir sur l’Autre. Après avoir lu ça, on est bien content de vivre dans les conditions qui sont les nôtres… ça je peux vous l’assurer!
CHRONIQUE #678 – Août 2021
- Editeur : Le livre de poche
- Parution : 2017
- Nombre de pages : 480 pages
- Genre : Littérature étrangère