Auteur : Elodie Morgen
Paru le : 31 mai 2021 270 pages Thème : thriller fantastique
disponible sur le site de l'éditeur
et sur Amazon
Ma note : 16/20
J'ai eu la chance de gagner ce livre lors d'un concours sur instagram et j'étais plus que curieuse de découvrir cette histoire. Nous suivons Lina, 16 ans, qui vit dans la rue depuis peu de temps. Les vampires sont sortis de leur caveau, mais ce ne sont pas eux les plus dangereux. Le passé de Lina est celui d'une enfant battue et sa fugue n'appellera pas de recherches. Alors qu'un ivrogne lui saute dessus, elle le tue, pour sauver sa vie. Une vie dans la rue qu'elle n'a pas désiré, une vie miséreuse où la peur de chaque instant la tenaille en son sein. 3 ans plus tard, après bien des cauchemars dès suite de son acte, elle fête ses 19 ans. Une tablette de chocolat volée pour inaugurer ce jour mémorable, un papier lui arrive par le vent innocent. Il s'agit de servir de cobaye pour une expérience médicale. Rien de transcendant, cela arrive régulièrement ce type d'offres. Lina voit en cette occasion la chance de retomber sur ses pieds et d'avoir un peu de bonheur. C'est là que commence véritablement le cauchemar.
Monstrueusement humain est un récit qui nous emporte dans le monde de l'esprit, celui d'une jeune fille devenue femme qui n'a pas eu la chance de vivre dans une famille aimante. Se retrouver dans la rue par choix, pour ne plus subir la violence du foyer, vivre dans la peur permanente de ne pas savoir de quoi sera fait demain dans la rue ou chez elle est un quotidien qui ne s'enlève pas en un instant ? Cette chance, cet espoir réduit à néant par d'autres est un poids supplémentaires sur les épaules de la jeune femme. Ne compter sur personne ! Cela pourrait être le slogan de ce récit. Il ne faut compter que sur soi-même et éviter les petits papiers qui traînent dans la rue. Toujours est-il que Lina n'a pas de chance depuis longtemps et cela ne s'arrange pas. Se retrouver seule dans un monde hostile, voir plus que nous ne le voudrions, faire partie d'une expérience de fou et laisser la peur nous guider... Voila ce que va vivre Lina dans sa jeune vie.
Le sentiment le plus dominant est bien entendu le manque de confiance, l'émotion ? La peur ! Comment ne pas être horrifiée face à certaines situations ? L'auteur nous entraîne dans un monde insoupçonné où la médecine n'est pas forcément la plus légale et où les trafics d'humains peuvent démarrer très jeune. Le fait d'indiquer en début de livre que ce dernier peut heurter la sensibilité des plus jeunes et peu habitués est un bon point. Personnellement, lisant des livres plus gores, plus coriaces, plus machiavéliques encore, j'ai trouvé mon plaisir dans cette lecture qui ne m'a pas heurté du tout. Au contraire, l'écriture est fluide, et les détails sont juste ce qu'il faut. Alors oui, il est question de viols, que ce soit pour des enfants ou des adultes, mais il faut remettre le contexte d'une part et d'autre part il faut gratter de plus près la plume de l'auteur.
Le contexte, il s'agit de la vente d'esclaves, jeunes, très jeunes, dans un pays où tout est permis (ou presque) : le Cambodge. Un pays bien connu pour ses vices et sévices qui est difficiles de maîtriser. Ces jeunes gens qui ont été enlevé à des familles, des enfants qui pensaient pouvoir aider leur famille en travaillant, mais pas en devenant des poupées de luxe. C'est un contexte difficile, certes, mais l'auteur a la plume qu'il faut pour en parler. Et puis il ne faut pas oublier l'hôpital. Les thèmes sont lourds, mais il n'y a pas d'insistance non plus des scènes de viols sur les enfants, tout juste évoqués sans les mots si brut. Les sensations ne ne pouvoir rien faire sont bien indiquées, le ressenti de Lina face à une scène est poignante, elle la voit sans que nous ne soyons spectateur. C'est une véritable force de ne pas décrire ces scènes par les actes, mais plutôt par les émotions du moment. Une seule pourrait être dérangeante, si elle n'était pas courte et si la vengeance ne s'effectuait pas en même temps.
Comme indiqué plus haut, il y a des thèmes forts comme cette violence sexuelle, mais surtout la violence psychologique. La peur est difficilement contrôlable et en jouer est la pire chose qu'un humain peut faire à un autre. Les diverses rencontres de Lina avec les autres personnages sont toutes " à choc ", autant dire qu'il va survenir toujours quelque chose de violent qui va lui faire du mal. Celle de ne pas pouvoir aider, celle d'être obligée de frapper pour survivre, celle de ne pas pouvoir se libérer de ces chaînes psychiques. Ne pas pouvoir, il faut se battre tout le temps, ce qui fatigue énormément l'esprit humain qui est déjà en danger. Je n'entrerais pas dans les détails de ce qui arrive à Lina autre que ce que j'ai pu laisser au début de ma chronique, juste que le temps des expériences n'est pas terminé. Et puis il y a ces vampires qui sont dehors, un coming plutôt froid qui s'invite dans le quotidien de la jeune femme.
Seul bémol : la fin est prévisible. Certains faits n'étaient plus concordants avec les ressentis de la demoiselle en détresse et d'ailleurs j'en avais parlé à une amie de ce que je voyais comme fin et je suis tombée pile dessus. Si vous regardez bien, vous pouvez trouver ce qui va se passer : de nombreux indices sont déposés et puis il faut bien admettre que l'opération de Lina ne pouvait pas prêter à confusion.
En conclusion, c'est un univers sombre, teinté de réalisme qui fait froid dans le dos malgré tout, sachant que certains faits existent réellement. Le mélange fantastique/expériences médicales est bien amené. L'esprit humain n'est pas prêt pour le moment à surmonter réellement ses peurs. Ce fut une belle aventure (oui, j'ai bien mis belle) car j'ai découvert une nouvelle plume et une imagination à la fois morbide et étrange. Je lirais avec plaisir d'autres œuvres de Élodie Morgen.
" Sur cette touche morose, Michaël pénétra dans mon antre maudit. Comme tous les matins, ses apparitions dans mon antre maudit signifiaient l'arrivée imminente de ce salaud de Brainchips. J'avais donc tendance à oublier la politesse...
_ Bonjour Lina ! As-tu passé une bonne nuit ? s'enquit Michaël. Attendait-il véritablement une réponse positive à une interrogation aussi débile ?
Sa crédulité me sciait...
_ T'as vu ma tronche ? rétorquai-je en pointant mon visage du doigt. Alors, à ton avis ?
Il se pinça les lèvres avant de répliquer. Il avait sans doute pris conscience de l'absurdité de sa question.
_ Tu n'as pas bien dormi, si je comprends bien, conclut-il.
_ Tout juste ! "