Va où ton coeur te mène - Gabriel Ringlet
Albin Michel
Parution : 01/09/2021
Pages : 160
Isbn : 9782226462329
Prix : 18 €
Présentation de l'éditeur
Convaincu depuis toujours de l’urgence d’un renouveau prophétique pour le christianisme comme pour toute la société, Gabriel Ringlet a été conforté dans ce sentiment par les bouleversements de la pandémie. D’où ce récit qui ressuscite pour nous la geste du prophète Elie, personnage de roman d’une modernité sidérante. Son histoire est celle de la conversion d’un intégriste : après avoir sauvagement combattu les mécréants au nom de sa vision d’un Dieu de pouvoir et de vengeance, il sera conduit à un retournement total, pour rejoindre le Dieu de la miséricorde et des Béatitudes.
Ce parcours bouleversant, Gabriel Ringlet le raconte en le reliant aux leçons de sagesse de Qohélet, autre personnage biblique hors-norme. Celui-ci, s’adressant à un jeune garçon, lui dit « Va où ton cœur te mène », transmission d’une flamme de liberté intérieure que l’auteur reprend à son compte en s’adressant à son dernier filleul, qui se prénomme… Elie. Ce livre de naissance attentif à la douceur d’un souffle ténu jette un pont entre les âges.
L'auteur
Gabriel Ringlet est né à Pair-Clavier, dans le Condroz liégeois (Belgique), le 16 avril 1944..
Professeur émérite à l’Université catholique de Louvain (Louvain-la-Neuve), il y a présidé le Département de communication et dirigé la section de journalisme. Après avoir été vice-recteur aux Affaires étudiantes de 1988 à 2001, il est devenu le prorecteur chargé des Affaires régionales, de la culture et de la communication
Il a fait ses études secondaires au Collège Ste-Croix de Hannut. A l’Université de Liège, il a suivi les cours de langues et littératures orientales tout en poursuivant ses études de théologie au Grand Séminaire. Il a été ordonné prêtre en juin 1970. A l’Université de Louvain, il a étudié la philologie romane, la philosophie, la théologie et la communication. Il est docteur en communication sociale.
Mais qu’on ne s’y trompe pas ! Gabriel Ringlet est aussi un homme de terrain qui a toujours voulu conjuguer démarche intellectuelle et engagement pratique dans une relation de grande proximité avec différents publics.
Théologien, il sera curé de paroisse et aumônier d’hôpital pendant 10 ans.
Spécialiste de l’information locale, il pratiquera durant 20 ans, un journalisme actif dans la presse quotidienne.Et c’est bien cette convergence entre théorie et pratique, au carrefour de plusieurs disciplines, qui fonde l’originalité d’un parcours vraiment atypique. Frontalier et donc attentif à la pluralité des regards, Gabriel Ringlet a publié de nombreux ouvrages qui invitent au dialogue autour de trois questions :
Le dialogue entre mort et communication. Qu’on pense, notamment, à Ces chers disparus, Un peu de mort sur le visage et à Ceci est ton corps. Le souci de rendre à la mort ses lettres de noblesse et d’en parler « tant qu’il fait beau » représente un point central de son écriture et de son engagement
Le dialogue entre « ceux qui croient au ciel et ceux qui n’y croient pas ». Son Evangile d’un libre penseur reste, à cet égard, un livre de référence qui continue à lui valoir de nombreuses invitations dans tous les milieux soucieux de faire se rencontrer la diversité des convictions.
Le dialogue entre Evangile, actualité et imaginaire. Dialogue à propos duquel il s’est longuement expliqué dans Ma part de gravité et qu’il applique, sous un mode poétique, dans Eloge de la fragilité mais aussi à travers Et je serai pour vous un enfant laboureur.
Source : le site de l'auteur
Mon avis
C'est un texte poétique de grande beauté que nous livre Gabriel Ringlet en nous racontant le parcours du prophète Élie.
Élie, c'est le combattant, oserais-je dire "l'intégriste", qui va affronter les adorateurs de Baal avec fougue, porter sa flamme pour Yahvé. C'est celui qui "se leva comme un feu et dont la parole brûlait comme une torche" mais c'est aussi celui qui va se convertir et découvrir le feu qui rafraîchit, un éveilleur de souffle.
En redécouvrant la vie d'Elie au 9ème siècle avant JC sous le règne du roi Achab, on découvre un homme avec ses failles, qui va apprendre que la foi c'est un apprentissage et que c'est petit à petit, par des petits riens que l'on approche Dieu. C'est aussi une méditation sur le temps de l'instant, sur le temps qui passe, un message de liberté intergénérationnel et des liens à faire entre l'enfance et la vieillesse.
Un très beau texte, essentiellement les passages écrits parlant des liens avec son filleul Élie. Emouvant, beau.
De très belles réflexions sur l'homme, ses faiblesses, la foi, le cheminement d'une vie.
Á lire et à méditer. Un livre de chevet.
Ma note ♥
Les jolies phrases
Faire naître le poème que chacun porte en soi. Un accouchement difficile quelquefois.
Miracle de confiance et de la sobriété : recevoir chaque jour le petit reste qui donne la force d'atteindre le lendemain.
On peut vivre avec un rien, dit-elle, et il arrive même que ce rien engendre un rien de joie.
Prends à bras-le-corps la résurrection toute fraîche qui est là, devant toi, avant de penser à la mort qui suivra. Aujourd'hui est tout neuf. Laisse-toi envahir par cette nouveauté et n'oublie jamais qu'elle a existé. Á chaque jour, le jour suffit.
Plus une parole est forte et plus la tentation est grande de l'imposer fortement.
Est-ce que Dieu peut nous faire perdre la raison ?
Plus une parole est forte et plus la tentation est grande de l'imposer fortement.
Mais brûler ne veut pas dire incendier. L'enjeu n'est pas de modérer le feu et moins encore de l'étouffer, mais de réussir cette chose rare et belle : plus je brûle intérieurement et plus je partage ma brûlure sobrement. On peut dire aussi : plus une parole est forte et plus il faut la délivrer faiblement.
Ne sommes-nous pas prophètes, toi et moi ? Pourquoi l'un est-il le vrai et l'autre le faux ? N'avons-nous pas le même idéal, la même sincérité ? Ne brûlons-nous pas du même feu ? Est-il si grave de n'avoir pas le même dieu? Ou de n'en avoir pas ?
Hier, seul contre tous, il osait faire face à un ennemi innombrable. Aujourd'hui il ne parvient même plus à se faire face à lui-même, perdu.
Il arrive que les démons intérieurs nous talonnent de si près que nous ne trouvons pas la moindre cachette au-dedans de nous pour leur échapper.
Je n'oublie pas que la dépression, quelquefois, nous disloque. Nous sommes comme désarticulés. Un étranger est entré en nous. Étranger à nous, il nous rend étranger aux autres et à nous-mêmes. C'est le côté blessure de la fêlure. Mais cette faille peut aussi, parfois, provoquer un appel d'air qui va rafraîchir la maison. Du coup, l'expérience dépressive révèle la présence d'une nappe phréatique qui alimente les sources que nous n'entendions plus chanter. La brisure annonce alors le printemps d'un relèvement.
On n'amène pas un fruit à maturité dans l'urgence.
Va avec la force que tu as!
Élisée va faire en quelque sorte d'une charrue deux coups : répondre à l'urgence de l'appel et dire adieu à sa parenté. Il retourne à son champ, sacrifie sa paire de boeufs, fait un feu avec la charrue pour cuire la viande et offre un banquet à celles et ceux qui travaillent avec lui; puis il suit Élie et se met à son service. Voilà qui donne une couleur bien plus humaine à sa vocation. Car en brûlant sa charrue et en sacrifiant son outil de travail, il indique clairement qu'il s'engage à retourner de nouveaux champs.
J'aimerais que personne sur terre n'arrive ou s'en aille sans avoir été blotti dans des bras secourables. Blottir, ce n'est pas s'enfermer mais faire passer. Blottir pour laisser grandir, pour laisser partir. Blottir un naissant et blottir un mourant. Blottir un blessé, un découragé, un très âgé...